Ronchamp Notre-Dame du Haut, la Chapelle Le Corbusier (2ème partie)
MAJ le 23 janvier 1919
Après vous avoir découvert l’histoire de la colline de Bourlémont et de sa chapelle depuis son origine à sa destruction partielle lors de la 2ème Guerre Mondiale, je vous propose, pour cette 2ème partie, d’entrer dans l’histoire de la Chapelle de Le Corbusier à travers les hommes qui ont consacré leur énergie à l’édification de ce sanctuaire dans un environnement assez conservateur voir passéiste…
Pour consulter la première partie de l'article : Cliquer ici
1949, la genèse du projet de la Chapelle de Le Corbusier
Si la chapelle avait reçu une réparation sommaire, pour la protéger des intempéries, le temps était venu où il fallait prévoir sa restauration voir peut-être en reconstruire une nouvelle…
Notre-Dame du Haut (Photo JM)
Pour mener le projet à bien, l’abbé Henri Besançon et les propriétaires* du bâtiment et des terrains avaient d’une part accepté de déléguer à la Commission Diocésaine d’Art Sacré (CDAS) de Besançon ses prérogatives et d’autre part créé une Société Civile Immobilière le 26 septembre 1949 à Lure par devant Maître Carraud, notaire à Vesoul. Elle est chargée de recueillir les fonds provenant des dommages de guerre, suite à la loi du 28 octobre 1946 qui prévoit la réparation des dommages, et d’effectuer les emprunts nécessaires. L’abbé est nommé président, Alfred Canet comme secrétaire et les propriétaires en sont les membres.
*Les propriétaires, une vingtaine, sont les descendants des familles de Ronchamp qui avaient acheté la chapelle et les terrains de la colline en 1799.
Carte postale du village de Ronchamp
Il faut dire qu’au sein de la CDAS créé en 1945, deux de ses membres étaient implicitement impliqués par la destiné de ce lieu. François Mathey, (5) nommé récemmentinspecteur des Monuments historiques, était un enfant du pays. Un autre haut-saônois, l’abbé Lucien Ledeur (6) était né lui à quelques kilomètres, à Plancher-les-Mines. Il avait dit sa première messe à la chapelle.
C’est le même François Mathey qui avait convaincu le comité ronchampois de prendre appui sur la commission pour le choix de l’architecte et du projet.
Lucien Ledeur (photo ER) et François Mathey (Livre LC Ronchamp MA Crippa)
Comme envisagé dans un premier temps, les projets soumis aux donneurs d’ordre vont tous dans le sens de la reconstruction de la chapelle dont celui proposé par l’architecte de Lure, M. Bedou. Aucun n’a les faveurs de la CDAS, ils sont tous rejetés !
François Mathey demande à l’architecte des palais nationaux, Jean-Charles Moreux un projet. Sa proposition malgré un coût réduit est, elle aussi refusée par l’archevêque de la cité comtoise, Mgr Maurice-Louis Dubourg. Il veut un projetrompant avec le passé, il veut une église contemporaine ! Il est en phase avec les orientations développées par la revue Art Sacré codirigée par les pères dominicains Marie-Alain Couturier et Pie-Raymond Régamey prônant la modernisation et la qualité artistique.
Revue L’art Sacré sur Ronchamp Notre-Dame du Haut (Sept-oct. 1955)
L’archevêque avec d’autres membres de la Commission Diocésaine d’Art Sacré dont l’architecte René Tournier, a la volonté d’apporter un souffle de modernité dans les lieux de culte. L’opportunité de ce projet, donne l’occasion à la commission en s’orientant vers la construction d’une nouvelle chapelle, de s’affranchir de l’existant pour participer au nouveau courant de modernisme qui prend pied après ces années de conflit. Une église ne doit pas obligatoirement être austère, elle peut être belle !
Elle consulte les artistes de l’époque tels les peintres Jean Bazaine, Jean Le Moal, Fernand Léger, Alfred Manessier, Jean Olin…
C’est lors d’une réunion en mars 1950, que le nom de Le Corbusier est mis sur la table. Quand François Mathey contacta l’architecte, par l’entremise de Maurice Jardot, il se fit éconduire car ne voulant pas ‘’travailler avec une institution morte’’ !
Photo Le Corbusier
Ne pouvant se satisfaire de ce refus, avec Lucien Ledeur, ils prirent leur bâton de pèlerin pour convaincre l’architecte et le faire changer d’avis.
Le Corbusier est par ailleurs fortement occupé par plusieurs projets en cours dont la construction de sa Cité radieuse à Marseille.
Carte postale de la Cité Radieuse à Marseille
D’autres contributeurs vont tenter d’infléchir la position de l’architecte.
Un troisième homme va faire pencher la balance et le convaincre de réviser sa position, il s’agit de Maurice Jardot qui en mai 1950, convie son grand ami, Le Corbusier, à venir sur la colline de Bourlémont.
Photo Maurice Jardot
Pour l’architecte, ce lieu complètement dégagé et chargé d’histoire va le subjuguer. De plus, de cette colline, il voit presque son pays, la Suisse ! Il prend quelques notes et fait quelques croquis… Cette énième intervention a porté ses fruits, elle a convaincu finalement Le Corbusier.
Il va accepter ce chalenge, une première pour lui car à ce jour, il n’a pas à son actif, de réalisation religieuse.
Carte postale Le Corbusier
NA : Plusieurs versions existent sur le déroulement exact des faits entre le choix de l’architecte Le Corbusier et son accord.
Je conseille de lire le beau livre très documenté de Maria Antonietta Cripa ‘’Le Corbusier Ronchamp’’ édité en 2014.
Couverture du livre
Le projet de Le Corbusier prend forme
En fin d’année 1950, une maquette en plâtre, réalisée par son collaborateur André Maisonnier, peut être présentée aux commanditaires dans l’atelier de l’architecte au 35 de la rue de Sèvres à Paris. Les visiteurs qui découvrent la maquette, tout en étant subjugués, sont pour le moins dubitatifs ! Mais la visite de l’archevêque, Mgr Maurice Dubourg (7), en novembre à l’atelier, va valider le projet.
Carte postale de la maquette réalisée en plâtre (vue côté autel)
En réalité plusieurs maquettes ont été réalisées, une première aurait été réalisée en plastiline (un composé de cire et d’huile) par Le Corbusier lui-même devançant celle fabriquée en plâtre par André Maisonnier qui serait conservé par le Musée Beaubourg. Une troisième fut élaborée avec du fil de fer et du papier permettant d’avoir une meilleur vision des volumes.
