La Libération de Belfort 1944, 1ère partie : Les Armées de la Victoire.
MAJ le 31 janvier 2015
NA : Jocelyn poursuit ses articles sur les médailles, il nous propose d’en découvrir une nouvelle. Mais avant, il lui a semblé important de précéder l’article sur ce sujet par une première partie rappelant la genèse de sa création. Elle nous fera découvrir une collection connexe à la collection des médailles, la collection des insignes (1) à travers le récit des libérateurs de Belfort en novembre 1944.
Prologue
La libération de Belfort à travers les insignes est une façon de décrire les événements en rappelant que ses combattants appartenaient à des unités différentes, mais formaient une grande famille, la 1ère Armée Française.
Les armées de la libération prennent pieds sur le sol de France en Normandie le 6 juin 1944, puis en Provence le 15 août 1944. Peu impliquée le 6 juin l’armée française en revanche participe pleinement au débarquement sur les plages de Provence.
Après une course folle de près de 700 kilomètres, la 1ère Armée Française qui deviendra en fin mars 1945 par la traversée du Rhin l’Armée Rhin et Danube (2), commandée par le Général De Lattre de Tassigny (3), avec ses 2 corps d’armées s’essouffle et doit en septembre fixer sa ligne de front.
Insigne Rhin et Danube créé en 1945 en Allemagne
Insigne créé en 1945 en Allemagne du 1er CA
Insigne créé en 1945 en Allemagne du 2ième CA
Près de 2 mois seront nécessaire pour reprendre son énergie grâce à sa Base d’opération 901 (ou base logistique) pour amener hommes, nourritures, essence et munitions sur le front à quelques dizaines de kilomètres de Belfort.
Insigne de la Base d’opération créé en 1945
Le 14 novembre, par un temps déplorable la grande offensive se déclenche.
Plan de bataille pour la libération de Belfort en novembre 1944
La 1ère armée française avec ses 2 corps d’armées perce la ligne de front qui était stabilisé depuis 2 mois. De la frontière Suisse aux Vosges se placent les deux Corps d’Armées avec leurs Divisions.
L’armée du Général De Lattre de Tassigny étaient composée de :
Du 1er Corps d’armée sous les ordres du Général Bethouart (4) avec ses divisions :
- la 9ième Division d’Infanterie Coloniale (ou 9ième DIC) du Général Magnan (5)
Insigne de la 9ième DIC
- la 2ième Division d’Infanterie Marocaine (ou 2ième DIM) du Général Carpentier (6)
Insigne de la 2ième DIM
- la 5ième Division Blindée (ou 5ième DB) du Général de Vernejoul (7)
Insigne de la 5ième DB
- des Commandos d’Afrique avec son 3ième groupe de choc du Colonel Bouvet (8)
Insigne des Commandos d’Afrique
- des Commandos de Provence du commandant de Courson de Villeneuve, sous les ordres du Groupement Molle.
Insigne des Commandos de Provence
- du Commando de Cluny du Commandant Bazot (9)
Insigne du Commando de Cluny
Et du 2ième Corps d’armée sous les ordres du Général de Monsabert (10) avec ses divisions :
- la 1ère Division Française Libre (ou 1ière DFL) du Général Brosset (11),
Insigne de la 1ère DFL
- la 3iéme Division d’Infanterie Algérienne (ou 3ième DIA) du Général Guillaume (12).
Insigne de la 3iéme DIA
Dans la Trouée de Belfort…
Depuis 5 à 6 jours, les belfortains entendaient les bruits de la bataille se rapprocher lentement d’abord, puis plus rapidement aux fils des heures. Les rafales des armes automatiques parvenaient aux oreilles. Les défenses allemandes pleines d’inquiétudes occupaient leurs dispositifs de combat, redoublant de surveillance à la garde des ponts et des points névralgiques.
Le 19 novembre, les combats faisaient rage au-delà du Salbert, les duels d’artillerie s’intensifiaient, la bataille était au nord, à l’ouest et au sud de Belfort.
