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LE CARTOPHILION
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16 juillet 2022

Tour de France 1922, Belfort ville de passage

Lors de l'année de création officielle du Territoire de Belfort, le Tour de France 1922 a traversé le département… sans s'arrêter à Belfort !

Le décret de sa création fut signé 18 février 1922.

Pour la quatrième année consécutive, la Cité du Lion n'était que ville de passage, elle qui fut ville étape de nombreuses années avant la Première Guerre Mondiale.

Tour de France 1922 Carte parcours L'Auto

Carte du parcours Journal L'Auto (doc. Gallica, BNF)

Pour cette 16e édition du Tour de France, toujours organisé par le journal L'Auto, les coureurs partis de Genève traversèrent le Territoire de Belfort pour rejoindre Strasbourg.

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder au Sommaire des articles consacrés au Tour de France et aux articles liés à cette épreuve cycliste.

Un petit re Tour sur le passé du Tour

Les routes du Territoire de Belfort furent incontournables pour le parcours du Tour de France; dès sa 3e édition, en 1905, l'organisateur, le journal L'auto mit au programme des coureurs, comme premier col à franchir celui du Ballon d'Alsace !

Il en fut de même l'année suivante, en 1906.

Les coureurs s'arrêtèrent tout de même à Belfort car ils devaient signer la feuille de présence à la table du contrôle fixe. Elle était installée au Grand Café Central situé, dans l'immeuble de l'Hôtel de l'Ancienne Poste, place Corbis.

Belfort CPA Fbg France n°2a Grand Café Central

Carte postale Belfort Grand Café Central (coll. JM)

A partir de 1907, Belfort prit du galon en devenant ville étape; elle le resta jusqu'à 1914, avec toujours le Ballon d'Alsace au programme. En 1913 et 1914, le sens du Tour fut inversé, mettant le Ballon d'Alsace après Belfort, en direction de Longwy !

La Première Guerre Mondiale va indirectement rabattre les cartes dont celles du parcours du Tour, car à partir de 1919, la Cité du Lion ne fut plus que ville de passage et le Ballon d'Alsace n'est plus escaladé !

L'Alsace redevenu française, le Tour ne fit que traverser le département pour rejoindre ceux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, l'arrivée étant à Strasbourg.

Le Tour de France 1922

Le parcours de 16e édition du Tour fut très légèrement modifié de celui de 1921; un seul changement de ville étape, Briançon remplaça Grenoble. Cette modification fit arriver deux nouveaux cols dans cette compétition, les cols de Vars et de l'Izoard.

Le Tour de France 1922 se déroula du 25 juin au 23 juillet, avec au programme 5375 kilomètres à effectuer en 15 étapes, entre Paris… et Paris, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, d'Ouest en Est.

Carte Tour de France 1922R

Carte du Tour de France 1922 (réalisation BF)

Comme pour les éditions précédentes, un jour de repos était prévu entre chaque étape.

Les participants

Au 20 juin, à la fermeture des engagements, 139 coureurs (28 + 111) s'étaient inscrits à cette édition. Ils ne furent que 120 coureurs à prendre le départ; ils étaient répartis dans deux groupes; 26 dans le groupe des Premières classes pour les coureurs dit d'expérience et 94 dans celui des Deuxièmes classes. Il n'y avait pas d'équipe, la course était en individuel, imposée par le règlement.

Le départ était prévu depuis Argenteuil le 26 juin.

CPA Argenteuil

Carte postale Souvenir d'Argenteuil (coll. privée)

Les coureurs étaient majoritairement français et belges, il y avait aussi 12 italiens, un luxembourgeois, un monégasque et un suisse.

Concernant les favoris pour cette édition, il y avait bien entendu le vainqueur de l'année précédente, le belge Léon Scieur mais aussi son compatriote Philippe Thys, qui avait réalisé un triplé avec ses victoires en 1913, 1914 et 1920.

Article Léon Scieur R

Article presse Léon Scieur (coll. privée)

Du côté des français, la victoire finale pouvait tendre ses bras à Honoré Barthélémy, 3e en 1921, mais aussi Jean Alavoine, 2e en 1919 et Eugène Christophe*, 3e en 1919.   

Fiche Eugène Christophe R

Fiche Eugène Christophe (coll. privée)

*Eugène Christophe fut le premier porteur officiel du Maillot jaune, attribué lors du Tour de France 1919.

