Les Grandes Fêtes patriotiques de 1919 à Belfort, la journée du samedi 16 août (7e partie)
MAJ le 3 septembre 2019
Les Fêtes de la Victoire furent célébrées le 14 juillet 1919, première Fête nationale après la fin de la Première Guerre Mondiale.
Si elles se déroulèrent aussi à Belfort à cette date, elles le furent réellement du 15 au 17 août 1919, sous le titre Les Fêtes patriotiques !
Affiche de la manifestation (doc. AMB)
Car Belfort ne pouvait pas les célébrer sans ses frères Alsaciens du Haut-Rhin, pris par cette date. La municipalité décida d’organiser ces Fêtes en décalé pour que les deux parties reconstituées célèbrent ce moment douloureux de leur histoire, ensembles !
L’article, suite à la densité des informations, est traité en plusieurs parties.
Cette septième partie est consacrée à la journée du Samedi 16 août 1919.
Programme de la journée
La seconde journée des Grandes Fêtes Patriotiques de Belfort accueillit un peu de moins de monde que le Grand Cortège historique de la veille… mais le programme avait attiré toutefois une belle affluence pour profiter des belles animations prévues en ce samedi 16 août !
Si la journée était centrée sur la Fête sportive organisée au stade de l’USB, d’autres réjouissances étaient prévues, une cérémonie religieuse à la synagogue, des concerts, des spectacles à la Salle des Fêtes… et toujours feux d’artifices et bals pour clôturer.
Cérémonie religieuse
Une cérémonie religieuse eut lieu le matin à 10 heures à la Synagogue, rue des Barres (aujourd’hui rue de l’As de Carreau), à la mémoire des soldats Morts pour la France; elle fut célébrée par le rabbin Mathieu Wolff.
Carte postale Belfort La synagogue de Belfort (coll. privée)
De nombreuses personnalités militaires et civiles étaient venues à l'office.
Pour l'occasion, l'orgue était tenu par le directeur de la chorale La Concordia, M. Gauthérot et dirigeait un chœur de jeunes filles.
Concert place d’Armes
A 10 heures, débuta un concert donné par la musique du 35e Régiment d’infanterie, sur la place d’Armes devant une assistance bien fournie.
Carte postale Belfort La musique du 35e RI (coll. BF)
Elle avait mis au programme plusieurs morceaux :
- Les cadets de Brabant de Francesco Turini en allégro
- Mignon d'Ambroise Thomas à travers une sélection
- Sifflez, Pierrette, une polka originale de Francis Popy
- Hamlet d'Ambroise Thomas à travers une sélection
- Aurore, une valse de l'opéra Faust
La Fête sportive
L’Union Sportive Belfortaine (USB) avait organisé une Fête Sportive sur son stade, faubourg des Vosges, à la limite de Valdoie. Etaient associées à cet évènement, la société de gymnastique La Belfortaine et l’Harmonie de la Société Alsacienne.
Plan d’implantation du Stade de l’USB et de l’usine de rubans
Au programme des réjouissances, courses, concours sportifs et de gymnastique, exhibitions, démonstrations athlétiques… organisées par MM Charles Dochtermann, Henri Grandclaude, (Auguste) Schneider, Emile Parrot et Léon Delarbre.
La Fête Sportive s’était étalée sur toute la journée.
Plusieurs personnalités avaient honoré de leur présence la manifestation, dont le préfet Maurice Anjubault, le maire François-Xavier Houbre et des conseillers municipaux, le député Louis Viellard, les généraux Bard et Petit, des membres du Comité des Fêtes…
Athlétisme
Au programme des épreuves d’athlétismes figurait de nombreuses courses avec le 50 mètres junior, le 60 mètres adulte, le 100 mètres plats, le 200 mètres haies, le 400 mètres plats, le 600 mètres pour débutants, le 1000 mètres relais, mais aussi du saut avec le saut en hauteur et en longueur, et du lancer avec celui du disque.
Carte postale Belfort Course au stade de l’USB (coll. JM)
Elles se déroulèrent sur la journée sur deux plages horaires, de 9 à 11 heures pour les qualifications et de 14 à 17 heures pour les finales. Cette coupure permit aux qualifiés du matin d’avoir récupéré pour concourir aux marches des podiums.