Le 20 novembre à 8 heures du matin, les Commandos d’Afrique enlevaient brillamment le fort du Salbert, dernier ouvrage couvrant les avancés de la place de Belfort. Puis dévalant rapidement les pentes boisées, ils occupaient Cravanche et Valdoie.
Photo prise à l’entrée de Belfort, du côté Cravanche
Vers 10h30, quelques patrouilles poussaient des reconnaissances jusqu’aux usines Alsthom et à la ligne de chemin de fer.
L’une d’elles, celle de l’aspirant Jean Delvigne se battra pendant plusieurs heures au pont de Cravanche.
Son détachement sera aussi le premier à traverser le Rhin !
Photo de l’aspirant Jean Delvigne
Par contre vers Essert, le Bataillon de Choc des Commandos de France et le Régiment de Marche de la Légion Etrangère (ou RMLE) s’attaquaient à un ennemi sérieusement accroché à un terrain puissamment défendu, et étaient quelques peu retardés dans leur progression.
Insigne du Bataillon de Choc
Insigne du RMLE
Enfin, vers midi, les chars Sherman du 6ième Régiment de Chasseurs d’Afrique ou (6ième RCA) débouchaient en trombe par la rue de Cravanche,
Insigne créé en 1943 en Afrique du Nord du 6ième RCA
appuyés par des éléments du 4ième Régiment de Tirailleurs Marocains (4ième RTM)
Insigne du 4ième RTM
et commençaient l’investissement nord de la ville de Belfort.
Photo de soldats progressant dans la rue des Capucins
Rapidement des résistances isolées étaient réduites, mais malheureusement le char de tête, le Bugeaud était touché à sa tourelle par une arme antichar en face du poste de police du faubourg des Vosges.
Photo du char recouvert de fleurs par les belfortains
La progression se faisait bientôt plus rapide et vers 16h30, les forces françaises prenaient la gendarmerie.
Au nord-est, c’étaient les Commandos de France et le Maquis de Corrèze qui engageaient le combat vers le Champ de Mars et l’Arsot. Leurs chars traversaient la ville et trouvaient les principaux ponts intacts grâce à l’héroïsme d’un belfortain Edmond Auguié qui, courageusement coupa les mises à feu des mines
Photo d’un char stationné Boulevard Carnot
Du coté d’Essert, les derniers bouchons ennemis sautaient, le Régiment de Marche de la Légion Etrangère (ou RMLE), le Bataillon de Choc et les Commandos de France couverts par d’autres éléments du 6ièmeRégiment de Chasseurs d’Afrique (RCA), faisaient leur entrée dans Belfort vers 16 heures par la route nationale.
Dans la soirée du 20 seuls résistaient encore, le Château, les forts de la Justice, de la Miotte et le fort de Roppe, mais Belfort libéré devait vivre encore quelques jours d’inquiétudes.
Les Commandos d’Afrique étaient durement engagés aux Martinet et au bois d’Arsot. Le Château et le fort de Roppe semaient sur la ville obus et mortiers. Chaque jour encore, plusieurs de nos compatriotes tombaient victimes des derniers ressauts d’une armée à l’agonie.
Le 21 novembre vers 17 heures 20, le char Cornouailles du 6ième RCA du Lieutenant Martin est stoppé dans son élan sur le chemin de la Miotte.
Photo du char Cornouailles
Ce char Sherman est aujourd’hui un monument de la libération au pied du château.
Le 25 vers 10 heures du matin, une section du 8ième Régiment de tirailleurs Marocains (ou 8ième RTM) escaladait les murs du Château,
Insigne du 8ième RTM
l’occupait et pour la première fois depuis quatre années nos trois couleurs étaient hissées au mât de la plate-forme de notre Citadelle et flottaient à nouveau joyeusement sur la ville en fête.
Photo de la pose du drapeau tricolore au Château par le commandant Bartou
Alors seulement la population se répandit dans les rues pour crier son enthousiasme, alors seulement les cœurs crispés se détendirent et des larmes de joie coulèrent aux yeux des Belfortains.
