Bibliothèque Léon Deubel
Comme signalé dans l’article de mi janvier consacré au poète, la Bibliothèque municipale de Belfort est devenue Bibliothèque Léon Deubel.
Pour mémoire l’article sur le poète : Cliquer ici
Lors du dernier conseil municipal de décembre 2013, il a été décidé de baptiser la bibliothèque municipale du nom du poète Léon Deubel.
Bibliothèque Léon Deubel (Photo JM)
Cette initiative marquante vient clôturer l’année consacrée par la ville à l’enfant de la Cité du Lion pour le centième anniversaire de sa mort et lui rendre ainsi un hommage perpétuel.
Petit historique de la bibliothèque municipale
La bibliothèque municipale fut créée par le décret du 2 novembre 1789 lors des confiscations révolutionnaires de tous les biens appartenant à l’église. Les fonds sont constitués principalement des livres de la bibliothèque du couvent des Capucins, installé à Belfort depuis 1619.
Dessin du couvent des Capucins fin 18ème siècle (conservé au Musée de Belfort)
Il était implanté entre le faubourg de Montbéliard et la Savoureuse au sud du théâtre.
Plan de 1768, montrant l’implantation du couvent des Capucins, édité en 1888 par A. Papuchon (Commandant du Génie)
Le jardin médiéval créé en 2007 reprend en partie les formes des jardins de cloître comme celui du jardin du couvent des Capucins; de plus, il est situé approximatif sur l’emplacement du jardin de l’époque…
Le décret n’eut son application réelle qu’à partir de la promulgation de la loi du 18 août 1792 qui supprimait ‘’Les congrégations séculières et les confréries’’. La municipalité peu empressée d’engager des frais pour réaliser une bibliothèque municipale, fut mise en demeure par les Administrateurs du District le 1er Pluviôse An III (20 janvier 1795) de chercher un lieu pour entreposer le fond des Capucins, du moins ce qu’il en restait car une partie avait rejoint Colmar.
Hôtel de Ville (1796-1905)
En 1796, les fonds furent entreposés dans un premier temps dans une salle de l’Hôtel de Ville pour y établir l’inventaire. Il fut réalisé par l’Abbé Bévalet qui ainsi, devint le premier bibliothécaire municipal pour la ville de Belfort. Les ouvrages du fond des Capucins et des Cordeliers de Thann auraient rejoints le fond belfortain !
Carte postale de l’Hôtel de Ville en 1828
La première bibliothèque municipale, installée dans deux salles du rez-de-chaussée dans l’aile droite, ouvrit en 1796. Pendant près d’un siècle, elle eut une activité réduite et le fond s’amincit… le Siège de 1870-1871 ne contribua pas, loin s’en faut, à la conservation de ce patrimoine.
La Société d’Emulation créée en 1872, fut en charge de reconstituer petit à petit le fond littéraire de la bibliothèque municipale. En parallèle, elle constituait le sien.
Log de la SBE (Société Belfortaine d’Emulation)
En 1874, une salle de lecture fut ouverte en ces mêmes lieux.
Carte postale de l’Hôtel de Ville au tout début 1900
En 1902 éclata un conflit entre la Ville et la Société d’Emulation sur le régime de propriété du fond. Il fut partagé en laissant les deux entités insatisfaites.
Hôpital Sainte-Barbe (1903-1933)
Ce fut l’ancien hôpital Sainte-Barbe qui abrita l’hôpital civil jusqu’en 1899, rue du général Roussel, qui accueillit en 1903 la bibliothèque municipale et son fond réduit dans deux salles mises à disposition par le musée.
En 1905, la Société d’Emulation vint s’installer elle aussi en ce lieu et y stocker son propre fond de livres et manuscrits !
Carte postale de l’ancien hôpital civil où s’installa la bibliothèque municipale.
Le premier bâtiment de droite sur la carte postale a été rasé, seul le bâtiment derrière existe toujours, il est utilisé actuellement par la Faculté Léon Delabre.