Mais un autre coureur pouvait sans être attendu, ravir la tunique jaune !

Les marques

Pour ce Tour, les marques étaient revenues mais pas en formation d'équipe mais en support de coureurs. On retrouvait Alcyon, Armor, Automoto, Labor, La Française, Peugeot et Thomann.

La marque Peugeot avait engagé 11 routiers pour tenter de remporter l'épreuve dont trois ténors avec Philippe Thys, Jean Alavoine et Firmin Lambot, ainsi que de bons rouleurs Léon Scieur, Romain Bellenger, Jacquinot, Tiberghien, Despontin, Dhers, Muller, Gaston Degy, Louis Heusghem…

Cycle Peugeot R

En-tête Cycles Peugeot

Quelques points du règlement

Pour participer à cette compétition, les coureurs devaient payer un droit d'inscription 

   - 1ère classe : 1000 francs donnant droit au ravitaillement durant toute la course
   - 2e classe : 20 francs

Le coureur de 2e classe touchait 20 francs par jour à condition d'être présent à l'étape de Cherbourg. Il ne pouvait pas utiliser une bicyclette référencée "1ère classe".

Les coureurs ne devaient utiliser qu’une seule bicyclette par ailleurs poinçonnée (marquage du numéro d’inscription) au pédalier, à la tête de fourche et aux moyeux des roues. Un plomb était fixé à la plaque fixée sur le cadre, où était le numéro (noir sur fond blanc) attribué au concurrent lors de son inscription.

1920 06 10 Tour Plaque de Vélo L'Auto R

Format de la plaque réglementaire (doc L'Auto, Gallica BNF)

Les coureurs devaient courir en individuels, donc pas d’entreaide…Le coureur était seul lors des courses, non accompagné donc sans soigneur, entraîneur, mécanicien… seulement autorisés aux étapes, mais qui devaient être agréés par l'organisation, avant le départ du Tour.

Les as de la bicyclette devaient effectuer les réparations eux-mêmes. En cas de problème mécanique grave avec une bicyclette, le coureur peut en utiliser une autre, mais de marque différente. La voiture balai la ramassant pour la livrer à la ville d'arrivée pour permettre sa remise en état car elle devait être utilisée pour le prochain départ.

1922 07 16 Tour de France L'Auto 2R Pub Dunlop

Publicité Dunlop (doc L'Auto, Gallica BNF)

Le coureur ne pouvait être ravitaillé par un tiers, il devait prendre ses dispositions pour effectuer l'étape ou se ravitailler par ses soins sur le parcours comme par exemple, aller à une fontaine pour remplir sa gourde.

Le classement général était établi en comptabilisant les temps réalisés lors des 15 étapes.

Il va sans dire mais il était écrit que tout non-respect du règlement entraînait des pénalités (temps, argent…) voire l'exclusion.

Prix officiels distribués par L'Auto

Bien entendu, ce Tour de France comme les précédents était doté de nombreux prix attribués par l'organisateur, suivant les résultats des coureurs pour un montant total de 79 0800 francs.

Classement de chaque étape

    Coureurs de 1ère classe

Pour le classement de chaque étape, il était attribué un prix aux neuf premiers coureurs du Groupe 1ère classe (1000, 700, 500, 300, 200, 3 x 100 et 80 francs).

    Coureurs de 2e classe

Comme pour les 1ères classes, les coureurs de la 2e classe, il était attribué des prix, seulement trois et de valeurs moindres (200, 100 et 60 francs) pour chaque étape aux trois premiers coureurs.

1922 06 01 Tour de France L'Auto 1R

Classement général

    Coureurs de 1ère classe

Pour le classement général, il était attribué un prix aux 21 premiers coureurs du Groupe 1ère classe (10000, 5000, 2500, 1500, 1000, 800, 600, 500, 400, 300, 200, 10 x 100 francs).

    Coureurs de 2e classe

Sept prix étaient prévus aux sept meilleurs coureurs de 2e Classe du classement général (2000, 1000, 600, 400, 200 et 2 x 100 francs). 

