Fontaines au faubourg de France de Belfort, l'historique (1ère partie)

Dans le faubourg de France de Belfort, avant l'implantation en 1987 de la Fontaine de Rougemont* à l'intersection avec le Passage de France, il exista au 19^e siècle, deux fontaines, une à chaque extrémité du faubourg.

Carte postale Belfort Fontaine de Rougemont (coll. JM)

*Fontaine de Rougemont : Cette fontaine fit couler plus d'encre que d'eau ! À découvrir pourquoi dans l'article qui lui est consacré, en fin du texte, un lien permet d’y accéder.

Le sujet ayant demandé un important développement lié à des recherches pas évidentes, j'ai découpé l'article en trois parties.

La première partie traite de l'historique de ces fontaines, principalement celle située au nord qui avait un attrait particulier. Celle du sud est fort peu documentée et absente de visuel, la 2^e jambe de mes articles…

Les fontaines du faubourg de France

D'après le livre "Histoire pittoresque & anecdotique sur Belfort & ses environs", édité en 1855, par l'historien local Auguste Corret*, le faubourg de France possédait deux fontaines, construites en 1825.

La première était située à l'intersection des faubourgs de Lyon et de Paris, la seconde à l'entrée du côté de la place de la Bascule (la place Corbis actuelle).

Un plan de 1860 permet de visualiser les deux équipements.

Plan 1860 avec les deux emplacements des fontaines (réal. BF)

*Auguste Corret : Militaire et historien (1795-1866), engagé en 1811, effectua les campagnes d'Espagne, de France et de Belgique. Il s'installa ensuite à Belfort où il fut caissier des fortifications. Il se maria avec une belfortaine. Il se tourna vers la littérature. Il devint un historien du Territoire de Belfort. Ce fut le livre cité qui fit sa réputation.

La fontaine sud du faubourg de France

Située entre les jonctions des routes de Paris et de Lyon, donc en partie sud du faubourg de France, la fontaine sud, décrite par l'historien Auguste Corret : "Elle se compose d'un bassin rond en pierre de taille dure, qui sert d'abreuvoir, et, elle est ornée d'une colonne tronquée, surmontée d'une pomme de pin."  

Elle devait ressembler à ce modèle hormis qu'elle ne devait pas posséder un mascaron...

Mais un seul tuyau déversait l'eau en abondance.

La fontaine nord du faubourg de France

Cette fontaine à l'entrée nord du faubourg, Auguste Corret en fit la description suivante "La seconde fontaine au bout de la place du grand faubourg. Son vaste bassin octogone, servant d'abreuvoir…"

Elle a certainement remplacé la fontaine, construite en 1779, qui était située devant le Relais de poste qui devint l'Hôtel de l'Ancienne Poste.

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder à l'article consacré à l'Hôtel de l'Ancienne Poste.

Il compléta sa description par "Sur la colonne carrée, placée au centre du bassin, s'élève une statue de femme en pierre, étroitement couverte de vêtements collants."

Heureusement, de la fontaine existe un dessin réalisé à la plume, par Mme D. Guenat, à partir du descriptif d'Auguste Corret. Il est présent dans l'article "Jadis, place du Grand Faubourg, trônait la Statue de la Savoureuse" paru dans le magazine Horizon de la Chambre de commerce, en 1984, consacré aux fontaines de la ville.

Dessin de Mme D. Guenat (Revue Horizon, doc. BF)

Le bassin était "alimenté par des goulots qui sortent de deux mascarons représentant des têtes de lion."

Mascarons des fontaines du square du Souvenir (photo JM)

NA : Le dessin me fait penser à la Petite fontaine présente (ci-dessous) à la vieille ville qui elle est sans statue.

Carte postale Belfort La petite fontaine (coll. JM)

Par contre, les façades octogonales du bassin semblaient plus travaillées que celle-ci !

Un autre historien local, Henri Bardy, évoque cette présence dans quelques lignes dans son livre "Mon vieux Belfort" édité en 1897.

