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LE CARTOPHILION
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3 octobre 2025

Quid de la date de ce cliché édité en carte photo, d’un rassemblement devant la gare de Belfort (deuil) ?

Fin 2024, j’ai acquis cette carte photo dont le cliché présente un rassemblement de personnes devant la gare de Belfort, réunissant une majorité de militaires et apparemment deux femmes de dos, en tenue de deuil !

Carte photo Belfort Gare Quid de ce rassemblement ? (coll. JM)

 

À quelle occasion fut photographié ce cliché ?

 

NA : En fin de texte, un lien permet d’accéder aux articles consacrés aux cartes photos et postales datées.

 

L’identification de cette carte photo

 

Lors d’un échange avec le directeur adjoint des Archives départementales du Territoire de Belfort, Jean-Christophe Tamborini, sur les cartes postales en vente sur un site spécialisé, je lui ai parlé de cette carte photo que je cherchai à dater.

 

Elle lui disait quelque chose… elle ressemblait à un document qui lui semblait être présent dans leur fond.

 

Après une petite recherche, il a retrouvé rapidement un autre document de cet évènement.

Carte photo Belfort Autre cliché (coll. AD90)

 

Ce cliché est très similaire au premier, le photographe ayant conservé le même angle de vue.

 

Cette carte photo est enregistrée avec le descriptif suivant "Belfort, avenue de la gare, départ du corps du capitaine de la chefferie du Génie Pion décédé le 3 février d'un accident de cheval." et une date "jeudi 05 février 1914".

 

Grâce aux informations fournies, il ne restait plus qu’à consulter la presse pour en savoir un peu plus…

 

Que dit la presse ?

 

Dans le journal L’Alsace du mercredi 4 février 1914, il est rapporté que la veille, vers 11 heures du matin, le capitaine Emmanuel Pion de la Chefferie du Génie, pratiquait de l’équitation au manège de l’Arsenal, quand lors d’un saut d’obstacle, il fut projeté devant son cheval; se relevant, il reçut un coup de patte de l'équidé suite à une ruade, elle vint lui fracasser la nuque.

Extrait du journal L’Alsace (col. AD90)

 

Malgré les soins portés, l’officier décéda à l’hôpital militaire à 13h45.

 

Dans le journal La Frontière du même jour, l’accident mortel fut aussi rapporté.

 

Âgé de 34 ans, le capitaine Emmanuel Pion laissait une veuve éplorée, le couple était mariés que depuis 6 mois.

 

Un avis de décès parut dans ce journal L’Alsace, le lendemain.

L’avis de décès dans le journal L’Alsace (doc. AD90)

 

"Belfort, avenue de la gare, départ du corps du capitaine de la chefferie du Génie Pion décédé le 3 février d'un accident de cheval." et une date "jeudi 05 février 1914".

 

Le capitaine Emmanuel Pion

 

L’officier Emmanuel Pion était né le 13 décembre 1880, à Saint-Julien-en-Jarrez (Loire), commune proche de Saint-Chamond.

Carte postale Saint-Julien-en-Jarrez (coll. privée)

 

Il s’était marié le 29 juillet 1913, avec Marie Truchot à Denicé commune du Rhône, située à l’ouest de Villefranche-sur-Saône.

Carte postale Denicé Révision des chevaux devant la mairie (coll. privée)

 

Les jeunes mariés habitaient à Belfort.

 

NA : Un peu frustré de ne pas pouvoir dresser une bio de l’officier plus complète que les éléments trouvés dans l’article du journal La Frontière, j’ai fait appel à mon ami Philippe pour sa capacité à trouver des informations sur les profondeurs d’internet. Bien m’en pris, car il m’apporta des éléments complémentaires de grand intérêt et même une photo du capitaine.

 

En 1900, Emmanuel Pion poursuivant sa formation, entra à l’École Polytechnique, intégré via la liste supplémentaire suite au concours d’entrée. Il en sortit en 1902, avec le grade de sous-lieutenant.