Sommes complémentaires (article 80)

Le règlement prévoyait que 50% des sommes gagnées pouvaient être déduites si les coureurs recevant les prix, abandonnaient ! La décision revenait au directeur de la course en fonction de la situation de l'abandon. Le montant redistribué était réparti ainsi

   - 40% au premier
   - 20% au deuxième
   - 12% au troisième
   - 8% au quatrième
   - 5% au cinquième

Les 15% restant étant distribué, à part égales, entre tous les autres franchissant la dernière ligne d'arrivée.

1922 06 21 Tour de France L'Auto 1R

Prime de présence

20 francs par jour de présence étaient attribués aux coureurs de 2e classe n'ayant pas acquis au moins 600 francs de prix, donc 300 francs.

Challenge

Le vainqueur final recevait le Challenge offert par le magazine illustré La Vie au Grand Air.

Diplôme

Il était attribué un diplôme à tous les coureurs terminant le Tour.

Autres prix

A ces prix, d'autres étaient liés à des dons (sociétés, commerçants, villes, individus…); ils étaient fort nombreux et certains de belles valeurs.

Par contre, une règlementation était en place pour les encadrer (que numéraire, conditions d'attribution faciles à déterminer…).

Belfort, ville de passage du Tour 1922

Comme écrit plus haut, Belfort après avoir été ville étape de 1907 à 1914, devint ville de passage après la fin de la Première Guerre Mondiale, à partir de 1919.

Le lundi 17 juillet 1922, Belfort et le Territoire étaient à nouveau sur le parcours du Tour de France, lors de la 12e étape.

CPA Belfort Un bonjour

Carte postale Un bonjour de Belfort (coll. privée)

Les coureurs rejoignaient Strasbourg depuis Genève, en passant par le col de la Faucille, Morez, Pontarlier, Morteau, Montbéliard, Belfort, Mulhouse et Colmar.

Paris, départ le 25 juin de la 16e édition

Le Tour de France 1922 n'eut plus comme lieu de regroupement des concurrents à Paris, sur la place de la Concorde, mais il fut déplacé à Luna-Park, porte Maillot, pour éviter les débordements du public difficilement canalisables sur la place de l'obélisque.

CPA Paris Luna Park

Carte postale Paris Luna Park (coll. privée)

Le rendez-vous fut donné le samedi 25 juin à minuit, à tous les concurrents devant émarger la feuille de contrôle et recevoir le dossard. Ces opérations furent effectuées sous la direction de Charles Ravaud de L'Auto. Il était assisté du président du Vélo Club de Paris, XXX Delaporte, de deux autres membres, Camille Gauthier et XXX Pressurot.

Une foule considérable, malgré l'heure tardive, était venue pour voir et applaudir les coureurs, tant à l'intérieur du Luna Park qu'à l'extérieur, obligeant les organisateurs à trouver une sortie autre que celle prévue initialement, pour rejoindre la ligne de départ réelle !

1922 06 24 Tour de France L'Auto 1 Titre

À 1h10, après l'appel écourté, n'ayant pu être effectué complètement, les concurrents se rendirent au pont d'Argenteuil, par la route de la révolte, le boulevard Victor Hugo, les quais, le pont Bineau, Courbevoie et Colombes, en suivant la voiture officielle dans laquelle se trouvait Charles Ravaud et le commissaire de l'épreuve, André Trialoux.

Tout le long du parcours, une double haie de spectateurs fit que les coureurs avaient du mal d'avancer… que dire au pont d'Argenteuil ! Charles Ravaud, dès que les coureurs furent regroupés, tira le coup de révolver pour libérer les forçats de la route pour un parcours de 5375 kilomètres pour rejoindre… Paris, le 23 juillet. Il était 2 heures trente.

CPA Argenteuil Le pont

Carte postale Argenteuil Le pont (coll. privée)

Au fil des kilomètres, la taille du peloton se réduisit peu à peu… au passage à Mouy (68e km), un peloton d'environ 50 unités était emmené par Honoré Barthélémy. Un groupe de 13 coureurs, était déjà à plus de 4 minutes; à leur tête Robert Jacquinot et Hector Tiberghien.

La pluie vint se mêler à la course. Peu avant six heures, à Montdidier (114e km), le groupe qui menait n'avait maigri que de 3 unités. De même à Abbeville (204e km), il possédait encore 40 coureurs emmenés par le 2e classe Jules Matton.