La maquette réalisée en fil de fer et papier
D’autres maquettes ont été réalisées dont celle visible à la Porterie de La Chapelle, effectuée en 1953 (information de JF Mathey).
Carte postale de la maquette réalisée en plâtre (vue côté Est)
Le 20 janvier 1951, une présentation officielle documentée mais sans maquette et sans la présence de Le Corbusier, est effectuée par Pierre Couturier devant la Commission Diocésaine d’Art Sacré à Besançon et des représentants de la Société Civile Immobilière (SCI) dont l’abbé Besançon. On ne peut pas dire que toutes les personnes présentes soient emballées par le projet mais sont enclins, tout de même, à donner leur accord !
Il appartint à l’abbé Besançon, à la demande de l’archevêque Mgr Dubourg, de signer la commande au nom de la SCI de Notre-Dame du Haut en septembre. Il démissionna peu après et ce fut l’abbé Arthur Bourdin qui prit le relais.
Carte photo Mgr Maurice-Louis Dubourg
Si la majorité des personnes en charge du projet sont en phase avec le choix retenu, il en est tout autre pour les paroissiens de Ronchamp et des environs, ainsi qu’une certaine presse (Sémailles, La Voix de la Provence…)… certains persifflent ‘’que ce projet futuriste n’est pas une église mais ressemble plus à un bunker !’’. Enfin des sommités religieuses de Rome vont, elles aussi, tirer à boulets rouges sur le projet.
Le Corbusier, comme tout innovateur, est un incompris par une majorité de personnes n’osant pas quitter le confort rassurant du conservatisme !
Carte postale de la Chapelle au tout début des années 50
Cette situation ne favorise pas la démarche d’Alfred Canet, le trésorier de l’association, pour collecter les fonds nécessaires à la construction de la chapelle.
Le projet évolue légèrement au cours des années avant sa version permettant d’établir les plans définitifs en fin de l’année 1953.
1953, la construction de la chapelle de Le Corbusier
Un dernier pèlerinage a lieu le 8 septembre 1953 à la chapelle avant sa démolition dès le lendemain.
Le Corbusier a confié à son collaborateur l’architecte dijonnais André Maisonnier, qui avait réalisé la maquette en plâtre et dressé les plans à plusieurs échelles, la conduite des travaux.
André Maisonnier (photo livre Le Corbusier Ronchamp MA Crippa)
Avant de débuter la construction de la nouvelle chapelle, Le Corbusier fit construire deux bâtiments en contrebas de son emplacement, encadrant le chemin d’accès. Une petite maison qui accueillera la Maison du Chapelain à partir de 1958 etl’Abri des pèlerins qui fut utilisé comme logement par les bâtisseurs.
A droite, l’abri des pèlerins (photo JM, 2015)
D’architecture classique, dans la lignée des ‘’Murondins*’’ de l’architecte quoi que, car s’ils sont construits en béton où l’angle droit est omniprésent à la différence de la future chapelle. Ils possèdent de grandes ouvertures orientées pour recevoir la lumière naturelle et leur toiture est végétalisée.
*Murondins : Le concept fut créé par Le Corbusier en avril 1940, lors de la débâcle, pour réaliser des abris simples constitués avec des branches et de la terre… des murs et des rondins.
Carte postale La colline avec la Maison du Chapelain à gauche et l’Abri des pèlerins à droite
Une citerne a été creusée pour recueillir de l’eau pour la confection du béton, matériaux retenu pour des conditions de coûts.
Ce n’est que le 4 avril 1954 mais dans l’Année mariale que la première pierre de la future chapelle est posée avec la bénédiction du vicaire capitulaire de Besançon, Mgr Georges Béjot, en présence de l’architecte. Il en sera de même pour l’abri du Pèlerin.
Mgr Béjot dédicace le parchemin (photo Livret ND du Haut de l’abbé Bolle-Rédat)
L’ardent défenseur du projet, l’archevêque Mgr Maurice-Louis Dubourg est décédé le 31 janvier; il n’aura pas pu voir la construction de cette nouvelle chapelle qui fait tant débat !
NA : A la date du 4 avril, le nouvel archevêque n’était pas encore nommé. Mgr Marcel-Marie Dubois, évêque de Rodez, il le fut le 9 juin et ne pris son poste que le 3 octobre.
Le vicaire qui était en parfaite harmonie avec les idées novatrices de son supérieur, pris le relais de la défense du projet de Le Corbusier envers les nombreux contradicteurs
Photo du vicaire Georges Béjot
A cette occasion, un document, signé par plusieurs autorités dont Mgr Béjot, Raymond (Pie) Régamey, Le Corbusier, Alfred Canet… fut scellé dans la première pierre.
Le Corbusier dédicace le parchemin (photo Livret ND du Haut, abbé Bolle-Rédat)
La construction peut enfin débuter !
Les murs sont construits par la méthode du coffrage. Ils sont constitués d’une structure formée avec des pilastres (poteaux) de forme triangulaire en béton armé, espacés et raccordés entre eux par des poutres transversales de contreventement. Le tout fut enserré par un lattis de métal déployé de forte épaisseur où l’on a inséré les pierres de l’ancienne chapelle.
Croquis du mur (source Document du CAUE du Doubs et du Jura)
L’ensemble fut recouvert d’un revêtement de gunite* à l’aide d’un canon à ciment.
*La gunite ou béton projeté permet de réaliser des formes complexes. Ce fut l’américain Carl Akeley qui inventa le concept en 1907.
Construction du mur (Photo Charles Bueb, livre Ronchamp Lecture d'une architecture)
Le toit fut réalisé aussi par coffrage. En forme de coque de crabe, il possède deux membranes de 6 centimètres d’épaisseur enrobant une structure complexe, composée de six poutrelles maîtresses s’appuyant sur les pilastres du mur et 180 travées perpendiculaires séparées par des voiles en béton. Les deux voiles de la coque sont distantes au plus fort de 2,26 mètres. C’est grâce à une forêt de perches de sapin que le coffrage du toit put être effectué.
Les perches de sapin (Photo Charles Bueb Livre Ronchamp Le Corbusier)
On peut comparer la structure du toit de la Chapelle à une aile d’avion (ou un nid d’abeilles étiré), elle offre résistance et légèreté.
Croquis du toit (source Document du CAUE du Doubs et du Jura)
La finition murale intérieure et extérieure se fit en deux temps par la pose d’un enduit de chaux pour obtenir une surface granuleuse, elle même recouverte par une couche de lait de chaux assurant une finition de couleur blanche.
