La construction de la Salle des Fêtes de Belfort : La genèse du projet & le devis

Sur la place de la République de Belfort, un nouvel édifice sortit de terre en 1912, la nouvelle Salle des Fêtes dont les gros œuvres débutèrent en mai 1912.

Salle des Fêtes Le premier projet (doc. AMB)

Elle remplaça un bâtiment construit en 1766, le Manège militaire.

En fin de vie, il fut utilisé comme marché et lieu de stockage du matériel des pompiers. Il fut arasé en 1912, pour permettre la construction de cette Salle des Fêtes tellement attendue par la Cité du Lion.

Cette première partie de l'article est consacré à la genèse du projet de la construction de la Salle des Fêtes.

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder au Sommaire des articles sur la Salle de Fêtes, dont celui consacré à l'histoire du Manège militaire.

Le projet

Dès 1909, le maire Charles Schneider et le conseil municipal eurent l'intention de créer une Salle des Fêtes; dans un premier temps, il fut envisagé de l'installer dans le théâtre municipal mais cette hypothèse fut écartée pour la construction d'un nouveau bâtiment.

Il faut dire que la Salle des Fêtes de l'Hôtel de Ville était devenue trop petite pour les nombreuses animations de la ville.

Carte postale Belfort L'hôtel de Ville (coll. JM)

Au regard de l'état des lieux de l'ancien manège, l'emplacement était tout trouvé surtout qu'une nouvelle place avait pris jour, la place de la République.

Il revint à l'architecte municipal, Charles Emond d'en dresser le projet, les plans, le devis...

Charles Emond

Né le 13 novembre 1868 à Belfort, Charles Emond fit ses études à Belfort puis obtint son diplôme d'architecte d'état.

Il postula et obtint le poste d'architecte et de directeur des travaux de sa ville où il fut à l'œuvre sur de nombreux dossiers et projets, dont la construction du château d'eau du Mont (1908), du pavillon des cancéreux de l'Hôpital militaire, la caserne de Rethenans (1913), et l'aménagement des cités-jardins de la Miotte, des Barres, du Mont, de la Pépinière et à Delle.

Carte postale Belfort Caserne de Rethenans (coll. JM)

Dans le cadre de sa fonction, il conçut aussi d'autres projets comme ceux pour la rénovation des façades et de l'intérieur du Théâtre municipal, en 1910, qui ne fut pas retenu certainement dû à l'arrivée de la Première Guerre Mondiale.

Il s'est marié le 23 juin 1906, avec Jeanne Marie Dimanche.

L'architecte travailla pendant de nombreuses années pour la municipalité tout en ayant une activité privée, en parallèle.

En début octobre 1912, l'architecte demanda à la municipalité soit un congé de longue durée ou soit sa mise en retraite proportionnelle, conseil donné par son médecin au regard de l'évolution de sa maladie, au cours des quatre dernières années. La municipalité entérina la seconde solution avec la nécessité de trouver un candidat pour le poste (architecte & agent voyeur).

Il est décédé le 29 mars 1959.

NA : Je suis à la recher che d'une photo de l'architecte Charles Emond et autres informations à son sujet...

Un avant-projet

Il proposa un avant-projet avec un bâtiment dont la façade principale donnant sur la place de la République se mariant relativement bien avec le Palais de Justice, présent à sa gauche.

Il avait une emprise de 18,5 mètres de largeur, 45 mètres de longueur et 18 mètres de haut, desservi par un escalier pour sa façade principale. Il possédait, en partie centrale, trois hautes portes surmontées par trois fenêtres de taille importante au style roman, formant balcon, couvertes par une corniche en arc de cercle; deux fenêtres, l'une au-dessus de l'autre, étaient inscrites de chaque côté de cet ensemble.

Façade principale donnant sur la place de la République (doc. AMB)

À la hauteur des portes, la façade reprenait le style de l'architecture du nouveau Palais de Justice fut reconstruit en 1908, suite à son incendie en janvier 1906. Il gagna une toiture plus ornementée que celle de 1901, qui possédait une architecture beaucoup plus simple.

Sa façade alternait les couleurs par l'utilisation de variantes de matériaux, pierres de calcaire blanc et grès rouge alternées sur la hauteur.

Carte postale Le nouveau Palais de Justice (coll. JM)

Sur cette carte postale, on voit à droite une palissade en bois protégeant le chantier, lors du début de la construction de la Salle des Fêtes.

Carte postale Le premier Palais de Justice (coll. JM)

Sur cette deuxième carte postale, on distingue à droite l'ancien Manège militaire.

Cet avant-projet donnait une certaine unicité pour ce côté de la place de la République.

Côté façades latérales, l'architecte Charles Emond proposait une continuité dans le style de la façade principale avec deux rangs de grandes fenêtres. La partie arrière formée en deux blocs était de largeur plus réduite et moins haut; elle accueillait la scène et le logement du concierge entre-autres.

Façade latérale donnant sur la rue du Manège (doc. AMB)

À l'intérieur, le projet proposait trois niveaux

  - un sous-sol peu enterré pouvant être utilisé en salle de réunion ou salle de banquet, équipée d'une cuisine, des toilettes
  - une salle principale donnant sur la scène, parterre ou salle de danse, avec deux galeries latérales
  - un 3^e niveau, le balcon avec deux galeries latérales.

Cet avant-projet… ne fut pas accepté par le conseil municipal.