CPA Abbeville

Carte postale Abbeville (coll. privée)

Il fallut attendre le passage dans la ville de Dieppe (259e km) pour voir le groupe menant la course, passer en étant un peu échelonné, avec Eugène Christophe, Arsène Alancourt, Robert Jacquinot et Victor Lenaers, avec une minute d'avance sur Félix Sellier, Federico Gay et Jean Alavoine, à 2 minutes, Jean Rossius et Léon Scieur, puis …

Eugène Christophe et Robert Jacquinot vont lâcher Arsène Alancourt et passer avec 10 minutes d'avance sur plusieurs petits groupes séparés, à Saint-Valéry-en-Caux (287e km). Le premier était composé de Jean Rossius, Léon Scieur, Romain Bellenger, Hector Tiberghien, Federico Gay, Gaston Degy, Philippe Thys, Félix Sellier et Léon Despontin.

Toujours un temps exécrable, le duo poursuivant leurs efforts, passa à Fécamp (335e km) avec 12 minutes de marge sur le groupe qui avait maigri à 6 unités, ayant lâché Philippe Thys, Gaston Degy et Federico Gay.

CPA Fécamp

Carte postale Souvenir de Fécamp (coll. privée)

Avant Étretat, Eugène Christophe va crever, laissant partir seul son adversaire vers une victoire potentielle !

L'arrivée au Havre (388e km) s'effectuait toujours sur le boulevard François 1er où avaient pris place de très nombreux spectateurs, la foule des grands jours. Une tribune d'honneur avait été dressée pour accueillir les notables, à la hauteur de la ligne.

Profitant de cette opportunité, Robert Jacquinot va s'offrir la victoire, après avoir couru pendant 15h 11mn 48s.

CPA Robert Jacquinot

Carte postale Robert Jacquinot (coll. privée)

Il devança Eugène Christophe de 8 minutes et de 14 minutes un quatuor, réglé au sprint par Jean Rossius pour la 3e place, devant Félix Sellier, Hector Tiberghien et Léon Scieur.

Le premier 2e classe fut Guillaume Nyssen qui prit une belle 13e place.

1922 06 27 Tour de France L'Auto 2 Guillaume Nyssen R

Guillaume Nyssen (Journal L'Auto, Gallica BNF)

Le classement général était, bien entendu, une copie conforme du classement de l'étape.

Seuls 102 coureurs franchirent la ligne d'arrivée.

Passons quelques étapes...

12e étape, départ de Genève

Le 17 juillet, au départ de Genève, le peloton ne comprenait plus que 39 unités, dont 16 coureurs de la première classe et 23 de la deuxième.

CPA Genève

Carte postale Genève (coll. privée)

Jean Alavoine était le leader du classement général depuis l'arrivée à Perpignan, lors de la 7e étape, après avoir remporté 3 étapes d'affilée; il devançait Firmin Lambot et Hector Heusghem.

Pour cette 12e étape entre Genève et Strasbourg, les coureurs avaient au programme 371 kilomètres à parcourir pour rejoindre la ville d'arrivée alsacienne; la seule vraie difficulté était le col de la Faucille (1322 mètres), placé au 27e kilomètre.

Le départ, le 17 juillet

Après une journée de repos bienvenu en Suisse, suite à l'étape Briançon-Genève qui fut difficile vu les difficultés au programme, les cols du Galibier, d'Aravis… renforcées par une pluie glaçante et épouvantable sur toute la durée de la course… les coureurs quittèrent la capitale helvétique à 2 heures du matin.

Comme l'année précédente, le départ fut donné rue de Montbrillant devant la brasserie, aux 39 concurrents rescapés. Auparavant, ils étaient passés au poste de contrôle installé au Grand Café Lyrique, boulevard du Théâtre, pour émarger la feuille de présence.

Les coureurs s'étaient équipés de leur pélerine car la pluie était présente pour leur départ et serait omniprésente sur tous le parcours…

CPA Genève Place Montbrillant

Carte postale Genève Place Montbrillant (coll. privée)

Rapidement transis, ils passèrent le col de la Faucille relativement groupés, hormis un groupe qui se détacha pour passer à Morez (37e km) avec 11 minutes d'avance; composé de 27 unités, on trouvait l'Alsacien Joseph Muller, Eugène Christophe, Daniel Masson, Jean Alavoine…

À 7h45, les premiers coureurs arrivèrent à Pontarlier (88e km), le groupe s'était amoindri, ne possédant plus que 17 unités emmenés par Jean Alavoine, Eugène Christophe, Firmin Lambot… le froid et la pluie avait sélectionné les plus endurants ! Le 2e groupe était à un quart d'heure avec Philipe Thys.