Les athlètes de l’USB en tirèrent la part du Lion avec sept victoires et de nombreuses places sur les podiums. Des prix venaient récompenser les athlètes.
Palmarès épreuves d'athlétisme
50 mètres juniors (réservés aux membres de l'USB) : 1er Vogel, 2e Bouillaud, 3e Potereau
60 mètres adultes (réservés aux membres de l'USB) : 1er Guldemann avec 7'45", 2e Marthey, 3e Dadol
100 mètres plats : 1er Blanc (FC Mulhouse), 2e Cottet (RC Franc-Comtois), 2e Durin (USB)
200 mètres haies : 1er Frey-Eck (USB) avec 26"45, 2e Martz, 3e Gruss
400 mètres plats : 1er Mergy (USB), avec 58'35", 2e Gable (USB°, 3e Martz
600 m débutants : 1er Chalmey (A. S. St Joseph) en 1'35", 2e Fritsch (USB), 3e Frey-Eck (USB)
1000 mètres plats : 1er Manhès (USB) avec 2'57", 2e Escoffet (35e RI), 3e Boeglin (USB)
1000 m relais : 1ère USB Equipe B (avec Meyer, Gable, Brucken et Mergy) en 2'15'', 2e USB Equipe A,
Lancement du disque : 1er Hug (SRB) avec 30,45 m, 2e Gruss (USB) avec 30,15m, 3e Frey-Eck.
Saut en longueur : 1er Frey-Eck (USB) avec 6,28 m, 2e Hug (SRB) avec 6,19 m, 3e Collet (RC Franc-Comtois)
Saut en hauteur : 1er Chapuis (USB) avec 1,80 m, 2e Durin avec 1,57 m, Frey-Eck avec 1,53 m
Gymnastique
Pendant ces épreuves, se déroula parallèlement le concours de gymnastique.
Carte photo Belfort Exercices de gymnastique (coll. BF)
Palmarès de l'épreuve :
1er Pierre Parrot (La Belfortaine) avec 75 points,
2e Danguel (Espérance Audincourt) avec 72,50 points,
3e René Schueller (Milhusina Mulhouse) avec 72,25 points,
4e Leininger (La Belfortaine) avec 72 points
5e Guerinot (Union Fesches le-Châtel) avec 70,75 points
Eurent lieu aussi des démonstrations de culture physique par les pupilles de l’Union Sportive Belfortaine sous la direction de l’adjudant Durion.
Autres disciplines
Entre des épreuves, se déroula un ensemble de démonstrations comme de la lutte, de la boxe et de l’escrime.
Fête musicale
Parallèlement à la Fête Sportive se déroula une Fête musicale.
Il était proposé au publique, à la Salle des Fêtes, un programme autour de la comédie et de la chanson dont le prix des places s'étalait de 1 à 3 francs suivant l’emplacement choisi.
Au programme, la comédie militaire avec ‘’Loriot’’ écrite par Maurice Devilliers et un propos en 4 actes ‘’Le jour de gloire est arrivé’’ de Léonce Armbruster.
La page de garde du recueil Loriot
Pour la partie musicale, les artistes étaient Mme Myrtille Hubert du Théâtre Fémina, Mlle Suzanne Boehler des Chanteurs de Saint-Gervais, Mlles Wirtz et Charlot, M. Cordier des Concerts de Paris, le baryton d’opérette M. Bibard et le Trio Alsaciens.
Entre-autres, Mlle Suzanne Boehler interpréta une vieille chanson "Vous n'aurez pas l'Alsace et la Lorraine" en détournant ces paroles en "Vous n'aurez plus l'Alsace et la Lorraine" !
Côté comédie toujours, avec les comiques troupiers MM. Bazas et Marquel, et les belfortains Clément Max et G. d’Eyzac.
M. Cordier déclama "L'hymne aux morts" de Charles Péguy.
Le spectacle se termina avec des chants et des danses alsaciennes.
Le public apprécia le programme varié concocté et déchaina ses applaudissements.
Lunch à la préfecture
Comme la veille, était organisée une réception à 17 heures à la Préfecture. Maîtres de cérémonie, le couple, M. Maurice Anjubault et son épouse offrait un lunch aux autorités civiles et militaires, mais aussi aux artistes de la Comédie Française qui devaient donner un spectacle en soirée, Mmes Dussane et de Chauveron, ainsi que Jean Croué et Decard.