Emmanuel Pion (photo École polytechnique)

 

Il fut affecté ou choisit, de rejoindre le 3e régiment du génie, stationné à Arras (Pas-de-Calais), à la caserne Schramm.

Carte postale Arras La caserne du Génie Schramm (coll. privée)

 

Il y obtint le grade de lieutenant au 1er octobre 1906 et celui de capitaine par le décret du Président de la République, du 8 novembre 1910. À cette promotion, était associé son affectation à Belfort. Certainement au 4e régiment du Génie caserné au Quartier Vauban.

Carte postale Belfort Quartier Vauban (coll. JM)

 

Il fut classé à l’état-major particulier du génie où il pilotait des opérations de renforcement des fortifications de la Place. Ses derniers temps, il supervisait les travaux effectués au Fort Ordener à Vézelois, après ceux du fort du Mont Bart.

Plan de la situation du fort de Vézelois (doc. FB)

 

Ayant la confiance de ses chefs et apprécié des nombreuses personnes qu’il côtoyait, tant militaires que civiles, il était relativement bien connu à Belfort.

 

Les obsèques du Capitaine Pion

 

Le jeudi 5 février à 10h30, se déroulèrent les obsèques du capitaine Emmanuel Pion à l’église Sainte-Marie, présidés par l’aumônier militaire, dixit le journal La Frontière.

 

NA : Petit problème, il n’existe pas d’église Sainte-Marie à Belfort ! Il y a bien une chapelle dans l’école Sainte-Marie, faubourg des Ancêtres, mais j’ai du mal à envisager, qu’on puisse y dire une messe d’enterrement d’un militaire, en ce lieu.

 

"Après la cérémonie religieuse à l’église Sainte-Marie,
qui fut présidé par l’aumônier militaire…
".

Extrait du journal LA Frontière (doc. AD90)

 

Où était-ce plutôt dans l’église Notre-Dame, faubourg de Montbéliard ? Vue sa proximité avec l’hôpital militaire… je pencherai plus vers cet édifice religieux !

Carte postale Belfort Eglise Notre-Dame (coll. JM)

 

Dans l’avis de décès, il est précisé que la cérémonie était prévue à la chapelle de l’hôpital militaire, puis ensuite le cercueil était emmené à la gare.

 

Petit rebondissement

 

Suite aux recherches de mon ami Philippe, le problème soulevé fut résolu, car il a trouvé un article dans le journal Le Comtois du 6 février, qui corrige le nom de l’église où fut effectué réellement le service religieux

 

"Parti à 10h1/2 de l’hôpital militaire, le cortège s’est rendu à l’église Notre-Dame-des-Anges, où l’abbé Pattiger, aumônier militaire,
procéda au service religieux
.
".

Extrait du journal Le Comtois (doc. Gallica, BNF)

 

Poursuivons…

 

Par ailleurs, un article conséquent rapportant le déroulement de l'hommage rendu au capitaine Emmanuel Pion, parut dans l'édition du 8 février du journal La Frontière. Par contre, rien dans le journal L’Alsace ce qui me surprend, vu l’avis de décès paru dans ce journal !

 

De nombreuses personnalités civiles et militaires participèrent à la levée du corps à l’hôpital militaire et à la cérémonie religieuse dont, le général Claude Thévenet, gouverneur de la place, son adjoint le général Jean Joseph Rouquerol, le préfet Georges Goublet qui avait pris ses fonctions le 1er février, les généraux Louis Curé commandant de la 14e division d’infanterie, Jean Gendron commandant de la 8e Brigade des dragons et Jean-Baptiste Dumas commandant de la 28e Brigade d’infanterie, le président du tribunal Carré de Malberg, les chefs de corps des différents régiments de la Place, le directeur du Génie le colonel XXX Lanty, le commandant du génie du 7e Corps le colonel XXX Auroux, le chef du Génie le lieutenant-colonel XXX Pailla… et de nombreuses personnalités civiles dont Édouard Lévy-Grunwald, plusieurs industriels, artisans et commerçants, Émile Marchegay, (François) Claudon, Émile Blum, Jacques Dreyfus, Thierry Mieg, Ferdinand Scheurer, Eugène Garteiser, Edmond Passard…

 

Les cordons du poêle (drap funéraire) étaient tenus par le commandant XXX de Gissac, les capitaines XXX Gimpel, XXX Thiébault, XXX Mathey et XXX Marchegay.