*Henri Bardy : Né à Belfort en 1829, il fit ses études de pharmacien à Paris puis à Strasbourg. Il s'installa en 1856 à Saint-Dié (Vosges) où il s'impliqua au quotidien dans les activités sanitaires et agricoles entre autres. Il effectua des études historiques locales et s'adonna à la météorologie. Il fonda en 1875, la Société philomathique vosgienne. 

On retrouve ses travaux historiques sur les Vosges, l'Alsace, sa ville natale… dans de nombreuses revues. Il décéda en 1909 à Faulx, commune de Meurthe-et-Moselle.

Dans cet article, il me semble qu'il s'appuie grandement sur le texte d'Auguste Corret.

NA : Un article plus complet existerait dans une autre de ses publications, mais mes recherches furent vaines pour l'identifier ! Elle est certainement possédée par les Archives départementales du Territoire de Belfort.

Carte postale Belfort Une autre fontaine de forme octogone (coll. JM) 

L'emprise de la fontaine nord, va conditionner l'implantation des deux futurs immeubles sud* de l'entrée du faubourg dont le non alignement avec les autres du faubourg de France.

*Deux immeubles sud : Actuellement, les immeubles LCL (Le Crédit Lyonnais) et Armant Thierry Femme.

La statue de la fontaine

Si Auguste Corret ne cite pas le nom du sculpteur, l'information nous est donnée par Henri Bardy "la fontaine située à gauche du faubourg, à quelques pas de l'hôtel de l'ancienne poste était surmontée d'une statue allégorique. C'était celle de la Savoureuse, œuvre d'un sculpteur de Nancy nommé Glorieux."

NA : Ces descriptions sont présentes dans un article, que je présenterai un peu plus loin, dont je n'ai pas trouvé le texte d'origine, n'ayant pu identifier dans quel livre d'Henri Bardy, il est issu !

Donc la statue féminine fut réalisée par le sculpteur nancéien d'adoption, Jean-Baptiste Glorieux, sous la forme d'une allégorie représentant "La Savoureuse", en "hommage" à la rivière proche, traversant Belfort.

Description détaillée de la statue

L'historien local, Auguste Corret, en fait la description suivante :

"Sur la colonne carrée, placée au centre du bassin, s'élève une statue de femme en pierre, étroitement couverte de vêtements collants. Nous l'avions prise d'abord pour la statue de la Pudeur, tant ses charmes sont voilés. L'imagination fait de vains efforts pour traverser cette robe de gaze afin d'en découvrir ou d'en deviner les beautés cachées."

Le haut de la statue (Revue Horizon, doc. BF)

"Le sculpteur s'inspirant d'un vers de Boileau personnifiant le Rhin : Appuyé d'une main sur son urne penchant, a eu la précaution de faire poser nonchalamment un des bras de cette divinité sur une urne en forme de cruche, d'où s'échappe un léger filet d'eau."

Cette description est complétée par Henri Bardy "Cet artiste avait, parait-il, la spécialité des statues des naïades pour fontaines publiques. Toutes paraissaient sortir du même moule et la Savoureuse de Belfort ressemblait comme deux gouttes d'eau à la Meurthe qui à Saint-Dié ornait si joliment la place des Vosges."

Carte postale Belfort Le pont sur la Savoureuse en 1855 (coll. JM)

Il compléta son propos par "Cette dernière statue était également due au ciseau de Glorieux, et datait de même année, c’est-à-dire de 1825."

Si la statue de "La Savoureuse" ressemblait à celle de Saint-Dié, du moins sa silhouette, elle était plus habillée ! Car "La Meurthe" n'était vêtue que d'un filet ! 

Statue "La Meurthe" à Saint-Dié (photo coll. Privée)

À l'époque, cette statue fit même scandale !

A l'inverse, la statue "La Savoureuse" décrite par Alexandre Corret était beaucoup plus prude, vu son commentaire "étroitement couverte de vêtements collants. Nous l'avions prise d'abord pour la statue de la Pudeur, tant ses charmes sont voilés."