Carte postale Belfort La Préfecture (coll. BF)
Avec le couple invitant, leur grande fille Colette et leur toute petite fille, âgée de 2 ans, dénommée Victoire en tenue alsacienne !
Parmi les autorités présentes, les généraux Brad et Petit avec son épouse, le capitaine Berger, le 1er adjoint faisant fonction de maire, François-Xavier Houbre, le président du Comité des Fêtes, Louis Jeanneret … et des personnes de la Préfecture.
La presse était aussi présente avec le rédacteur en chef de l'Alsace, Joseph Pelot, le rédacteur à L'Alsace, J. Noury, le rédacteur du Petit Comtois, Cordelier et le rédacteur en chef de La Frontière, Frédéric Beucler.
Carte postale Belfort Manchettes des journaux locaux (coll. JM)
La ville en fête
Une partie de la foule non attirée par les attractions sportives ou culturelles, déambulait dans la ville en s’émerveillant des décorations, s’arrêtait dans les cafés quand il y avait de la place… profitant de cette belle journée sous un soleil de plomb.
Carte postale Place Corbis, entrée du faubourg de France (coll. JM)
Dans cette foule, circulaient de charmante alsaciennes qui quêtaient et vendaient des cartes postales au profit de la reconstruction du village de Steinbach, commune près de Cernay.
Carte postale Steinbach, détruit lors de la 1ère Guerre Mondiale (coll. privée)
Les belfortains et visiteurs pouvaient aussi profiter des fêtes foraines installées sur le Champ de foire et la place du Marché, pour la plus grande joie des enfants… et des grands. Les forains voyaient leurs poches se remplir !
Grand Gala
De nouveau à la Salle des Fêtes, un spectacle était proposé à 20h30 comprenant une partie comédie et une partie musicale.
Affiche annonçant le Gala (coll. AMB)
Malgré l'affiche, bien des sièges étaient restés vides ! Il est vrai que la météo favorisait les animations se déroulant à l'extérieur que celles effectuées en étant enfermées dans une salle…
Au Gala, était présent de nombreuses personnalités civiles et militaires accompagnées de leur épouse dont ceux qui avaient répondu à l'invitation du préfet et de son épouse, en venant l'après-midi à la préfecture, une partie dans les fauteuils du balcon et l'autre partie en intervenant sur la scène.
Le programme de ce Gala se déroula en alternant musique et comédie.
Extrait journal La Frontière
La partie comédie était présentée par les quatre sociétaires de la Comédie française présents au lunch de la préfecture, Mmes Dussane et de Chauveron, ainsi que MM Jean Croué et Decard.
Ils proposèrent des poésies, des fables, des monologues et les pièces "Tic et Tic" de Maurice de Féraudy et "La Paix chez soi" de GeorgesCourteline.
Extrait d’une FDC sur Georges Courteline
La partie musicale permis d’écouter le "Quintette op. 55" pour piano et cordes d'Antonin Dvorak exécuté avec plein d’entrain par MM. Lucien Morawick au piano, le fils du directeur de la Lyre Belfortaine, accompagné par MM. Armand Bernard au violon, Courquin, Fontenelle et Guigou au violoncelle.
Cette pièce fut suivie du "Trio" pour piano et cordes de Joseph Haydn interprété par MM. Lucien Morawick toujours au piano, Armand Bernard et Guigou.
Le violoniste Armand Bernard démontra une belle justesse dans son accompagnement mais il affirma tout son talent quand il interpréta "L'Aria" de Jean-Sébastien Bach ou "La Berceuse" de Gabriel Fauré.
Un grand moment fut aussi la prestation du l'excellent Louis Nucelly de l'Opéra qui va subjuguer l'auditoire par sa voix de baryton. Il interpréta avec maestria plusieurs pièces dont "Les Berceaux" toujours de Gabriel Fauré, "Jolie fille de Perth" de Georges Bizet, le "Cor" d'Ange Flégier … il termina son récital par la Marseillaise qui fit lever la salle et chanter les spectateurs.
Le baryton Louis Nucelly (coll. privée)
A l’écoute des applaudissements, cette partie musicale fut apparemment plus appréciée par les spectateurs présents dans la salle, que par la partie comédie.