Les formes curvilignes associées à la structure des murs donnent stabilité et résistance à l’édifice tout en donnant une souplesse architecturale via ses lignes concaves et convexes, celles attendues pour ce nouveau projet de Le Corbusier.
Construction du mur (Photo livre Ronchamp Lecture d'une architecture)
A noter que le toit ne s’appuie que sur les pilastres, la partie mur étant en retrait, un jour laisse entrer la lumière naturelle dans la chapelle.
En terme de hauteur, l’édifice n’est point monolithique avec ses trois tours; celle dressée au sud-ouest est la plus haute à 22 mètres, tandis que les deux autres, jumelles qui sont au nord, à 15 mètres.
Carte postale La construction est terminée
Le Corbusier est venu sur le site pendant la construction pour vérifier le respect des plans, donner des consignes complémentaires, faire évoluer certaines formes et mettre la touche finale à certains éléments de décoration.
Au bout de 14 mois, la construction de la chapelle est réalisée à partir de plans d’André Maisonnier, par la petite dizaine de maçons dirigée par le tout jeune contremaître François Bona de 22 ans,de formation charpentier par compagnonnage. Ils ont du s’adapter à des situations imprévues et trouver des solutions aux écueils rencontrés.
L’équipe des maçons (photo brochure ENSAM)
Cette construction, sans grue, sans électricité et en récupérant l’eau, avec une équipe réduite mais soudée, démontre la capacité des hommes à réaliser une œuvre architecturale hors du commun au milieu du 20ème siècle sous la conduite d’un architecte visionnaire Le Corbusier bien épaulé par son disciple André Maisonnier.
Carte postale La façade sud de la Chapelle
La Chapelle d’une surface de 756 m² a une emprise au sol d’environ 28,5 mètres de large sur 37 mètres de longueur. Côté hauteur, avec son toit incliné varie entre 8 à plus de 20 mètres environ, et la tour principale s’élève à près de 23 mètres.
NA : Ces données sont approximatives car je n’ai pas trouvé de plans côtés et les informations récoltées ne sont pas toujours cohérentes. Il faut dire que l’édifice par définition joue avec la complexité de ses formes.
Le Corbusier bien informé que le sanctuaire de la colline de Bourlémont fut le lieu incontournable de pèlerinages, de tout temps, a reconduit le principe que cette chapelle devait être ouverte vers l’extérieur d’où l’intégration d’un vaste et réel autel avec sa chaire.
Carte postale Vue de l’autel extérieur
Pour ceux qui veulent en apprendre plus sur la construction de la Chapelle, je vous conseille de consulter le document rédigé et fort bien documenté (45 pages) par le binôme C. Miarchiaro & A. de la Foye de l’ENSAM en 2012 : Cliquer ici
L’intérieur de la Chapelle
L’intérieur de la Chapelle est composé d’une nef principale, d’une grande chapelle, de deux petites (matin et soir), d’une sacristie, d’un confessionnal, d’une chaire et d’un chœur avec son autel, sa hauteur minimale sous plafond est égale 4,52 mètres.
A l’extérieur, il possède un chœur avec son autel et une chaire.
Descriptif de la chapelle (source Document du CAUE du Doubs et du Jura)
Pas sa conception, la Chapelle permet à la lumière de pénétrer via le jour en son pourtour du à l’interstice créé entre son mur et son toit.
Carte postale La lumière naturelle est omniprésente dans la Chapelle
Mais aussi, elle possède en sa partie sud ainsi qu'en sa partie est, un véritable mur de lumière constitué avec ses nombreuses ouvertures vers l’extérieur.
Carte postale du mur de lumière intérieur
Ces entrées de lumières sont munis de vitrages colorés (et non des vitraux) où sont inscrites, par le maître, des inscriptions mariales.
Un des vitrages, celui dédié à Marie (photo JM)
Le Corbusier n’a pas seulement conçu le nouveau sanctuaire ainsi que ses dépendances (la maison du gardien et l’abri du Pèlerin) et la Pyramide, il a aussi dessiné l’ensemble du mobilier de la chapelle qui fut réalisé en partie, pour la part en bois ainsi que la croix, par l’ébéniste breton Joseph Savina, originaire de Douarnenez.
C’était le poète et critique d'art Pierre Guéguen qui fit rencontrer ses deux amis lors de vacances de Le Corbusier au Trégor (nord de la Bretagne) en 1935. Dès l’année suivante, l’architecte proposa des croquis de meubles à réaliser à l’ébéniste.
Pierre Guéguen
Au milieu des années 40, leur collaboration va s’intensifier via la réalisation de statues en commun, plus d’une quarantaine. Le Corbusier proposait des croquis et Joseph Savina les interprétait en les mettant en volume; leur finition étant réalisée conjointement dans l’atelier de l’architecte.
Cartes postales de l’autel
Une des belles créations de l’architecte est aussi la grande porte (3 x 3 mètres) pivotante sur un axe central. Elle est agrémentée par des décors ‘’corbuséens’’ réalisés sur huit panneaux en tôle émaillé, pour chaque face, du plus bel effet.
Carte postale de la porte côté extérieur
Sur le panneau de porte d’entrée, on peut voir la représentation de deux mains, une rouge et une bleu, ouvertes en signe d’accueil les pèlerins.
Carte postale de la porte côté intérieur
Voir aussi le diaporama du photographe Marc Peygnard sur la présentation de la Chapelle avec les commentaires du chapelain René Bolle-Rédat : Cliquer ici
Carte postale du tabernacle et du lectionnaire
1955, Inauguration de la chapelle de Le Corbusier
Le projet de l’architecte se déconnecte totalement des constructions antérieures… il s’inspire de plusieurs concepts. Celui des formes de cet environnement que sont les ballons des Vosges comme sa conception s’imprègne d’une coquille de crabe ramassée sur la plage de Long Island.
Le Corbusier s’appuie aussi sur les proportions architecturales du Modulor, mesures qu’il a établies en 1943 selon une échelle humaine.
Pin’s représentant le Modulor
La courbe est de fait que ce soit pour ses murs concaves ou pour son toit en forme de vague.
La nouvelle chapelle est inaugurée le 25 juin 1955 par l’archevêque de Besançon, Mgr Marcel-Marie Dubois.