Une nouvelle fois, le fond de la bibliothèque municipale ne fut point dynamisé, par manque de financement. Seuls ou presque, les dons du Ministère de l’instruction publique vinrent compléter le fond. Mal entretenu et peu catalogué, il n’eut pas un accompagnement digne de ce nom.
Il faut attendre le début des années 1920 pour que la bibliothèque municipale reprenne un bain de jouvence grâce à la volonté du maire Edouard Levy-Grunwald; une opération de classement et de réorganisation du fond fut entreprise en 1929. Pour poursuivre sa revitalisation, il était fortement envisagé de l’implanter dans un lieu plus moderne.
Maison du Peuple (1933-1980)
La Maison du Peuple, la réalisation emblématique de l’architecte Paul Giroud, construite de 1932 à mai 1933, accueillit la bibliothèque municipale qui occupa le rez-de-chaussée et l’entresol de l’aile gauche.
Carte postale de la Maison du Peuple
Initialement, son nom était la Maison de la Mutualité et elle devait être implantée dans l’avenue Jean Jaurès en lieu et place du square Lechten !
1er projet de la Maison de la Mutualité avenue Jean Jaurès (revue municipale février 1981)
Elle est promue ‘’Organisme de progrès social indispensable dans la Cité Moderne’’. L’ouverture, dans des locaux adaptés pour l’époque, eut lieu le 1er octobre.
Photo de la bibliothèque
La salle de lecture s’installa dans l’aile droite, au rez-de-chaussée et à l’entresol anciennement occupé par la Bourse du travail.
Photo de la salle de lecture
Le 29 novembre 1934, la bibliothèque enfantine ‘’L’Heure Joyeuse’’ prit ses quartiers au 1er étage de l’aile gauche.
Le jour de l’inauguration (Photo Archives municipales)
De 1935 à 1960, la ‘’Société des amis de la bibliothèque’’ finance l’acquisition de nombreux ouvrages qui donnent consistance au fond littéraire belfortain.
Livret édité en 1937 par la Société des Amis de la Bibliothèque Municipale de Belfort (Archives municipales)
En 1966, la bibliothèque disposait de près de 77000 ouvrages et périodiques. L’agrandissement volumétrique du fond provoque une exiguïté des locaux et à nouveau, il fut nécessaire d’envisager un nouveau déménagement.
Monsieur Henri Baradel, le conservateur de la bibliothèque, fit de nombreuses démarches au près des municipalités pour obtenir des lieux plus adaptés et plus grands pour permettre à la bibliothèque municipale… de respirer et afin d’améliorer l’accueil des lecteurs.
Henri Baradel
Deux hypothèses furent comparées, transfert dans l’ancien hôpital militaire (proche du lieu d’origine du fond, le Couvent des Capucins) ou construire un bâtiment spécifique et adapté au besoin d’une bibliothèque moderne.
Carte postale de l’ex Hôpital Militaire construit en 1914 actuel Maison des Arts (vue depuis le square du Souvenir)
Il fallut attendre 1972, pour que la décision soit prise de prévoir un projet de construction d’un bâtiment dédié dans le cadre de la rénovation du centre ville. Seulement la cession des terrains militaires n’aboutit qu’en 1974-1975.
Lors du conseil municipal du 17 février 1977, celui-ci approuva l’avant projet de sa construction. Mais ce fut le nouveau conseil municipal, élu en mars 1977, qui acta le projet définitif de la construction de la future bibliothèque municipale le 13 janvier 1978.
La bibliothèque de la Maison du Peuple ferma ses portes le 15 septembre 1980 pour permettre le déménagement du fond vers son nouveau lieu de lumière après avoir vécu un peu plus de 40 ans dans la pénombre ! Une tâche importante dans le cadre du transfert, fût le classement informatique de 40000 livres. L’ouverture de la nouvelle bibliothèque était initialement prévu en tout début de janvier… sevrant ainsi les lecteurs de leur drogue littéraire. Seule la salle de lecture permettait de se faire quelques shoots compensatoires, le déménagement demandant moins de temps.