A l’entracte, une quête au profit des régions libérées et de la ville de Lille* fut réalisée. La fille du préfet, Colette Anjubault et Mlle de Chauveron accompagnées de deux sous-lieutenants dont Robert Jeanneret du 89e Régiment d’artillerie furent de ce service. Elle rapporta la somme de 483 francs. Fut aussi vendu le programme des Fêtes.
*Lille : Ville où était en fonction précédemment le préfet Anjubault, avant de prendre son poste à Belfort en mars 1919.
Carte postale Belfort Salle des Fêtes (coll. JM)
La recette réalisée pour cette animation fut donc bien loin du montant escompté, environ de moitié au grand dam des organisateurs qui pensaient avoir de l'attractivité avec cette affiche… Mais cette dernière ne mettait pas trop en avant la partie concert qui fut en réalité, la plus appréciée !
La Fête de Nuit
A partir de 21 heures au Stade de l'USB, grâce à un éclairage puissant mis en place par la SACM (Société Alsacienne de Constructions Mécaniques) et le courant fourni par la société Valdoyenne de fabrication de ruban de soie, une Fête de la nuit permit de découvrir d’autres démonstrations de gymnastique, de lutte et de boxe, et le tournoi des soldats de l’An II qui fut particulièrement apprécié à l’unanimité, car il fut très bien exécuté.
Il fut suivi du Chant du départ.
Plan d’implantation du Stade de l’USB et de l’usine de rubans
Toutes ces démonstrations étaient accompagnées par la musique du 42e Régiment d’infanterie qui exécutait de nombreux morceaux de leur répertoire fortement appréciés par le public bien présent pour applaudir sportifs et musiciens.
Quelques morceaux interprétés :
- Marche Gasconne de Lacombe
- Egmont (ouverture) de Ludwig Von Beethoven
- Scènes bohémiennes (Prélude, Sérénade et Marche) de Bizet
- Lakmé (Fantaisie) de Léon Delibes
- Polonaise de Paul Vidal
Carte postale Musique 42e Régiment d’Infanterie (coll. JM)
La soirée se termina par un bal sur ce même terrain qui alla jusqu’au bout de la nuit car l’orchestre sut proposer aux danseurs, un programme varié et dynamique, fort apprécié, mélangeant morceaux classiques et modernes.
La Fête Sportive fut une grande réussite grâce à la volonté des organisateurs de présenter un beau plateau d’activités variées où le sport fut roi.
Concerts dans la ville
Pendant ces fêtes, de nombreux concerts avaient lieu à l’initiative des groupes musicaux civils et militaires comme celui qui se déroula au square place des écoles dans le faubourg de Montbéliard, ce samedi à 20h30.
Carte postale Square des Ecoles (coll. JM)
La Lyre Belfortaine proposa un beau concert qui fut très applaudi par le public très à l’écoute des partitions musicales interprétées par la formation.
Carte postale Lieu ??? La Lyre Belfortaine (coll. JM)
Question : Quelle était cette ville où fut photographiée la Lyre Belfortaine ?
Finir la soirée…
Comme chaque soirée, les badauds pouvaient profiter des illuminations, des feux d’artifices, de la fête foraine et des bals en différents lieux dont celui organisé à la Brasserie Danjean, à l’entrée du faubourg de Montbéliard, qui était toujours attractif.
Carte postale Brasserie Danjean (coll. JM)
Les danseurs virevoltèrent jusqu'au bout de la nuit… voire jusqu'au petit matin.
Epilogue
Ainsi se terminait cette deuxième journée des Grandes Fêtes Patriotiques qui avaient proposé une belle diversification des attractions. Elle fut sportive, culturelle et musicale.
Chacun pouvait y trouver son bonheur parmi les programmes proposés et profiter de la décoration de la Cité du Lion.
Qu’allait nous proposer la dernière journée, celle du dimanche 17 août ?
JM
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La 8e partie de l’article, le dimanche 17 août : Cliquer ici
Références textes : Dossier sur les Fête patriotiques des Archives municipales de Belfort (AMB), les journaux La Frontière et L’alsace (collection Archives Départementales du 90 ‘’AD90’’), Magazine Vivre le Territoire, Brochure du programme officiel (doc. AD90)
Référence Web : Wikipédia
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