Mgr Marcel-Marie Dubois (photo Wikipédia)
En ce jour symbolique, Le Corbusier en remettant les clés du nouveau sanctuaire à l’archevêque, prononce ces mots :
«En bâtissant cette chapelle, j’ai voulu créer un lieu de silence, de prière, de paix, de joie intérieure. Le sentiment du sacré anima notre effort. Des choses sont sacrées, d’autres ne le sont pas, qu’elles soient religieuses ou non…».
Le Corbusier lors de son discours (Photo Charles Bueb, Livre LC Ronchamp, MA Crippa)
En ce dimanche de juin, une foule dense entoure les nombreux officiels tant religieux, que civils (maires, préfet…) ou militaires (officiers et anciens combattants) dont le ministre du Logement et de la Reconstruction, Eugène Claudius-Petit, ami et soutien de l’architecte lors de ce projet fortement décrié.
Carte postale La nouvelle Chapelle veille sur le village
La messe qui y est donnée, se déroule en pleine air en profitant de l’autel extérieur de la Chapelle.
Le pèlerinage du 8 septembre, le premier avec la nouvelle chapelle attira plusieurs milliers de visiteurs qui ne vinrent pas tous pour l’office.
Carte postale d’un pèlerinage
Nombreux sont ceux que la curiosité avait titillé, ils ont fait le déplacement pour découvrir l’édifice qui fait tant couler d’encre sur cette révolution architecturale apportée par Le Corbusier.
Carte postale du site de la colline visitée
Après une dizaine d’années et bien des mots, la colline retrouve une chapelle qui tel un phare illumine la vallée de Ronchamp et va attirer des pèlerins et visiteurs du monde entier, mais à cette date, elle ne sait pas encore !
Carte postale avec cachet du jour de l’inauguration
Les personnes ayant contribué à la réalisation de ce nouveau sanctuaire ressemblant à aucun autre, peuvent se féliciter d’avoir été visionnaires en choisissant un concepteur audacieux dans l’art architectural religieux…
Le mémorial de la bataille de Bourlémont
En même temps que la chapelle, est inaugurée la pyramide dressée en tant que mémorial de la bataille de Bourlémont, d’où la présence de nombreux officiers militaires et anciens combattants.
La pyramide (photo JM)
Suite à la demande des autorités de construire un monument en l’honneur les militaires français morts sur la colline lors de la Libération, Le Corbusier eut l’idée de construire cette pyramide à partir de la vision des pierres entassées et réservées lors de la démolition de l’ancienne chapelle. Il n’est pas interdit d’envisager aussi que l’idée fut suggérée par André Maisonnier permettant en autre d’utiliser le surplus de pierres disponible !
A son pied, une poutrelle où il est inscrit ‘’Sur cette colline en 1944 des français sont morts pour la France’’, supporte une colombe de bronze. Deux procédés d’écriture furent utilisés, par découpage et par lettres rapportées.
Le haut de la poutrelle avec sa colombe (photo JM)
La pyramide par sa disposition et tel un gradin, permet aux paroissiens de s’assoir et de suivre le déroulement des offices religieux en extérieur.
L’arrivée de l’aumônier René Bolle-Reddat
La nouvelle chapelle a un fort potentiel d’attractivité donnant une charge importante au curé du village, l’abbé Arthur Bourdin. Un important flux de visiteurs tant français qu’étrangers, en famille ou par groupe, envahi la colline.
Il se fait aider par des collègues et l’un d’entre-deux, l’aumônier du lycée Jérôme de Vesoul, René Bolle-Reddat, s’avère être habité par le lieu.
René Bolle-Rédat (collection Les Clarisses)
Il faut dire qu’il avait été invité par Marcel Ferry, un des animateurs de la CDAS, à la présentation officielle du projet le 20 janvier 1951, à Besançon.
Il en devient le chapelain à plein temps le 1er janvier 1957 sous l’autorité directe de l’archevêque. Il s’imprègne de l’œuvre de Le Corbusier qu’il va rencontrer pour la première fois le 9 juillet 1958, de la chapelle bien sur, mais aussi de ses autres réalisations.
Ticket d’accès à la Chapelle mis en place par le chapelain (1 franc en 1956)
Personnage, haut en couleur, il a géré ce sanctuaire avec enthousiasme et persévérance voir avec pugnacité. Il entreprend une mise en valeur de l’environnement de la chapelle (défrichage, nettoyage, plantations..), en chasse les marchands du temple (démontage des cabanes), accueille les visiteurs de toutes nationalités (il parle allemand) et la protège de leurs incivilités. Par acquisitions successives de terrains limitrophes, il permet l’extension du foncier appartenant à la SCI.
Dès 1961, il va rédiger un petit journal ‘’L’Echo de Notre-Dame du Haut’’. Le numéro daté du 8 septembre 1961 fut le premier d’une série de 90 bulletins s’étalant jusqu’en avril 1992. Dans un premier temps mensuel, il deviendra trimestriel.
L’Echo de Notre-Dame du Haut Octobre 1977 (Source Site ABAMM)
Ces petits journaux qu’il réalise seul, sont d’une richesse culturelle assurée, où se côtoient textes et belles photos, des comptes-rendus de visites de personnalités et sa correspondance avec Le Corbusier.
L’Echo de Notre-Dame du Haut Mars 1985 (Source AM Belfort)
Même après son grave accident (blessé au genou et à la hanche) de 1977 en voiture, il poursuit son activité au profit de la mise en valeur du site. Il va être obligé de laisser sa chapelle quelques mois suite à une attaque d’hémiplégie en 1987 et il devra l’abandonner définitivement le 14 mars 2000, pas tout à fait, car il est enterré dans le cimetière sur la colline.
Avant de quitter le chapelain, abordons un de ces combats…
Le Campanile
Le chapelain René Bolle-Reddat s’attelle aussi à un autre combat qui lui tient à cœur, l’installation d’un campanile pour accueillir les cloches. Il veut poursuivre la démarche effectuée par Just Chippaux, le gardien du sanctuaire depuis 1923. Il avait construit un beffroi en bois, après la Libération, pour y installer les deux cloches ayant résisté aux tirs d’obus. Il leur avait redonné vie afin de faire voies pour la population et les visiteurs. Après son départ en 1962, les deux cloches s’étaient retrouvées sur des madriers, voies éteintes.
Le Campanile (photo JM)
Le Corbusier n’avait pas voulu installer de cloches dans la chapelle, il voulait les intégrer dans une autre structure séparée. Il n’a pas pu réaliser ce projet avant sa mort.
En l’architecte nancéen Jean Prouvé, le chapelain va pouvoir concrétiser en 1975, sa démarche. Il lui dessine un projet d’un campanile.