NA : Personnellement, j’ai découvert la bibliothèque municipale au début des années 1970 où œuvraient Messieurs Baradel, Battaillard, Léandre… et quelques années plus tard, si ma mémoire ne me fait pas défaut, j’ai eu le plaisir de voir l’arrivée d’Agathe Bischoff en 1979 !
Bibliothèque municipale (1981-2014)
Le bâtiment conçu par l’architecte Jean-François Susini, avec les conseils éclairés d’Henri Baradel, fut construit entre 1977 et 1980, et implanté dans le tout nouveau quartier Gérard créé sur l’ancien emplacement de la caserne du même nom.
Dessin en 1ère page de la revue municipale de Belfort de septembre 1980
Elle abrita à l’origine le 11ème régiment d’Hussard en 1888; mais au fil du temps, d’autres régiments s’installèrent dans cette caserne.
Photo en 1956 sur les casernes Bougenel et Gérard, les flèches jaunes signalant l’emplacement de la future bibliothèque.
Les derniers furent ceux du CM 54 (Centre de Mobilisation n°54) et du SEPR (Service d'Entraînement Préparatoire et des Réserves de l’armée de l’Air) qui furent les deux derniers régiments se partageant les locaux avant leur démolition en 1972.
Photo en 2007 du quartier Bougenel et des 4 AS, les flèches jaunes signalant le bâtiment de la bibliothèque.
Au début de l’année 1981, la bibliothèque municipale migra dans ses nouveaux locaux du nouveau quartier des 4 AS.
La bibliothèque à l’ouverture (Photo Revue municipale avril 1981)
Conçue et réalisée pour cette activité, la nouvelle bibliothèque pouvait s’en enorgueillir avec une surface de 2750 m²; presque le triple de la Maison du Peuple !
Tout d’abord elle possédait un hall d’accueil de 100 m² permettant d’accueillir des expositions et animations, une salle polyvalente pour organiser des conférents, des débats, des projections…
Hall d’entrée très lumineux (Photo Revue municipale Juin 1981)
Le reste du rez-de-chaussée accueillait les espaces où se dressaient les étagères avec les livres classés et rangés par thématique et une vaste salle de lecture.de 141 m².
Lieux de choix des livres et salle de lecture (Photos Revue municipale Juin 1981)
Au 1er étage, la bibliothèque des enfants et celle de la bande dessinée partageaient un vaste espace de 530 m². Le 2ème étage était dédié au personnel pour effectuer les différentes tâches non visible par les lecteurs mais combien importantes pour le bon fonctionnement et l’attractivité de la bibliothèque.
Salle de la bibliothèque des enfants (Photo Le Pays)
Au sous-sol, le magasin permettait de stocker des dizaines de milliers de livres.
La bibliothèque fut inaugurée le 28 avril 1981 avec une forte représentation du conseil municipal dont le maire Emile Géhant, Jean-Pierre Chevènement, Michel Marchand…, avec la présence de l’ancien maire Jean-Noël Bailly, du conservateur de la bibliothèque municipale Henri Baradel, d’enseignants… mais aussi la présence du consul de Suisse à Mulhouse, M. Voegeli invité pour inaugurer l’exposition réalisée sur le romancier et homme politique, le franco-suisse Benjamin Constant (1867-1830).
Inauguration, au centre M. Voegeli et Emile Géhant à droite (Photo Le Pays)
Le 29 avril, la bibliothèque enfin ouverte pouvait recevoir ses lecteurs sevrés depuis quelque mois…
En octobre 1982, une grande nouveauté viendra intégrer ce lieu dédié à la littérature, la création d’une discothèque de prêt pourvu d’un fond discographique bien fourni tout genre de musique confondue et la possibilité d’écouter un disque sur l’une des sept platines mises à disposition. Elle ouvrira le 21 juin 1983, pour la fête de la musique. Un petit auditorium fut installé à côté de la discothèque.