Nouveau projet

L'architecte Charles Emond dut reprendre son crayon pour proposer un nouveau projet en tenant compte des critiques reçues sur son avant-projet.

Façade principale

Il conçut un bâtiment plus iconoclaste que le précédent, dans un style néo-baroque, avec sa façade possédent quatre colonnes au style ionique et sa coupole donnant au-dessus de la façade principale; la courbe étant omniprésente.

Pour ce nouveau projet, l'architecte reconduisit une emprise similaire à l'avant-projet, très légèrement plus importante, avec ses 21 mètres de largeur, 47 mètres de longueur et 23 mètres de haut.

Façade principale donnant sur la place de la République (doc. AMB)

Avec cette nouvelle conception, Charles Emond pour sa façade principale, s'était totalement démarqué de celle du Palais de Justice.

Elle possédait une entrée majestueuse, utilisant l'acier et le verre, comprenant trois doubles portes joliment décorées surmontées d'une marquise, une baie vitrée au-dessus au style roman, un cartouche avec le blason de Belfort encadré par les mots "SALLE" et "FETES", le tout surmonté d'une corniche en arc, se terminant horizontalement de chaque côté.

Devant, un escalier de sept marches couvre presque toute la largeur du bâtiment donnant accès à un perron.

La touche finale était donnée par ce dôme décoré et ses deux "vases".

Façades latérales

Côté façades latérales, l'architecte proposait un bâtiment plus monobloc que son avant-projet, hormis la toiture composée de deux parties, le dôme à l'avant et une toiture traditionnelle avec des lucarnes type oculus chapeautés. Il avait conservé un débord, en partie arrière, pour le logement du concierge. Le segment à la hauteur de la scène est totalement intégré au bâtiment.

Façade latérale donnant sur la rue du Manège (doc. AMB)

Concernant les fenêtres, il avait repris celles de son avant-projet. Par contre, celles du début du bâtiment étaient relativement semblables aux autres, un peu plus larges.

À l'intérieur, le projet proposait la même configuration avec

  - un sous-sol peu enterré pouvant être utilisé en salle de réunion ou salle de banquet, équipée d'une cuisine, des toilettes
  - une salle principale donnant sur la scène, parterre ou salle de danse, avec deux galeries latérales
  - un 3^e niveau, le balcon avec deux galeries latérales.

L'emprise de la scène était plus importante que dans l'avant-projet.

Chaque étage était desservi par une entrée avec ou sans équipement, comme les vestiaires...

Ce nouveau projet dressé par l'architecte Charles Emond fut finalisé, le 2 mai 1910 et fut pris en charge par la municipalité, dès le lendemain.

Après délibération, le projet fut accepté et la réalisation lui fut confiée; à charge de transformer les plans en réalité.

Élaboration du devis

Pour la construction de la Salle des Fêtes, le projet fut découpé en plusieurs lots en fonction des natures de travaux

  - Lot 1 : Maçonnerie en béton armé et enduits, grosses et petites serrureries
  - Lot 2 : Charpente et menuiserie
  - Lot 3 : Serrurerie
  - Lot 4 : Couverture
  - Lot 5 : Plâtreries et peinture
  - Lot 6 : Éclairage
  - Lot 7 : Chauffage
  - Lot 8 : Ameublements et décors
  - Lot 9 : Imprévus

L'architecte pour établir le devis, à partir de son projet accepté, effectua les consultations nécessaires pour le dresser.

Devis de la structure bétonnée

Pour la construction de la Salle des Fêtes, l'architecte fit appel, le 29 avril 1910, au bureau d'étude Paul Piketty pour établir le devis de la structure bétonnée (Lot 1) pour édifier le bâtiment.

Extrait courrier Paul Piketty à Charles Emond (doc. AMB)

Après les calculs nécessaires, le devis descriptif fut établi le 17 mai 1910, pour un montant de 46437,45 francs. Il proposa une variante inférieure de 7642,80 francs avec un plancher intermédiaire (entre sous-sol et salle principale) porté par colonne au lieu de poutres.

Montant des devis de la Salle des Fêtes

Charles Emond, après le retour des différentes consultations effectuées, put élaborer les devis de l'ensemble des lots pour permettre au conseil municipal d'obtenir le montant de l'enveloppe budgétaire nécessaire, pour prendre les décisions nécessaires concernant l'obtention d'un prêt.

Liste des devis pour les 9 lots de la construction de la Salle des Fêtes

Le budget estimatif établit le 25 février 1911, s'élevait à 245 000 francs.

La phase projet allait pouvoir passe dans la phase réalisation.

Fin de la 1ère partie, la suite à découvrir via le Sommaire (lien ci-dessous).

Épilogue

Après un avant-projet non accepté par la municipalité, l'architecte Charles Emond dut reprendre son crayon pour proposer un nouveau projet qu’il conçut plus iconoclaste, car s'étant libéré du carcan qu'il s'était indirectement imposé par la présence architecturale du Palais de Justice.

La phase devis étant élaborée, il fallait maintenant trouver les entreprises pour réaliser cet édifice tant attendu par la Cité du Lion, dans un budget par définition, contraint.

JM

Liens pour accéder aux articles cités

Sommaire des articles sur la Salle des Fêtes : Cliquer ici

Références : Dossier Salle des Fêtes (Archives municipales de Belfort, AMB), Dictionnaire de la Société Belfortaine d'Émulation (coll. AMB)

Infos pratiques  

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