A partir de novembre, les travaux sont engagés jusqu’au dressage le 27 décembre du portique où les 3 cloches peuvent être accrochées.
Livre sur l’architecte Jean Prouvé
NA : Jean Prouvé est en autre, le concepteur des façades-rideaux du CNIT (Centre des Nouvelles Industries et Technologies) en 1956 et de la charpente du POPB (Palais Omnisport Paris Bercy) en 1981.
Car aux deux anciennes cloches, une troisième va les rejoindre. Elle a été commandée à la même société que celles de 1936, aux Etablissements Paccard d’Annecy-le-Vieux. Coulée le 5 février 1975, elle rejoint la colline et est installée en même temps que ses deux consœurs le 13 mars sur le campanile.
Carte postale du Campanile de Jean Prouvé
La petite dernière, quoi que, car portant fièrement tout de même 530 kilogrammes sur la balance, a pour nom de baptême Charlotte-Amélie Yvonne Marie. Elle porte sur son flanc, une gravure en forme de clin d’œil au symbole lecorbuséen, la main ouverte (une croix est tracée dans la paume).
Carte postale du Campanile avec ses 3 cloches (1869, 1936 et 1975)
L’ainée des cloches date de 1869 et provient de la Fonderie de cloches des établissements Goussel-François installés à Metz. Elle fut baptisée par l’abbé Jean-Baptiste Faivre, le curé de la paroisse sous le nom de Marie Margueritte Florentine.
Facture de la fonderie Goussel-François
Pour ceux qui veulent écouter ce trio musical : Cliquer ici
Le chapelain René Bolle-Rédat qui a consacré une grande partie de sa vie à la Chapelle, quitte sa ‘’maison’’ le 14 mars 2000. Toutefois il reste sur sa colline, enterré dans le petit cimetière.
1962, pèlerinage du Concile
Après son inauguration en 1955, la colline de Bourlémont et sa nouvelle Chapelle va connaître une de ses plus grosses affluences le 14 octobre 1962.
D’après la presse, environ 10 à 12 000 personnes sont venues pour participer à ce pèlerinage se déroulant dans le cadre du Concile Vatican II, ouvert trois jours plutôt par le pape Jean XXIII.
NA : Le IIe concile œcuménique du Vatican, le XXIe de l’Eglise catholique, est considéré comme l'événement le plus marquant de son histoire au XXe siècle.
Il symbolise son ouverture au monde moderne et à la culture contemporaine. Il prit fin le 8 décembre 1965 sous la papauté de Paul VI.
Carte postale du pape Jean XXIII
En début de matinée, une première messe à destination de la jeunesse fut célébrée par l’abbé Maurice Vial, le supérieur de l’Institution Sainte-Marie de Belfort. Chantée sous la direction des abbés Jacques Sonet et Du Posey, le chapelain René Bolle-Reddat y effectua un prêche vibrant.
Carte postale Jour du pèlerinage, les prêtres se rendent vers l’autel extérieur
Cette messe, à peine terminée, la foule arriva sur la colline. Elle avait eu beaucoup de difficulté pour atteindre la colline car aux francs-comtois, s’étaient joints de nombreux pèlerins venus de France ainsi que de nombreux groupes de pays européens. Il est à noter que beaucoup de malades ou d’infirmes étaient présents dans cette foule en totale communion.
Carte postale Jour du pèlerinage, les prêtres arrivent devant l’autel
De nombreux religieux avaient effectué le déplacement pour participer à cet important pèlerinage dont le Père Popov archiprêtre orthodoxe pour l’Est de la France et le Père Paul venu de Grèce.
Carte postale Jour du pèlerinage, les prêtres sont arrivés à l’autel
Ce fut Monseigneur Jean-Marie Pierre Margelin, représentant Marcel-Marie Dubois l’archevêque de Besançon, qui officia pour la messe où des prières en plusieurs langues furent prononcées.
Le Corbusier
Le Corbusier de son vrai nom, Charles-Edouard Jeanneret-Gris, est né le 6 octobre 1887 à La Chaux-de-Fond en Suisse. Son père Georges-Edouard Jeanneret était un graveur et émailleur de montres français, il s’est marié avec Marie-Charlotte-Amélie Perret, une musicienne suisse, fille d’une famille d’industriels horlogers.
Carte postale La Chaux-de-Fond Place du marché (Suisse)
Son pseudonyme est issu du patronyme d’un de ses ancêtres maternels, lui belge, Corbésier. L’architecte l’utilisa dès 1920 pour signer des articles avec une petite digression orthographique.
Après des études qui l’emmenaient vers le métier de son père, du moins très proche, celui de graveur-ciseleur, il dut suite à une très mauvaise vue d’un œil se réorienter vers des études d’architecte sur le conseil de son professeur de dessin. Dès 1907, il entreprend des voyages d’études en Europe (Italie, Autriche, Grèce, Allemagne…) et même en Turquie sans parvenir à s’intégrer dans le cercle des architectes locaux.
Carte postale La Chaux-de-Fond Musée Atelier de graveur
Il poursuit ses études entre sa ville natale et Paris où il espère pouvoir s’y installer; ville où il fit une rencontre importante en 1909, celle d’Eugène Grasset, l’architecte spécialiste de la décoration. Il lui conseille d’étudier l’architecture en béton armé.
Carte postale La Chaux-de-Fond Place de l’Hôtel de Ville
A partir de 1913, il enseigne l’art toujours dans sa ville tout en effectuant son métier d’architecte qui n’est pas sans échec car plusieurs de ses réalisations ne respectent pas les délais et les coûts, voir sont sujettes à des problèmes techniques.
Une de ses premières réalisations est la Villa Schwob appelée aussi la Villa Turque, dans sa ville natale.
La Villa Schwob (photo Fondation Le Corbusier)
En 1917, il rejoint Paris. C’est vrai qu’il a pris cause pour la France regrettant que son pays soit neutre dans cette Première Guerre Mondiale. Il y ouvre son cabinet d’architecte.
Parallèlement, il s’initie à la peinture à l’huile avec le peintre français Amédée Ozenfant avec lequel il va créer le courant du purisme, le respect de l’ordre à contre courant du cubisme qui lui bouleverse la représentation des objets.
Amédée Ozenfant
Après avoir fait faillite, il ouvre un nouvel atelier en 1922 avec son cousin architecte Pierre Jeanneret qui deviendra un designer de grand talent.
Cette nouvelle décennie va être pour l’architecte l’occasion de réaliser de nombreux projets de villas en France et en Europe.
