Les squares de Belfort : L’historique du square Lechten
MAJ le 31 août 2024
Pour ce 3e billet sur l’histoire des squares de Belfort, je vous propose d’entrer dans le square Emile Lechten (ex. square Jean Jaurès). Cette promenade bucolique commencée par la découverte des origines des squares de Belfort, s’est poursuivie par le square du Souvenir, le square Engel...
Square Émile Lechten (photo JM)
Entrons dans ce square situé à l’entrée de l’avenue Jean Jaurès (ex. faubourg des Vosges) et de la rue de Mulhouse.
NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder au Sommaire des articles sur les squares dont ceux cités.
La naissance du square
Ce fut en 1921, sous le mandat du maire Noël Lapostolest que le conseil municipal décida de transformer un terrain acquis en 1911 en jardin public.
Les travaux furent confiés aux services municipaux de la ville. En 1923, le conseil municipal vota un crédit pour clôturer ce jardin public.
Carte postale Vue aérienne vers 1948-52 (coll. BF)
Il fut nommé dans un premier temps "Square du Faubourg des Vosges" puis "Square Grosborne", "Square Deubel", en 1925, il devient "Square Jean-Jaurès" et enfin "Square "Émile Lechten", en 1961, en hommage au premier chef jardinier décédé cette même année.
Son expansion dans les années 1920
De 1923 à 1929, la superficie du square va s’agrandir par l’acquisition d’autres terrains attenants, ceux détenus par les propriétaires Deubel, Grosborne, Dautheville, Huffschmitt et Kern.
Photos aériennes du square en 1924 et en 2007 (coll. BF)
Dès 1923, Émile-François Grosborne cèda à la Mairie sa propriété, cadastrée "La ferme de la Chapelle de Lorette", pour augmenter la superficie acquise précédemment et permettre la réalisation d’un square de belle taille.
Sur la photo ci-dessous datée entre 1889-1892, on aperçoit la propriété d’Émile-François Grosborne.
Photo des lieux entre 1889-1992 (coll. BF)
Sur la photo suivante, datée de 1929-1930, le square commence à prendre forme.
Photo des lieux vers 1929-1930 (coll. BF)
Arrivée en 1926, du monument de l'Age de Pierre
En 1926, fut installé un monument en marbre blanc l’Age de Pierre du sculpteur Horace Daillon*. Cette œuvre, initialement prévue pour le Jardin des Plantes à Paris, fut attribué par l’État au musée de Belfort. A l’époque cette sculpture, représentant une femme nue et blessée, portée par deux hommes nus également, fit scandale et déclencha une vive polémique où les termes de "déshonorant", "scandaleux", "dégradant" et bien d’autres adjectifs critiques furent utilisés à son encontre par la communauté cléricale. Au contraire, la partie adverse républicaine et de milieu artistique soulignant la simplicité et la beauté de l’œuvre du sculpteur.
Horace Daillon (1854-1937) est un sculpteur français. Il a réalisé de nombreuses œuvres de fortes dimensions (Pasteur à Arbois, La prairie à Montpellier, Joie de Famille à Paris…).
Carte postale Statue de L’Age de Pierre en 1926-27 (coll. BF)
Le 14 juillet 1926, le monument est inauguré dans une situation apaisée; la polémique s’étant éteinte. Le parterre entourant la statue sera réalisé à partir de 1929.
Carte postale Statue de L’Age de Pierre dans les années 80 (coll. JM)
1928, nouvel agrandissement avec ajout d'un bassin
En janvier 1928, le square poursuit son agrandissement au nord suite à l’acquisition par la mairie d’une parcelle de terrain, appartenant aux familles Hawel-Démeusy.
Cette même année, fut construit le bassin avec motif de fontainier dont deux sculptures représentant des angelots appelés "Enfants à la vasque" qui diffusent un jet d’eau. À la fin des années 80, ils furent dérobés par des aigrefins.
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Carte postale du bassin avec ses angelots (coll. JM)
Le bassin ne resta pas longtemps orphelin de ses protecteurs, car ils furent retrouvés, lors d’une vente aux enchères.
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Extrait de la carte postale, l'un des angelots
1929, le square avec une touche de féminité
Toujours en 1928, fut implantée une niche-pergola qui abrita la statue "Fin de danse" de Pierre Fournier des Corats*, intégrant le square en mai 1929.
Pierre Fournier des Corats (1883-1953) est un sculpteur français mais pas que, il a réalisé des gravures et des pièces d'orfèvrerie de style art déco.
Cartes postales La pergola avant et après la pose de la statue
(coll. BF)
1929, installation de porte monumentale
En 1928, la maison Huffschmitt située à l’entrée de la rue de Mulhouse est détruite pour laisser la place à une très belle porte en fer forgé, une réalisation du ferronnier belfortain Schick.
Carte postale Maison Huffschmitt vers 1910 (coll. BF)
Carte postale La grille d'entrée du square vers 1960 (coll. BF)
Elle fut installée en 1929. Ce même artisan avait réalisé en 1927, la grille du Square du Souvenir.
NA : En fin de l'article, un lien permet de découvrir le billet sur ce square.
Cartes postales Square (années 1960) Vue sur les bâtiments rue du Maréchal Joffre (coll. BF)
En 1972, la grille d'entrée est déplacée plus au nord, pour permettre la réalisation du carrefour de l'esplanade.
NA : Pas de carte postale en notre possession montrant la grille dans son nouvel emplacement; voir la photo présentée dans le chapitre "Quelques photos prises en 2012".
1929, création d'un jardin botanique
En 1929, la clôture en grillage est installée sur la murette.