La bibliothèque avec la fontaine au début des années 1990
La nouvelle bibliothèque a conquis ses lecteurs qui viennent de plus en plus nombreux au fil des ans et son fond ne fait que croître au fil des ans; en 1995, il ne comprend pas moins de 280000 livres et magazines. Son attractivité n’est point que livre et musique, elle est aussi un lieu où régulièrement le public peut voir de très belles expositions sur des thématiques très variées.
Agathe Bischoff-Moralès, la directrice de la BM (Photo Revue municipale mai 1995)
En 2005, il fut décidé de rénover la bibliothèque après un quart de bons et loyaux services… Ce fut le cabinet de l’architecte Antoine Weygand, spécialisé justement dans la rénovation des bibliothèques et médiathèques, qui fut chargé du projet en début 2006.
Projet de l’architecte Weygand (Photo Revue municipale mars 2006)
Les innovations sont tant structurelles des lieux avec la création d’un puits de lumière au centre, l’ajout d’une verrière côté entrée principale que organisationnelles avec la création d’un point d’accueil de prêt unique pour permettre aux lecteurs de s’approprier les lieux avec plus de liberté. Pour poursuivre dans la transparence, le système informatique fut lui aussi updater pour permettre le partage de l’information. Ainsi les lecteurs avaient accès au fond, ils pouvaient réserver leurs livres via internet pendant les travaux.
Projet, la façade principale (Photo Revue municipale mars 2006)
Après sa cure de jouvence, la réouverture eut lieu le 29 septembre 2007 après plus d’un an de travaux. Dans la nouvelle configuration, la bibliothèque n’est plus compartimentée ou presque, elle est unifiée avec des espaces à thèmes.
L’intérieur lumineux de la bibliothèque (Photo Revue municipale d’octobre 2007)
Bibliothèque Léon Deubel (2014)
Dans le cadre de l’année commémorative du poète Léon Deubel, la municipalité a entériné le projet de donner son nom à la bibliothèque municipale de la Cité du Lion. Un juste retour des choses car la bibliothèque détient un fond sur le poète qui a servit pour l’exposition à la Tour 46.
L’inauguration s’est déroulée le 15 mars 2014 en présence des élus dont le maire Etienne Butzbach. Après la levée du voile tricolore sur la façade pour découvrir la sérigraphie honorant la bibliothèque du nom de Léon Deubel,
un hommage a été rendu au poète et de ses poèmes ont été déclamés.
Seule, au bord du grand ciel, tremble une étoile d’or
Et la lune qui fait la page douce et mièvre
Se plait sur ton poème où tout s’en dort…
Léon Deubel se dévoile avec quelques vers extraits du poème Verlaine (Photos BF)
Il est de bon aloi de terminer ce billet par quelques autres vers de notre poète… je vous en propose la découverte via son poème Dédicace :
Puisque je t'ai laissée aux sanglots de l'automne.
Puisque tu vis dans l'ombre où la douleur pardonne,
Laisse chanter pour toi ces vers qui te ressemblent.
En eux tu trouveras, plus grave sous ses voiles,
Ta voix qui m'appela comme un rayon d'étoile,
Et les parfums subtils de ta présence y tremblent.
Aime-les : la douceur de ton regard les frôle,
Ton âme, qui s'y penche, a la grâce des saules :
Nymphe de l'eau qui dort en leurs profonds miroirs.
Ta chevelure en eux s'écoule comme un fleuve.
Et, de tes chères mains qu'ont jointes les épreuves,
J'ai voulu les fleurir comme des reposoirs.
Le Passé leur donna l'argenture des trembles.
Laisse chanter pour toi ces vers qui te ressemblent,
Où mon cœur adora sa lointaine madone.
Lis-les en revivant les heures d'Autrefois,
Et qu'une larme encor vienne altérer ta voix,
Puisque tu vis dans l'ombre où la douleur pardonne.
Références : Wikipédia, Revues municipales, Livret de la Sociétés des Amis de la Bibliothèques Municipale, Sites Web
JM
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