Autre article

Il existe un quatrième article sur cette fontaine, écrit par Jean Mansotte en 1972, archiviste aux Archives du département (90), paru dans la Revue municipale belfortaine, "La grande fontaine du faubourg de France". Par contre, il donne une autre date pour la construction des fontaines "La municipalité belfortaine par un louable souci d'embellissement, fit édifier en 1838 deux fontaines monumentales."

Patatras ! Un dilemme, 1825 ou 1838 ?

Il apporte cette précision "Les moyens de la ville et l'absence d'artistes de talent ne permirent de choisir, dans le catalogue de la mythologie aquatique en usage pour ornementer les fontaines qu'une naïade, dominant, en son centre une cuve octogonale."

Propos "dur" vis-à-vis du statuaire originaire de Delle.

Carte postale Delle La fontaine rue du général Scherrer (coll. privée)

Il revient sur les propos des deux historiens locaux, dont la description détaillée d'Auguste Corret de la statue. Il continue sa présentation via les propos d'Henri Bardy mais, qui ne sont pas présent dans son article dans le livre "Le Vieux Belfort".

"À l'entrée du faubourg de France s'élève une fontaine surmontée d'une forte médiocre statue qui représente la nymphe de la Savoureuse… Au-dessus de la tête de cette naïade si mythologique, quelque méchant chaudronnier de l'endroit a placé un drapeau tricolore en fer blanc servant de girouette. En tournant sur la hampe de fer, il grince et vire de manière à écorcher les oreilles du passant…"

Jean-Baptiste Glorieux

Né à Delle en 1777, Jean-Baptiste Glorieux marcha dans les traces taillées par son père, sculpteur, comme son frère ainé, Bernard. Il débuta avec son père, avec lequel, il réalisa le maitre-autel et les deux autels latéraux de l'église Saint-Etienne de Cernay.

Il partit ensuit à Nancy puis à Paris pour développer son art où il réalisa de nombreuses sculptures en différentes matières, pierre, marbre…

Ce fut à Nancy qu'il devint un spécialiste de naïades pour les fontaines publiques.

Comme signalé précédemment, Saint-Dié possède une statue ressemblante à la "Savoureuse", cette allégorie intitulée "La Meurthe", nom de la rivière traversant la ville. 

Carte postale Saint-Dié La Fontaine de la Meurthe (coll. privée)

Pas très loin de Belfort, il réalisa aussi trois statues pour le fronton de l'église paroissiale Saint-Martin à Masevaux (Haut-Rhin).

Les 3 statues au fronton de l'église (photo Wiki)

Elles représentent les vertus théologales, c'est-à-dire la foi, l'espérance et la charité.

Il revint à Belfort en 1930. Il restaura, entre autres, l'abat-voix* de la chaire de l'église Saint-Christophe.

*Abat-voix : Partie supérieure de la chaire, sous forme de dôme. Il permet de renvoyer la voix du prédicateur vers l'assistance.

Carte postale Belfort La chaire de la basilique Saint-Christophe (coll. JM)

Jean-Baptiste Glorieux décéda en 1854.

Date de construction des fontaines, 1825 ou 1838 ?

Revenons au début de l'histoire avec la construction des fontaines en 1825, pour Auguste Corret et Henri Bardy, ou 1838 pour Jean Mansotte !

Pour départager les deux dates, seules les délibérations des conseils municipaux peuvent nous apporter des informations, si présence du sujet il y a ? Confiné, ne pouvant pas accéder à ces documents, j'ai été aimablement et efficacement épaulé par la responsable des archives municipales de Belfort.

Que disent les délibérations de 1825 ?

Aucune délibération de 1825 ne cite les fontaines du faubourg ! Pourquoi ? Date fausse ou sujet non abordé, ce qui était peu probable donc il fallut effectuer de la spéléologie dans les délibérations autour de cette date...