Carte postale Maison municipale Frugès à Pessac (près de Bordeaux) 1925
Les années 30 vont confirmer la capacité de Le Corbusier à réaliser de l’architecture immobilière mais il va franchir un pas important avec des projets d’immeubles collectifs en France et dans le monde.
L’un des premiers immeubles fut le Clarté à Genève en 1930.
Le Clarté à Genève (Photo Fondation Le Corbusier)
En 1930, la Suisse passe commande à Le Corbusier et à son cousin, Pierre Jeanneret, la construction d’une cité étudiante devant être implantée à la Cité Internationale Universitaire de Paris. Cette habitation collective, le Pavillon Suisse, formée de trois volumes apporte indubitablement une modernité architecturale voir avant-gardiste en ce début des années 30. Un grand effort fut aussi réalisé dans l’aménagement de ce lieu de vie destiné aux étudiants.
Télécarte (Italie) Le Pavillon Suisse à la Cité Universitaire à Paris
Au début des années 40, il abandonne ses activités à Paris pour le sud de la France où il s’adonne à la peinture.
Après six années de guerre, le temps de la reconstruction est d’actualité; l’architecte sollicité crée l’ATBAT (ATeliers des BATisseurs) toujours rue de Sèvres.
Au regard des besoins, il propose une industrialisation pour la fabrication d’immeubles standardisés.
Timbre Suisse édité en 1972
Les années cinquante voient la construction de la Cité Radieuse à Marseille et la Chapelle Notre-Dame du Haut à Ronchamp. L’architecte va participer à l’urbanisation de la nouvelle ville indienne, Chandigarh.
Livre Chandigarh La ville indienne de Le Corbusier
Il dessina plusieurs bâtiments à l’usage des services de l’administration.
Une autre Cité Radieuse est construite à Rezé (commune au sud-ouest de Nantes) entre 1953 et 1955.
Fève de la Cité radieuse à Rezé
L’architecte n’inscrit pas son atelier dans une politique de l’enrichissement à tout-va offert suite à l’explosion des besoins en habitat dans les années 60, il préfère travailler sur des projets plus artisanaux où il laisse libre cours à sa créativité. Elle est la sève de son mode de fonctionnement !
Eveux (Rhône), le couvent Sainte-Marie-de-la-Tourette (1958)
Il a consacré en 1957, un livre sur son œuvre haute-saônoise intitulé ‘’Ronchamp Les carnets de la recherche patiente’’ où il revient sur le déroulement de ce projet depuis les premiers contacts avec les ambassadeurs des commanditaires.
Livre Ronchamp Les carnets de la recherche patiente (1957)
Le Corbusier n’était pas seulement architecte, il avait d’autres flèches à son arc dont la peinture et le dessin. Il a réalisé des centaines de toiles et des milliers de dessins.
Carte postale Peinture Le Corbusier Composition 1954 Musée Jardot à Belfort
Charles-Edouard Jeanneret-Gris dit Le Corbusier meurt le 27 août 1967 à Roquebrune-Cap-Martin en laissant une richesse architecturale novatrice et variée en termes de concepts essaimés à travers le monde (Allemagne, Brésil, Etats-Unis, Inde, Japon…) et bien entendu dans ses deux pays de cœur que sont la Suisse et la France.
Carte postale Roquebrune-Cap-Martin, le village
En 1987, pour le centenaire de sa naissance, de nombreux hommages ont été rendus à l’architecte et à son talent, enfin reconnu.
Timbre émis le 11 avril 1987 en France, Le Modulor de l’architecte
Cette juste récompense, bien tardive, se retrouve dans les nombreuses expositions présentées dans le monde et à des initiatives gravées…
Timbre émis 1987 par Monaco, Notre-Dame du Haut et l’architecte
Que se soit en France ou à l’étranger, ces expositions ont montré la capacité de l’architecte à apporter des solutions innovantes en architecture urbaine tant en conception individuelle ou collective. Il a fait, c’est évident, bouger les lignes mais pas seulement au sens figuré !
Pin’s et magnet Le Corbusier
Un autre constat sur son parcours architectural montre que Le Corbusier a créé de nombreux bâtiments collectifs, mais il semble avoir une nette préférence à construire de petites unités…
Billet Suisse de 10 Francs émis à partir de 1967
Comme tout artiste, il a sa part d’ombre par ses relations avec des membres du parti fasciste français, le Faisceau (1925-1928) dirigé par Georges Valois. Son nom est aussi associé à des revues (Plans, Préludes…) aux idéologies développées pro nationalistes. Surtout, il est présent à Vichy pendant près de 18 mois dans un bureau d’état.
En 2015 pour son 50ème anniversaire de sa mort, pas moins de trois livres sont sortis sur ce passé : Un Corbusier de François Chaslin, Le Corbusier Un fascisme français de Xavier de Jarcy et Le Corbusier, une froide idée du Monde par Perelman !
Livre Le Corbusier Un fascisme français Xavier de Jarcy 2015
Malgré la richesse des réalisations de Le Corbusier, aucune n’est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO ! En 2009, le dossier présenté n’a pas été accepté d’où la constitution d’un nouveau dossier regroupant six pays (Allemagne, Argentine, Belgique, France, Japon et Suisse) réunissant 17 sites, dont Notre-Dame du Haut, répondant aux critiques formulées et déposé en janvier 2015.
Carte postale Siège de l’UNESCO à Paris
Cette reconnaissance universelle sera peut-être reconnu lors de la 40ème session du Comité du patrimoine mondial prévu du 10 au 20 juillet 2016 à Istanmbul.
Pièce de 50 euros or éditée en l’honneur de l’architecte
1967, la Chapelle est classée
La Chapelle ainsi que ses annexes (la Maison du gardien, l’Abri du pèlerin, la Pyramide…) sont inscrits le 5 octobre 1965 à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques. Elle sera classée le 8 novembre 1967.
Carte postale 1er Jour avec timbre du 6 février 1965
Les annexes comprenant les éléments de Le Corbusier et le Campanile de Jean Prouvé seront classées eux, le 11 juin 2004.
Timbres émis par la France en 1963 et 1964 pour la Chapelle
A noter, que dès le début de sa construction, Le Corbusier avait demandé que le site soit classé pour empêcher que les marchands du temple s’installent et défigurent ce lieu spirituel. Après un refus en 1955 et de nouveaux combats, le site fut classé à l’inventaire des sites au titre de la loi du 2 mai 1930, sous l’autorité d’André Malraux, ministre des Affaires culturelles, le 11 mars 1960.