CPA Pontarlier

Carte postale Pontarlier La Grande rue (coll. privée)

Malgré ce temps à ne pas mettre un chat dehors, le public était présent au passage de ces routiers, les applaudissements réchauffaient les mains des spectateurs et les cœurs des coureurs.

Peu d'évolution des compositions des groupes dans la suite de l'étape.

Montbéliard (200e km) fut atteint peu avant midi par un groupe formé de 23 coureurs. Là aussi le public fut nombreux pour accueillir les routiers.

CPA Montbéliard Souvenir

Carte postale Souvenir de Montbéliard (coll. privée)

À Châtenois, les coureurs entraient dans le tout nouveau département officiel du Territoire de Belfort, à destination de la Cité du Lion. Un peu frustré, sa majesté, de ne les voir que passer !

CPA Chatenois les Forges

Carte postale Châtenois des Forges (coll. privée)

Poursuivant leur route par Trétudans, puis Danjoutin pour aborder la Cité du Lion par le faubourg de Montbéliard.

Belfort, au 217e kilomètre

L'organisation belfortaine bien rodée à cet exercice, pilotée par le correspondant du journal L'Auto, Charles Chaussin, avait installé la table de contrôle, au café des Halles quai Vauban, dès 10 heures du matin; le passage était prévu à 11h30.

Belfort CPhoto Restaurant Charles Quai Vauban

Carte photo Belfort Café des Halles (coll. JM)

Il était assisté du président du VCB (Vélo Club Belfortain), Albert Schneitter et de plusieurs de ses membres dont Robert Baumgarten le vice-président, M. Prévot, A. Gregber, Gerber, A. Lienemann, Petitjean, Galli, Operiol, Laslaz, Schleger, Vaschetti, Voltz, Fulleringer, Cretin, Sudre…

La foule s'était installée sur le parcours avec une proportion importante sur ce quai pour tenter de voir les As de la route. Le service d'ordre était placé sous la responsabilité de XXX Parenty; les agents avaient des difficultés à contenir les spectateurs pas toujours disciplinés, à rester sur les trottoirs.

Pas de coureur local pour cette édition mais le club du VCB avait toutefois organisé une quête pour Georges Kamm, un de leurs anciens sociétaires, installé à Troyes; sa côte était bonne, car elle lui rapporta 223,60 francs.

Belfort VCB Carte membre

Carte de membre du VCB (coll. JM)

Il fallut attendre jusqu'à 12h30 pour voir arriver la voiture ouvreuse, où était présent Robert Desmaret qui annonça que les coureurs étaient à une quinzaine de minutes. Le retard était dû à une météo exécrable sur une grande partie du début de la course, mais à Belfort, le soleil était revenu, timidement mais présent.

Il fut décidé de supprimer la signature à la table de contrôle, au grand dam des spectateurs ayant pris place vers le commerce… ce qui fit que les coureurs ne firent, vraiment que... passer !

Après le faubourg de Montbéliard, le parcours intra-muros empruntait le pont Carnot, puis le quai Vauban où était prévu initialement le contrôle.

Carte tour de France 1922 R

Parcours du Tour dans Belfort (réal. BF)

À 12h45, le premier groupe bien fourni, donc poursuivit sa course; il comprenait entre-autres Joseph Muller, Arsène Alancourt, Firmin Lamblot, Rossius, Georges Kamm, Pierre Hudsyn, Louis Heusghem, Joseph Pelletier, Eugène Christophe. Par contre, Jean Alavoine qui avait crevé, passa avec 3 minutes de retard tentant de revenir sur les échappés.

Il fallut attendre 15 heures pour applaudir de dernier coureur.

La suite du parcours s'effectuait via la rue de la Laurencie, le faubourg de Brisach, passant devant le cimetière des Mobiles en direction de L'Alsace par la route de Roppe et quittant le Territoire de Belfort après le passage à Lachapelle-sous-Rougemont.