Photo d’une scène de joie dans Belfort rue Saint Privat
Ils étaient libres, libres grâce à notre armée, grâce à nos glorieux soldats d’Afrique et de la Métropole, grâce à nos vaillants FFI (Forces Françaises de l’Intérieures).
Insigne des FFI
L’armée Allemande bousculée de toutes parts n’était plus qu’une bête traquée dans ces derniers retranchements.
Déjà la victoire de Belfort permettait à la 1ère Armé Française du Général de Lattre De Tassigny d’entrer par le sud dans la plaine d’Alsace, déjà nos éléments avancés atteignaient le Rhin.
Le 26 au matin toute la population émue et recueillie assistait Place de la République à l’envoi des Couleurs par le Général Carpentier commandant la 2ième Division d’Infanterie Marocaine.
Photo de la place de la République
N’oublions pas les obscures !
Ce petit récit ne met en valeur que les grandes unités, mais pour mettre un soldat sur une ligne de front, il faut entre 3 à 5 soldats pour lui assurer une certaine sécurité. En effet il a besoin de toute une chaîne de services, soit : un soutient d’artillerie divisionnaire, ici le 63ième RAA, du soutien médical, du génie pour ouvrir et dégager les routes, des transports pour les hommes, les vivres, les munitions, l’essence et l’évacuation sanitaire pour des centres de tris puis vers les hôpitaux et surtout des moyens de transmissions efficaces. La valeur d’une armée se mesure aussi par ses moyens logistiques. La libération de Belfort, puis de la France a été réalisée que grâce à tous les maillons de cette chaîne.
Photo du souvenir de la victoire avec de gauche à droite les Généraux De Lattre de Tassigny chef de la 1er armée française, Devers commandant du 6th Army Group, Béthouart chef du 1er CA et Monsabert commandant du 2ième CA
Fin de la 1ère partie, la suite à venir… dans la 2ième partie qui sera consacrée à La Médaille de la Libération de Belfort.
Jocelyn C. Déc. 2012
NA : Un film d'environ 5 minutes des archives de l'INA sur la Libération de Belfort est disponible sur le Web TV de la Mairie de Belfort. (cliquer sur le lien) Dans ce film on peut y voir des images de différents lieux (le château, le carrrefour rue Berthelot et rue du fort Hatry, le carrefour rue des Capucins et faubourg de France, devant l'hopital militaire faubourg de Montbéliard...).
Infos pratiques
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En cliquant sur les photos, vous pouvez les agrandir.
Appendice
(1) Insigne : Si la médaille est une pièce de métal avec ou sans ruban rappelant le souvenir d'un acte de dévouement ou un épisode d'un événement local ou national ; l'insigne lui est une marque distinctive d'appartenance ou un attribut d'un rang, d'une fonction, d'un grade. Il peut être de métal, de tissu ou de papier.
Certains des insignes de cet article ont vus le jour en 1943 en AFN et pour la plupart en 1944 ou 1945, d'autres après la fin de la guerre. La raison, notre armée était en pleine reconstruction et de plus, en Afrique du Nord. La symbolique d'un insigne rappel la naissance ou les victoires de l'unité d'appartenance et nos grandes victoires se trouvent dans les campagnes d'AFN, d'Italie, de France et d'Allemagne. Un autre problème se posait, c'est sa fabrication. L'activité économique de la France était au plus bas en 1944. La reprise des usines était fonction des approvisionnements en matière première, car les besoins des militaires étaient prioritaires.
(2) 1ère Armée française : C’est le nom donné en septembre 1944 aux unités militaires placées sous les ordres du Général de Lattre de Tassigny et destinées à la libération du territoire Français. Elle est d'abord connue sous le nom de 2ième armée en décembre 1943, puis d'armée B en janvier 1944 et 1ère armée en septembre 1944, avec l’ajout de la mention Rhin et Danube en 1945 lors du passage en force du Rhin le 30 mars.
Composée pour moitié d'indigènes, maghrébins, africains et pour moitié d'européens d'Afrique de Nord, auxquels viendront s'ajouter progressivement 114 000 FFI. Ses pertes, 13874 tués et 42256 blessés sur un effectif de 260 000 hommes et femmes.