Par contre dans les comptes de 1826, il fut engagé un budget pour effectuer des réparations sur les fontaines. 

Extrait des comptes de l'année 1826 (doc. AMB)

Les travaux consistèrent à remplacer une grande quantité de tuyaux par des corps neufs en chêne, réalisés en août et septembre.

Extrait des comptes de l'année 1826 (doc. AMB)

Ces remplacements de tuyauterie prouvent que les fontaines existaient en 1826 depuis quelques années, et certainement bien avant 1825 ! Mais quand ? 

Carte postale Belfort Hôtel de Ville en 1828 (coll. JM)

Seule la poursuite des recherches dans les délibérations des années précédentes pouvaient nous donner la réponse. Il fallut à la responsable de revenir assez loin dans le passé du début du 19^e siècle pour trouver de nouveaux éléments exploitables, et exploités.

Les délibérations de 1809 !

Dans la délibération du 4 septembre 1809, il fut abordé la problématique de l'accès limité aux fontaines car elles étaient accolées à des palissades ou murs, ne permettant qu'un accès frontal voir latéral !

Pour l'augmenter l'accessibilité à la fontaine nord qui était la plus contrainte, il fut nécessaire d'acquérir une partie de terrain appartenant à deux propriétaires; le premier, le conseiller municipal Pierre Gasner fit don d'un morceau de son jardin et le second, Jean-Baptiste Costillé fut dédommagé de la somme de 60 francs pour permettre de déplacer la colonne de l'autre côté du bassin. 

Extrait de la délibération du 4 septembre 1809 (doc. AMB)

La fontaine était de forme rectangulaire avec à sa tête la colonne d'arrivée d'eau; elle était encastrée sur deux côtés par deux limites de propriété dont au moins une palissade ! De plus la colonne, positionnée côté nord, fermait un 3^e côté !

Un petit croquis valant mieux qu'une longue explication…

Croquis de la fontaine nord en 1804 puis en 1809 (réal. JM)

Pour la fontaine sud, il fut décidé de la déplacer pour la somme de 225 francs car elle aussi était peu accessible pour les animaux !

 

Extrait de la délibération du 4 septembre 1809 (doc. AMB)

Cette fontaine sud, était de la forme de la précédente avec un bassin et sa colonne en extrémité; un de ces grands côtés était contre un mur.

Croquis de la fontaine sud en 1804 puis en 1809 (réal. JM)

Avec les informations provenant de cette délibération, les fontaines furent implantées un peu avant cette date, car capitalisant sur un retour d'expérience par leur utilisation !

Les délibération de 1806 !

Dans la délibération du 26 février 1806, il est écrit "Quoiqu'il existe actuellement deux sources pour abreuver les fontaines de la ville de ces faubourgs. Ces dernières étant nouvellement établies, il est à présumer que pendant bien des années, elles n'auront pas besoin de réparation, ni d'entretien…"

Extrait de la délibération du 26 février 1806 (doc. AMB)

À la lecture de cette délibération, les deux fontaines étaient donc construites et présentes en début 1806 !

Au regard de la date, je pense qu'elles furent construites en 1805. Ce qui pourrait expliquer la date de 1825, donnée par Auguste Corret et reprise par Henri Bardy,  le "0" serait devenu "2"  !

NA : Un aparté, moi, je connaissais "1 = 0", "2 = ∞ (infini)" ! Désolé, seuls les initiés vont comprendre cet adage "Lacazien".

Carte postale Belfort La place d'Armes & Porte de France en 1828 (coll. JM)

Donc les deux fontaines du faubourg de France n'ont été construites ni en 1825 ni en 1838, mais en 1805 (ou 1806).

Une somme de 1000 francs fut votée "pour rendre les nouvelles fontaines plus commodes et les décorer convenablement"

 

Extrait de la délibération du 26 février 1806 (doc. AMB)

Les délibérations de 1805 !