Etiquette Bière Lachapelle sous Rougemont

Étiquette Bière de Lachapelle-sous-Rougemont (coll. privée)

Le brasseur avait-il préparé des verres pour arroser l'officialisation du nom de baptême pour le Territoire de Belfort ? Ou pour un peu se faire mousser ?

En direction de Strasbourg

Pour la quatrième année consécutive, le Tour de France revenait sur les terres alsaciennes reconquises et revenues au sein de la Patrie française; L'Alsace fut annexée en 1871 par les allemands lors du Traité de Francfort. La roue avait tournée.

1922 07 17 Tour de France L'Auto 1R Alsace

 Annonce Journal L''Auto (coll. Gallica, BNF)

À nouveau, les alsaciens et alsaciennes étaient nombreux au bord des routes. La foule des grands jours, à Mulhouse (258e km), attendait avec impatience les forçats de la route, pour les applaudir chaleureusement. Mais un vent violent retarda leur arrivée… 

CPA Mulhouse Souvenir

Carte postale Un souvenir de Mulhouse (coll. privée)

Il revint à Félix Sellier d'être le premier à entrer dans la ville, devançant le strasbourgeois Joseph Muller qui fut fortement acclamé, lui donnant un second souffle et une énergie nouvelle pour appuyer sur les pédales. Le contrôle était à la hauteur du café Mitschy. Suivait un quatuor avec Émile Masson, Jean Rossius, Firmin Lamblot et Jules Matton. Puis vinrent, pas vraiment de peloton, mais plutôt des petits chapelets de coureurs. Jean Alavoine était toujours dans le dur !

Après Mulhouse, Colmar (274e km) attendait aussi avec impatience les coureurs. Arriva, peu après 15 heures, le duo en tête avec Émile Masson et Joseph Muller; ce dernier avait tenté de partir seul bien entre les deux villes, sans succès. Ils étaient suivis à 2 minutes par Jean Rossius, à 3 minutes par Firmin Lambot, Léon Despontin et Hector Tiberghien…

CPA Colmar Pensée

Carte postale Une pensée de Colmar (coll. privée)

Jean Alavoine, le leader du classement général était relégué à 27 minutes.

L’arrivée à Strasbourg

Après 1919, 1920, 1921, Strasbourg était à nouveau, ville d'arrivée en 1922. Le final fut prononcé sur le vélodrome du Parc des Sports de Schiltigheim.

CPA Strasbourg Souvenir

Carte postale Souvenir de Strasbourg (coll. privée)

Dès 14 heures, plus de deux heures avant l'heure prévue de l'arrivée des coureurs, le lieu fut envahi par les spectateurs écoutant les annonces du speaker sur le déroulement de l'étape où l'enfant de la ville, Joseph Muller jouait les premiers rôles.

Pour faire patienter le public, des courses étaient organisées, de vitesse et de demi-fond.

Il revint à Joseph Muller d'entrer le premier sur le vélodrome sous l'acclamation du public en effervescence… mais Émile Masson était dans sa roue ou presque ! Deux tours de piste étaient prévus. Malgré sa puissance, le strasbourgeois dut laisser la victoire à son adversaire, Émile Masson, plus fort sur ce type d'exercice !

CPA Émile Masson

Carte postale Émile Masson (coll. privée)

Pour rejoindre Strasbourg, le duo avait roulé pendant 15h 12mn et avait relégué leurs deux poursuivants à 15 minutes, Jean Rossius et Hector Heusghem, dans cet ordre.

Georges Kamm termina 25e à Strasbourg à plus deux heures, à quelques secondes près.

Classement général

Le leader de la course, Jean Alavoine en galère toute la journée suite à plusieurs crevaisons et des sauts de chaînes, arriva avec plus de 37 minutes de retard sur le duo vainqueur. La conséquence fit qu'il perdit la première place, la laissant à Hector Heusghem.

CPA Hector Heusghem

Carte postale Hector Heusghem (coll. privée)

Même Firmin Lambot lui passa devant; il restait tout de même sur le podium.

Sautons à la dernière étape...

Dernière étape : Dunkerque - Paris

Le 23 juillet au départ de Dunkerque, il ne restait plus que 38 rescapés sur les 120 coureurs au départ à Paris, 16 Première Classe et 22 Deuxième Classe, pour effectuer les 340 derniers kilomètres et rejoindre Paris.