Cette même année, l’ancien immeuble Deubel, sis au 18 rue de Mulhouse, fut démoli pour créer un jardin botanique et permettre la construction de serres en lieu et place.
1935, après la danseuse, le poète
En 1935, le conseil municipal décida d’y installer sur un socle de grès rose, la réplique du buste du poète belfortain Léon Deubel*.
*Léon Deubel (1879-1913) est un poète belfortain. Il fut grand ami avec Louis Pergaud. Son ami compositeur Edgard Varèse mis en musique certains de ses sonnets. Léon Deubel est considéré comme l’un des derniers poètes maudits (jeune et incompris). Avant de se suicider, il a pris soin de détruire ses manuscrits et sa correspondance.
Carte Postale Statue Léon Deubel (coll. JM)
Il fut réalisé par le statuaire Philippe Besnard* à partir de l’œuvre du sculpteur japonais Hiroatzu Takata*.
*Philippe Besnard (1885-1971) est un artiste statuaire et sculpteur français. Il réalisa de nombreux bustes et monuments aux morts.
*Hiroatzu Takata (1900-1987) est un sculpteur japonais; il a vécu en France, la moitié de sa vie.
L’original est implanté à Maisons-Alfort depuis 1921, en son hommage, car son corps fut retiré de la Marne le 12 juin 1923. Le poète s’était suicidé suite à sa révocation par l’éducation nationale. En 1967, la statue est déplacée car cachée par les frondaisons d’un hêtre pourpre.
NA : En fin de cet article, un lien permet d'accéder au billet sur ce poète.
Depuis 1929, le square est l’objet d’attentions particulières où l’artistique prend racine grâce à la création de véritables mosaïques florales par un maître-jardinier orfèvre en la nature; cet artiste est Émile Lechten. Chaque année un nouveau décor floral est créé par les jardiniers municipaux sous ses ordres jusqu’en 1961. Ses œuvres éphémères à base de plantes et de fleurs font le plus grand bonheur des promeneurs.
Cette tradition est poursuivie par son successeur Étienne Merloz. Elle est toujours conservée.
Carte postale Massif "Grec" avec la villa "Les lilas"* (coll. JM)
*Villa Les Lilas : Cette habitation fut la résidence de Léon Deubel négociant et oncle du poète jusqu’en 1919. Vendue en 1929 à la mairie, elle recevra l’école de musique en 1930 qui deviendra Conservatoire de Musique agréé par l’état en juillet 1968. En 1999, cette villa devient Musée d'Art moderne où la Donation Maurice Jardot est exposée.
Sous l’initiative d’Étienne Merloz en 1967, l’éclairage du square voit le jour par son illumination via 83 points lumineux installés. A la belle saison, à la nuit tombée, ce lieu devient magique par les feux étincelants se perdant dans la végétation ou à l’inverse, mettant en valeur les massifs multicolores et les sculptures.
Carte postale Square de nuit (coll. JM)
1992, déclaré Jardin historique
En 1992, le square Lechten est reconnu comme Jardin historique et à ce titre, fut recensé au patrimoine dans l’inventaire des Monuments Historiques.
Structure finale du square
Avec les différentes acquisitions et les aménagements réalisés, le square possède plusieurs espaces.
La partie sud avec le "Massif Grec", côté rue de Mulhouse, composée d’un très beau massif rectangulaire avec plans inclinés, entouré de buis et de tilleuls.
Cartes postales du massif "Grec"
avec dessins différents des années 70 (coll. BF)
Cartes postales du massif "Grec"
avec dessins différents des années 90 (coll. BF)
La partie centrale tout en longueur apporte une vision de profondeur au square par ses différents ornements. Elle s’ouvre, côté avenue Jean Jaurès, sur son joli bassin orné, en autre, de deux angelots soufflant l’eau; puis la majestueuse mosaïque avec son décor annuel précédant le massif où s’érige le monument l’Age de Pierre.
Carte postale Le bassin du square (coll. JM)
Cartes postales Le massif principal (coll. JM)
Carte postale Monument de l'Age de Pierre (coll. JM)
La dernière partie, plus au nord, on y trouve la pergola permettant d’accéder à la statue élancée et plein de grâce qu'est Fin de Danse. À souligner, une particularité signalée par un lecteur du blog, la présence de lianes entourant la pergola provenant d'actinidiers (Actinidia, arbre à kiwis).
Carte postale La partie nord avec la pergola (coll. BF)
Mais aussi, plusieurs essences à port retombant comme le hêtre pleureur, tilleul retombant… mais aussi des arbres de forte ampleur comme des séquoias de Chine (méta séquoias glyptostroboïdes)…
Carte postale Les grands arbres (coll. BF)
Des bancs disséminés sur l’ensemble du square permettent de profiter de la beauté des floraisons et de la tranquillité des lieux, un vrai havre de paix à proximité de rues très chargées en circulation automobile.
Cartes postales Le square vers 1928 et vers 1930-40 (coll. JM)
NA : Ce billet n'aurait pas pu être autant imagé sans l'apport de notre cartophile Bernard.
Épilogue
Avec cet article, on peut découvrir l’historique de ce square, créé à l’initiative du maire Noël Lapostolest, avec les différentes grandes étapes de son évolution au fil des années. Il accueillit aussi, un monument et deux statues.
Une 3e est venue aussi trouver un havre de paix, la statue d’Edith Cavell, en juin 2017. Voir l’article via le Sommaire.
Après plusieurs appellations, il fut nommé en 1961, Square Lechten, en mémoire de son premier maître-jardinier, Émile Lechten. Il est considéré comme le plus beau square de Belfort.
JM
Liens pour accéder aux articles cités
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Article sur le poète Léon Deubel : Cliquer ici
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