Dans les délibérations de 1805, ce seul point fut abordé sur ce sujet dans celle du 25 floréal an 13 (15 mai 1805), la demande de "Madame Burger servante à obtenir la permission de tirer pour sa maison un filet d'eau des corps de fontaine, à l'établissement desquelles on travaille."

Extrait de la délibération du 15 mai 1805 (doc. AMB)

Quels enseignements peut-on tirer de cette délibération ? Les fontaines sont-elles en cours de construction ? Où est-on sur leur alimentation en eau ?

Par contre, la réponse fut négative car "le Conseil considère que d'après l'examen de la supputation de la commission du Conseil, la source Nubaye ne fournira pas plus d'eau nécessaire pour alimenter les trois fontaines du faubourg, en sorte qu'on ne pourra rien détourner sans nuire à leur service…"

Extrait de la délibération du 15 mai 1805 (doc. AMB)

Avec cette délibération, on apprend que les fontaines furent au nombre de… trois !

NA : Cette historique déjà difficile à "détricoter" avec deux fontaines, je mets la troisième sous le tapis, pour éviter de me noyer !

Que disent les délibérations de 1804 ?

En 1804, quatre délibérations abordèrent le sujet des fontaines !

La délibération du 15 pluviôse an 12

L'ordre du jour de cette délibération était un focus sur les dépenses extraordinaires à prévoir pour l'an 13* (du 23 septembre 1804 au 22 septembre 1805).

L'an 13 : Entre le 22 septembre 1793 (1^er vendémiaire an 2) et 31 décembre 1805 (10 nivôses an 14), la France applique le calendrier républicain, ou calendrier révolutionnaire, imposé lors de la Révolution française. Il entra en vigueur le 6 octobre 1793 (15 vendémiaires an 2), mais débuta le 22 septembre 1792 (1^er vendémiaire an 1).

Carte postale Belfort Église Saint-Christophe en 1828 (coll. JM)

Le 15 pluviôse an 12 (15 février 1804), le maire, Jean-Claude Gérard, présenta aux conseillers municipaux les différentes lignes budgétaires prévues au budget extraordinaire.

Une de ces lignes fut attribuée à la construction de fontaines dans le faubourg de France. "Le conseil, prenant en considération les observations du maire, notamment pour la construction d’une fontaine au faubourg, quoique la commission nommée pour vérifier la possibilité de cet établissement n’ait pas encore pu faire les opérations nécessaires… une opération préliminaire a persuadé l’inspecteur des bâtiments et fontaines que la source trouvée au Haie, dernière pouvait fournir de l’eau au faubourg…"

Extrait de la délibération du 15 février 1804 (doc. AMB)

La ligne budgétaire s'élevait à 7397 francs.

Vu l'avancement du projet à cette date, le pré budget établi par l’inspecteur des bâtiments et fontaines, l'idée d'installer deux fontaines dans le faubourg de France, fut probablement élaboré avant 1804.

La délibération du 8 thermidor an 12

Il fut présenté au conseil municipal le 8 thermidor an 12 (27 juillet 1804), le rapport de la commission en charge du projet de nouvelles fontaines à établir au faubourg de France. Il examina aussi la pétition qui contestait le besoin d'une fontaine (la nord) et l'offre de Monsieur Gasner de fournir un terrain contre la maison Costillé pour la fontaine nord. 

Extrait de la délibération du 27 juillet 1804 (doc. AMB)

Les propriétaires des terrains où passeront les conduites avaient donné leur accord par écrit. Par contre deux d'entre-deux, Antoine Keller et M. Brassigny, ce dernier étant le propriétaire du terrain où se situait la source pour alimenter les fontaines, distant de 100 mètres de la Savoureuse. Le conseil décida d'avoir recours de l’autorité supérieure (le sous-préfet) pour vaincre cet obstacle. 

Carte postale Belfort Place d'Armes, la halle au blé en 1828 (coll. JM)

En conséquence, le conseil invita le Maire à présenter à Monsieur le préfet une pétition tendant à être autorisé à établir deux fontaines dans le faubourg de France, l’une à la jonction des routes de Paris et de Besançon, l’autre dans la rue des ancêtres, au nord du faubourg.