Carte postale de la Colline de Bourlémont avec la Chapelle
En 1999, la Chapelle obtint le label ‘’Patrimoine du XXe siècle’’.
1974, création de l’association
Vingt ans plus tard, la Société Civile Immobilière créée le 26 septembre 1949 a terminé de payer la Chapelle de Le Corbusier. Elle se transforme en association type loi 1901 sous le nom de l’AONDH (Association Œuvre de Notre-Dame du Haut).
Pin’s de la Chapelle
Le Site : Cliquer ici
Messe de Pâques à la Chapelle télévisée (1987)
A l’occasion du Centenaire de la naissance de Le Corbusier, il est né le 6 octobre 1887 à La Chaux-de-Fond, La Chapelle de Notre-Dame du Haut a été choisie comme lieu de retransmission en direct de la messe de Pâques du 19 avril par Antenne 2.
Affiche éditée à Ronchamp pour le Centenaire de Le Corbusier
Pendant 55 minutes, la Chapelle va être sous les feux des projecteurs et sous les yeux des caméras de télévision d’Antenne 2 pour une retransmission en Eurovision de la cérémonie religieuse juste avant l’intervention du Pape Jean-Paul II sur la Place Saint-Pierre à Rome.
Illustration d’Anthony Faucheux au texte très légèrement détourné !
Ce fut le chapelain Bolle-Reddat qui prononça la messe Pascale accompagné pour les chants par une chorale alsacienne de Strasbourg et des paroissiens. Par contre, le temps ne permit pas qu’elle soit effectuée à l’extérieur.
Carte postale illustrée par Lenzi pour ce centenaire
Cinquantenaire de la chapelle (2005)
Dans le cadre du jubilé de la Chapelle de Notre-Dame du Haut, plusieurs moments évènementiels se sont déroulés sur la colline de Bourlémont dont un son et lumière le 11 juin, suivi d’un feu d’artifices.
Pour ce rendez-vous illuminé, pas moins de 700 personnes ont été invitées par le président du Pays des Vosges Saônoises, Eric Houlley épaulé par le président de l’AONDH, Jean-François Mathey. Personnalités civiles et religieuses, élus… ont répondu présent dont l’archevêque de Besançon, Mgr André Lacrampe.
Ce fut l’agence Passe-Muraille de Strasbourg qui mis en scène le spectacle intitulé ‘’La colline et l’architecte, histoire d’une rencontre’’; le chef d’orchestre de ce double show était le régisseur Pierre Picaud.
A la nuit tombée, le spectacle peut commencer devant 2000 visiteurs massés sur la colline.
Le concepteur de ce son et lumières n’avait pas focalisé son spectacle que sur la Chapelle de Le Corbusier…
Organisé en cinq tableaux, il retraçait aussi l’histoire de la colline de Bourlémont avec la succession de chapelles au travers des âges et l’histoire de la vallée avec son passé minier.
Les formes et les façades blanches de la Chapelle se prêtaient bien aux projections vidéo élaborées par l’équipe de l’agence.
Comme tout son et lumières, il y a la partie sonore qui donne le relief musical aux images projetées. Ce fut le journaliste Philippe Lefait (Les mots de minuit, France 2) qui eut la lourde tâche de narrer certaines périodes de cette histoire et des rencontres importantes pour l’accomplissement du projet. La musique fut aussi présente via des interventions musicales et chantées.
Avant que le ciel explose de milles feux, des enfants vinrent déposer leurs bougies.
NA : Toutes ces photos sont de la propriété du photographe Bernard F.
Si le mois de juin fut festif tout au moins illuminé, le mois de septembre de l’année 1987 fut dédié au recueillement.
Tout commença par le traditionnel pèlerinage organisé chaque année le 8 septembre pour la fête de la Nativité de la Vierge Marie, il fut officié par l’abbé Jean Kita avec le chapelain du lieu, le père Louis Mauvais. Le lendemain, se déroula un pèlerinage du diocèse de Belfort-Montbéliard sous l’égide de l’évêque de Belfort-Montbéliard, Mgr Claude Schockert.
Carte postale de la Chapelle
Le 10 septembre, un autre évènement vint affirmer ce sanctuaire par la messe de consécration de la Chapelle par l’archevêque de Besançon, Mgr André Lacrampe en présence du chapelain, le père Louis Mauvais.
Mgr André Lacrampe bénit les paroissiens (photo Est Républicain)
NA : Lors de l’inauguration du 25 juin 1955, la Chapelle de Le Corbusier n’avait été que bénie ! Du fait certainement de l’impopularité du projet pour certaines autorités religieuses.
À cette occasion, des reliques de Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus et de Saint Jean-Marie Vianney, qui se trouvaient dans la précédente chapelle, furent déposé dans la Chapelle.
Epilogue provisoire (2ème partie)
Comme pour la première partie de l’article, même si la période est beaucoup plus courte, là aussi, le projet de la Chapelle de Le Corbusier n’a pas été simple à mettre en œuvre !
Pour accéder à la dernière partie de l’article : Cliquer ici
Références
Ouvrages : Ronchamp Notre-Dame du Haut Le Corbusier (Françoise Ascal, 2005), Ronchamp avant Corbusier (Archives départementales de la Haute-Saône, 2005), Le Corbusier Ronchamp (Maria Antonietta Cripa, 2014), Document (CAUE du Doubs),
Presse : Le Comtois, La Croix, Les Dépêches, Le Pays, L’Est Républicain
Site Web : Wikipédia, Les Amis du Musée de la Mine de Ronchamp, La Fondation Le Corbusier, Colline Notre-Dame du Haut (Ronchamp), autres
Remerciements à tous ceux qui m'ont apporté aides et donné des informations pour me permettre de rédiger cet article.
JM
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Légendes
(5) François Mathey : Né le 17 août 1917 à Ronchamp, 3ème enfant de Paul médecin de la mine et de Georgette Baignier titulaire d’un diplôme de professeur de dessin à Paris qu’elle ne put exercer suite à son mariage. Après l’école communale dans sa ville, il poursuit ses études au Lycée de Belfort.
Carte postale Lycée de Belfort
Il y obtint le 1er prix de Concours général de dessin en 1936 lui ouvrant les portes du Lycée Louis Legrand à Paris mais qu’il quitte pour entrer à l’Ecole du Louvre afin de suivre les cours de l’Ecole des Hautes Etudes dont ceux de l’archéologue André Parrot né à Dessandans (Doubs), spécialiste du Proche-Orient ancien.