 

Le deuil était conduit par Joseph Pion, son frère, président de section au tribunal de la Seine et le père de son épouse, Jean-Jacques Truchot, accompagné de son fils.

 

De nombreuses couronnes étaient présentes, offertes par des militaires et des civils, dont celles venant du Fort Lachaux (Lomont, Haute-Saône) et du Fort Ordener (Vézelois, Territoire de Belfort).

 

Après la cérémonie religieuse, le corps fut conduit à la gare. Le cortège fut accompagné, du moins devancé, par la musique du 42e régiment d’infanterie.

Carte postale 42e régiment d’infanterie La musique (coll. JM)

 

Le corps du capitaine devant être conduit à Lyon, puis à Crémieu (Isère) où il devait être inhumé.

 

À la gare

 

Sur le parvis de la gare, le colonel Lanty, directeur du Génie, eut la charge d’effectuer un petit discours centré sur la carrière du militaire et sur ses activités à Belfort, où il avait la charge de faire renforcer des forts de la Place. Il renouvela ses condoléances à son épouse et aux familles.

Carte postale Belfort La gare (coll. JM)

 

Il fut complété par celui du capitaine de génie XXX Gimpel, au nom de ses amis militaires et civils, dont ses camarades du Génie. Il souligna son intelligence, sa loyauté et sa bienveillance. Il revint sur son mariage récent qui laissait une épouse digne malgré la douleur provoquée par cette mort brutale.

Carte photo Belfort Gare Les discours avant le départ (coll. JM)

 

Après cet adieu à Belfort, le corps fut transporté dans le train pour rejoindre sa dernière demeure, accompagné de sa famille. Sa dépouille devait rejoindre le cimetière de la commune de Crémieu (Isère).

 

Quelques informations complémentaires

 

Les clichés furent photographiés à la hauteur du 19 avenue de la gare, aujourd’hui avenue Wilson.

Extrait de la carte photo : Les deux commerces

 

On voit, à droite, la vitrine de la Pâtisserie-Confiserie Jules Lemôle, aujourd’hui la Pâtisserie-Chocolatier Klein. À gauche, c’était le Café de la Gare, devenue la Brasserie de la Gare.

Carte photo Belfort Avenue de la Gare, les deux commerces (coll. JM)

 

Les deux cartes photos furent émises par l’éditeur belfortain Eugène Feugère.

 

Épilogue

 

Cette carte photo fut datée suite à un échange. Elle concerne le départ du corps d’un militaire à la gare de Belfort, accompagnée de sa famille. Le capitaine Emmanuel Pion était décédé tragiquement d’un coup porté par son cheval, faisant suite à sa chute.

 

Une nouvelle carte photo identifiée et datée vient compléter cette Catégorie regroupant les cartes postales ou photos précédemment orphelines.

 

JM

 

Lien pour accéder à l'article cité

 

Catégorie des cartes postales ou photos identifiées : Cliquer ici

 

Références : Journaux La Frontière et L’Alsace (Archives départementales du 90, AD90), journal Le Comtois et journal officiel (site Gallica, BNF), divers autres sites…

 

Infos pratiques  

 

Vous pouvez laisser des commentaires sur cette présentation via le lien "Commentaires" en fin de l'article après la liste des tags.

 

En cliquant sur une photo ou un document, vous pouvez l’agrandir.

 

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  • Le CartophiLion est un journal proposant des articles centrés sur la ville de Belfort et du département, ainsi que d'autres thématiques nationales et internationales (sports, fêtes & traditions...); agrémentés de visuels liés aux collections. A l'origine, il fut imaginé comme outil de communication des CCTB.
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