Extrait de la délibération du 27 juillet 1804 (doc. AMB)

Le projet était lancé dans sa phase finale, avec la phase de validation demandée à l'état avant construction.

La délibération du 12 fructidor an 12

Lors du conseil municipal du 12 fructidor an 12 (30 août 1804), le maire, Jean-Claude Gérard, informa les conseillers municipaux, sur la démarche effectuée auprès du sous-préfet Antoine Xavier Mengaud, pour demander l'autorisation de la construction de 2 fontaines, au sud et au nord du faubourg de France; il fit part aussi des remarques eues en retour. Sans entrer trop dans les détails, entre autres, une pétition avait été initiée contre leurs constructions !

Extrait de la délibération du 30 août 1804 (doc. AMB)

Mais pour la municipalité, il y avait urgence pour alimenter le secteur en eau pour les habitants et le bétail.

Le devis des fontaines s'élevait à 7397 francs.

La délibération du 29 fructose an 12

L'adjoint au maire, Laurent Guy, effectua un compte-rendu sur ce projet le 29 fructose an 12 (16 septembre 1804), suite au procès-verbal effectué par la Commission d'étude qui s'était rendue, 3 jours plus tôt, sur place avec le capitaine Dinot, le chef de l'armée du génie de la Place, pour s'assurer que la source Duhay (du Haie) située dans le pré du sieur Brassigny, ne sera pas préjudiciable aux fontaines de l'armée, utilisant une autre source.

Extrait de la délibération du 16 septembre 1804 (doc. AMB)

Le sous-préfet fut informé.

Donc à cette date du 16 septembre 1804, les fontaines ne sont pas construites. Pour ma part, au regard des informations récoltées, je pense qu'elles furent construites en 1805.

Sur un plan de 1790-1820, deux points sont présents aux deux extrémités du faubourg, donc dès ce plan les deux fontaines furent représentées ! 

Plan 1790-1820 avec les deux emplacements (réal. BF)

Il permet aussi de constater l'absence d'immeuble du côté sud de l'entrée du faubourg de France côté nord.

La forme des fontaines ?

Suite à ces recherches et aux informations récoltées, un point choc ! Les formes des fontaines construites en 1805 ne sont pas du tout identiques aux formes des fontaines décrites par les deux écrits des historiens locaux !

Une autre énigme à traiter !

Alors pourquoi la date de 1838 ?

On a vu que dans son article, Jean Mansotte écrivit "La municipalité belfortaine par un louable souci d'embellissement, fit édifier en 1838 deux fontaines monumentales."

Je ne peux pas évacuer cette information sans comprendre pourquoi cette affirmation, surtout avec le constat fait sur la forme des fontaines !

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder à la 2e partie de l'article.

Épilogue

La connaissance de l'existence de cette fontaine avec sa statue dans le faubourg de France m'étant relativement récente, quelques années, il m'a semblé intéressant de faire partager son histoire.

Par contre, je ne savais pas que j'allais devoir faire effectuer de la spéléologie dans les délibérations des conseils municipaux du 19^e siècle et qu'elles remettraient en cause la date "gravée" dans la littérature de nos historiens locaux !

JM

Mes remerciements à Fanny Girardot, directrice des Archives municipales de Belfort pour son aide précieuse dans le dépouillement des délibérations.

Lien pour accéder aux articles cités

La Fontaine de Rougemont : Cliquer ici

L'Hôtel de l'Ancienne Poste : Cliquer ici

Les fontaines du faubourg de France (2^e partie) : Cliquer ici

Références : Livre Histoire pittoresque & anecdotique sur Belfort & ses environs par Auguste Corret (coll. BF), Livre Mon Vieux Belfort par Henry Bardy, Articles de la revue Horizon de la Chambre de commerce et de la revue municipale de Belfort, Les délibérations du conseil municipal de Belfort (Archives municipales, AMB), Wikipédia…

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