CPA Dunkerque Souvenir

Carte postale Un souvenir de Dunkerque (coll. privée)

Au départ de cette dernière étape, le Maillot jaune était sur les épaules de Firmin Lambot, avec une marge 43mn 53s sur Jean Alavoine et 44 mn 40s sur Félix Sellier; donc la première place était plutôt bien accrochée, mais pas la seconde !

Le départ de cette dernière fut donné à 2 heures du matin, à la hauteur du Café des Arcades, place Jean-Bart, en présence d'un nombreux public pour encourager les 38 coureurs rescapés.

CPA Dunkerque Place des Arcades

Carte postale Dunkerque Place des Arcades (coll. privée)

Les coureurs avaient décidé de ne pas trop appuyer sur les pédales au début de la course, la preuve, à Calais (42e km), seul l'italien Federico Gay n'était pas dans le groupe… à une minute. De même à Boulogne-sur-Mer (82e km), le peloton comprenait toujours 37 coureurs emmenés par Jean Alavoine.

Il faut attendre Abbeville (163e km), pour voir un peloton amaigri d'une dizaine d'unités. La course va se décanter après les 200 premiers kilomètres. Calais (242e km) fut atteint à 13 heures, par un groupe où se trouvaient les trois leaders du classement général.

À Poissy (314e km), la course était enfin sérieusement enclenchée car il n'y avait plus que 13 coureurs devant, Gaston Dégy, Jean Alavoine, Alancourt, Eugène Christophe, Victor Lenaers, Joseph Pelletier, Hector Heusghem, Joseph Muller, Jules Nempon, Federico Gay et Firmin Lambot.

L'arrivée à Paris ne s'annonçait pas sur de beaux hospices météorologiques, car la matinée fut très pluvieuse ! Au début de l'après-midi, le soleil fit une échappée brève entre les nuages. Le peloton de ceux-ci régulait… les autorisations d'éclaircies.

Comme pour les années précédentes, il revint au vélodrome du Parc des Princes à Boulogne, de recevoir le final du Tour de France 1922, avec un tour complet après le premier passage de la ligne. Malgré le temps pas au jaune, l'enceinte avait fait le plein de spectateurs.

CPA Boulogne Parc des Princes

Carte postale Boulogne Vélodrome Parc des Princes (coll. privée)

En attendant les coureurs, plusieurs courses furent organisées (Prix d'encouragement, Prix du Galibier, Match international de vitesse et Prix du Tour de France), pour faire patienter le public.

La 15e étape proposa un beau sprint sur la piste en ciment des lieux.

Un groupe de 14 coureurs détaché entra dans le stade pour en découdre. Ce fut Hector Heusghem qui lança le premier la bagarre, suivi de près par Félix Sellier qui prit une légère avance, mais Philippe Thys en prenant la corde va s'approprier cette victoire de prestige.

CPA Philippe Thys

Carte postale Philippe Thys (coll. privé)

De même, Jean Rossius va souffler la 2e place à Félix Sellier. Le trio belge avait fait la pige aux français; le 1er français fut Jean Alavoine prenant la 5e place derrière un autre belge, Hector Tiberghien !

Philippe Thys avait effectué une belle moisson avec 5 victoires (4e, 8e, 9e, 10e et 15e), le tiers du potentiel !

Classement général du Tour 1922

Les trois leaders étant dans ce groupe, cette 15e étape n'eut pas d'impact sur le classement général. Donc la victoire finale revint à Firmin Lambot, lui qui avait prit la tête lors de la 13e étape, entre Strasbourg et Metz.

CPM Firmin Lambot

Carte postale Firmin Lambot (coll. privée)

Il remportait ainsi son 2e Tour de France après celui de 1919, en 222h 08mn 06s, sans avoir remporter d'étape, une première. Il était aussi le coureur le plus ancien, remportant cette épreuve, en ayant 36 ans et 4 mois.

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder à l'article sur le Tour de France 1919.