Mais la déclaration de la guerre en 1939 bouleversa les projets et cette période où les armes ont malheureusement données, lui firent changer de trajectoire à sa démobilisation ! Il devient inspecteur des Monuments historiques pour assurer les ressources pour son ménage, il s’est marié en 1942 avec Suzanne Poulleau, la fille du directeur des Houillères.
Tout en parcourant la partie de la France concernée par ses attributions, il va publier des articles dans les revues du Cerf et de l’Art Sacré dès 1945.
François Mathey (photo livre Le Corbusier Ronchamp MA Crippa)
Il intègre le CDAS (Commission Diocésaine d’Art Sacré) de Besançon en 1943 jusqu’en 1953.
Comme son ami Lucien Ledeur, il est un pro défenseur de la sauvegarde du patrimoine, de sa restauration et d’y apporter un vent nouveau par l’apport d’artiste à la créativité artistique, d’où son implication au projet de la nouvelle Chapelle de Notre-Dame, d’autant plus qu’elle concerne sa ville natale.
En 1953, il est nommé conservateur en chef du musée des Arts décoratifs de Paris où il va s’employer à mettre en avant les peintres contemporains et les métiers d’art lors des centaines d’expositions.
Sa dernière visite à Notre-Dame du Haut sera pour son enterrement célébré par le chapelain René Bolle-Rédat, suite à son décès le 3 janvier 1993.
(6) Lucien Ledeur : Né le 5 mai 1911 à Plancher-les-Mines (Haute-Saône), il rejoint Ronchamp où il effectue le début de sa scolarité avant de rejoindre le séminaire La Maîtrise de Besançon en 1922.
Mais souffrant de la tuberculose, il doit revenir chez lui pour être soigné par le médecin de Ronchamp, Paul Mathey, père de François Mathey.
Lucien Ledeur (Collection Les Maîtrisiens Besançon)
Il reprend ses études mais au séminaire Saint-Colomban à Luxeuil où il rejoint son frère Etienne pour obtenir sa maîtrise en 1928. Il poursuit ses études aux grands séminaires de Faverney et de Besançon mais sa maladie le pénalise dans son déroulement. Toutefois, il est ordonné prêtre le 12 juillet 1937 et devient aumônier au Préventorium des Salins de Bregille de Besançon.
Carte postale du préventorium de Bregille
En 1940, il entre à l’Institut Catholique de Paris pour suivre des études de philosophie complétées à la Sorbonne. Il rejoint en 1942, le petit séminaire de la Maîtrise à Besançon où il est nommé comme Supérieur; qu’il dirigera jusqu’en 1968.
Carte postale L’ancien lieu du Petit séminaire à Besançon
Parallèlement, étant passionné par l’art sacré et sa protection, il s’engage auprès du chanoine Joseph Quinnez, le spécialiste du diocèse. En 1943, il lui succèdera comme secrétaire à la Commission Diocésaine d’Art Sacré où il va œuvrer pour conserver et restaurer le patrimoine mais aussi participer au renouveau de l’architecture religieuse. Il va être à l’initiative du choix d’artistes et d’architectes talentueux pour de nombreux projets dont celui de Notre-Dame du Haut où il va être un des acteurs principaux.
Il va aussi assurer plusieurs fonctions telles que Conservateur des Antiquités et Objets d’Art pour le Doubs, membre de la Commission Nationale Liturgique, membre de la Commission Supérieurs des Monuments Historiques pour l’épiscopat français…
Lors d’une tournée de travail avec le père Marcel Ferry, il trouve la mort dans un accident de la route à Charcennes (Haute-Saône) le 21 juin 1973.
(7) Mgr Maurice Dubourg : Le prélat est né à Besançon le 8 août 1878, ville où il va effectua toute sa scolarité, à l’Institution Sainte-Marie (futur Collège Saint-Jean) avec l’obtention de son bac de philosophie. Après son droit effectué à la faculté, il rejoint Paris pour être avocat.
En 1906, fidèle à son idéologie, il entre au Séminaire de Saint-Sulpice pour devenir prêtre; il est ordonné le 3 juillet 1909. Il est nommé vicaire à Vesoul. Mobilisé au 170ème régiment d’infanterie lors du 1er conflit mondial, il sert comme aumônier militaire et même brancardier. Il reçu la Croix de guerre et cinq citations.
Collection Les Maîtrisiens Besançon
Après un retour à Vesoul, il revient dans sa ville natale à la Direction des Œuvres de l’archidiocèse en 1919 où le chanoine va s’employer à réorganiser, susciter les vocations, créé des journaux…
Il doit à nouveau quitter Besançon pour rejoindre Marseille où il sera consacré évêque le 25 février 1929. Il y resta jusqu’en 1936 et participa au couronnement de la statue de Notre-Dame-de-la-Garde en juin 1931 par le cardinal Louis Maurin délégué par le Pape Pie XI.
Carte postale de la statue
Il rejoint à nouveau Besançon en tant qu’archevêque intronisé le 18 février 1937. A nouveau, il va dynamiser le diocèse dont la reconstruction de la Maîtrise, la création d’une chapelle au camp du Valdahon, l’ouverture d’un centre de catéchisme, la mise en chantier du Collège Saint-Joseph…
Pendant le conflit de la 2ème Guerre Mondiale, il ne se démarqua pas du gouvernement, acceptant la situation de l’occupation, ne voulant pas attiser les tensions. En 1944, l’archevêque s’était engagé de faire construire une statue monumentale dédiée à la Vierge si la ville n’était pas détruite. Sur le site du fort des Buis, une crypte surmontée d’une statue fut édifiée et inauguré le 9 septembre 1949.
Carte postale de la crypte avec la Vierge
Dès 1943, il a réactivé avec l’aide de François Mathey, la Commission diocésaine d’art sacré. Aimant les grandes manifestations, plusieurs occasions après la libération vont permettre l’organisation de réunir les paroissiens.
Avec le temps de la reconstruction, la nécessité de restaurer les édifices religieux va permettre de confier les travaux à de grands artistes avant-gardistes. Mais aussi lors de la construction de nouveaux quartiers qui est l’occasion de fonder de nouvelles paroisses avec leur église moderne dans le diocèse.
Mgr Maurice Dubourg décéda le 31 janvier 1954. Son enterrement se déroula en la cathédrale Sainte-Madeleine devant une forte assemblée civile et religieuse dont les cardinaux Maurice Feltin et Pierre-Marie Gerlier, avant d’aller reposer à Notre-Dame de la Libération.
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