Après la remise des bouquets de fleurs, Firmin Lambot répondit à une interview : "J'aurais dû gagner beaucoup mieux que je ne l'ai fait, mais il aurait fallu que je fusse un peu plus confiant. Car je n'ai pas eu un bon moral dans cette course... Que voulez-vous, j'ai huit tours de France dans les jambes et chaque fois que je pars je me figure toujours trop usé. J'espère bien faire la passe de trois l'an prochain…"

La suite du classement

   2e : Jean Alavoine (F), à 41mn 15s
   3e : Félix Sellier (B), à 42mn 2s
   4e : Hector Heusghem (B), à 43mn 56s
   5e : Victor Lenaers (B), à 45mn 32s

Les Belges avaient dominé cette 16e édition du Tour de France, seul Jean Alavoine avec cette 2e place au classement général avait pu éviter le grand schlem ! Car aux 6e et 7e place, on trouvait deux autres belges.

Avec cette victoire, la Belgique remportait son 7e Tour de France consécutif (pas de Tour de 1915 à 1918), après Odile Defraye en 1912, Philippe Thys en 1913, 1914 et 1920, Léon Scieur (1921),  Firmin Lambot en 1919 et 1922.

Le premier Deuxième classe fut le français Joseph Pelletier dit "José".

Joseph Pelletier Gallica

Joseph Pelletier (photo coll. Gallica, BNF)

Au palmarès des marques, Peugeot, associé à Wolber pour les pneus, pouvait être fier des résultats de ses routiers avec le gain du classement général et 11 victoires d'étape.

Le vainqueur du Tour de France 1922

Firmin Lambot est né le 14 mars 1886, à Florennes en Belgique.

CPA Florennes Grande place

Carte postale Florennes Grande place (coll. privée)

Il pratiqua le métier de bourrelier avant de devenir cycliste professionnel en 1908; cette même année, il prit la 2e place du Championnat des Flandres et la course Charleroi-Beaumont-Charleroi. L'année suivante, il se classa 4e du Championnat de Belgique. En 1910, il participa au Tour de Belgique où il finit à la 7e place.

En 1911, il entra dans l'équipe Le Globe. 8e du Championnat de Belgique et 23e du Paris-Brest-Paris, il fut engagé sur son premier Tour de France où il termina à la 11e place du classement général.

1922 07 25 Tour de France L'Auto 1R Firmin Lambot R

Firmin Lambot (Journal L'Auto, coll. Gallica, BNF)

Ce Tour fut le premier d'une longue série… 10 participations

  1911 : 11e
  1912 : 18e
  1913  : 4e, victoire sur la 9e étape
  1914  : 8e, victoire sur la 6e étape
  1919  : Vainqueur, 2 jours Maillot jaune et victoire sur la 14e étape
  1920  : 3e, victoire sur les 5e et 6e étapes
  1921  : 9e, victoire sur la 9e étape
  1922  : Vainqueur et 3 jours Maillot jaune
  1923  : Abandon à la 7e étape
  1924  : Abandon à la 8e étape

Timbre belge 2017 Firmin Lambot

Timbre Belgique 2017 Firmin Lambot (coll. privée)

D'autres résultats marquants

   1913 : 20e du Paris-Roubaix
   1920 : 5e Liège-Bastogne-Liège

En 1914, il entra dans l'équipe Peugeot.

Il ouvrit un magasin de cycle puis une fabrique de cycles "Firmin Lambot".

Le club La Pédale Florennoise organise chaque année depuis 1988, dans son village de naissance, le "Grand Prix Scieur-Lambot" en hommage aux deux champions.

Le village de Florennes possède deux vainqueurs de Tour de France, avec Firmin Lambot (1919 et 1922) et Léon Scieur (1921).

Il décéda le 19 janvier 1964, à Borgerhout en Belgique, district d'Anvers.

Épilogue

Pour la 4e année consécutive, Belfort ne dut se satisfaire que du passage des coureurs, lors de la 12e étape de ce Tour de France 1922, se déroulant entre Genève et Strasbourg.

Cette 16e édition fut belge.

Un ancien sociétaire du Vélo Club Belfortain, Georges Kamm, participa à ce Tour, après celui de l'édition précédente; il termina à la 31e place du classement général.

JM

Liens pour accéder aux articles cités

Sommaire des Tours de France : Cliquer ici

 

Tour de France 1919 : Cliquer ici

Références presse : Journal L'Auto (Gallica, BNF), Journaux L’Alsace et La Frontière (Coll. Archives départementales du Territoire de Belfort), Livre Tour de France Histoire extraordinaire des géants de la route

Référence Web : Wikipédia, Site La Grande Boucle, Divers autres Sites…

Infos pratiques  

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