(3) Général de Lattre de Tassigny : Jean Joseph Gabriel de Lattre de Tassigny, Général d’armée et Maréchal de France né le 2 février 1889 à Mouilleron-en-Pareds (Vendée) et mort le 11 janvier 1952 à Paris.
Arrêté et emprisonné en 1943 suite à son refus de ne pas combattre, il s'évade de la maison d’arrêt de Riom le 3 septembre 1943 et rejoint le Général de Gaulle à Londres. Promu au rang de général d'armée le 11 novembre 1943, il prend le commandement de l’Armée B, qui devient la 1èreArmée Française dès décembre 1943. Il débarque en Provence le 16 août 1944. Il représentera la France à la signature de la capitulation Allemande du 8 mai 1945 à Berlin au quartier général du Maréchal Joukov.
(4) Général Béthouard : Marie Emile Antoine Béthouard, Général d’armée de terre né le 17 décembre 1889 à Dole dans le Jura et mort le 17 octobre 1982 à Fréjus.
Commandant le 1er corps d’armée de la 1ère armée Rhin et Danube, puis Commandant en Chef avant de devenir Haut Commissaire de 1946 à 1950 des troupes françaises d’occupation. Après son service actif, il devient sénateur en 1955
(5) Général Magnan : Joseph Magnan né le 11 janvier 1896 à Decize dans la Nièvre, mort à Strasbourg le 10 juin 1975.
En janvier 1944, il dirige la 9ième DIC, Général de corps d’armée en 1947 puis nommé Gouverneur Militaire de 8ième région à Lyon en 1951, quitte le service actif en 1957.
(6) Général Carpentier : Marcel Maurice Carpentier né le 2 mars 1895 à Preuilly-sur-Claise en Indre-et-Loire, mort le 14 septembre 1977.
Général d’armée commandant la 2ième DIM. Devient commandant en chef des Forces Expéditionnaires Françaises en Extrême-Orient en 1949, remplacé en 1950 suite au désastre lors de l’opération de Cao-Bang, affecté auprès de l’OTAN en 1951, quitte le service actif en 1953.
(7) Général de Vernejoul : Henri de Vernejoul né le 13 mai 1889 à Montcarret (Dordogne) et décédé le 22 août 1969.
Écuyer du Cadre noir, en 1940 il prend le commandement du 1er Régiment de Cuirassiers avec le grade de lieutenant-colonel. Puis le commandement de la 5ième Division Blindée (DB) dès juillet 1943 et participe à la libération de la France et plus particulièrement de l'Alsace en 1944-1945.
En 1963, il participa à la fondation de la Confrérie des Chevaliers de l'Olivier, à Nyons (Drôme). Elle a pour tâche de défendre et de faire mieux connaître l'olive et l'huile d'olive.
(8) Colonel Bouvet : Georges Régis Bouvet (1902- 1976).
A la tête des commandos d'Afrique en 1944. Il reçoit la Rosette de la Légion d'Honneur le 21 mai 1945 des mains du Général De Gaulle. Il est l’auteur de l'ouvrage "Ouvriers de la première heure" paru en 1954.
(9) Commandant Bazot : Laurent Bazot (1902-1971)
Chef du maquis de Cluny (FFI), il prend en septembre 1944 le commandant du Commando de Cluny constitué à partir de ce maquis. Le 5 janvier 1945, il devient le 4ième Bataillon de Choc.
(10) Général de Monsabert : Joseph de Goilard De Monabert, né le 30 septembre 1887 à Libourne, mort le 13 juin 1981 à Dax.
Prend le commandement de la 3ième DIA en mars 1943 puis est nommé Général de Corps d’Armée en août 1944. Nommé commandant supérieur des troupes d’occupation en Allemagne en juillet 1945, quitte le service actif en septembre 1946. Il est élu député des Basses Pyrénées de 1951 à 1955.
(11) Général Brosset : Diego Charles Joseph Brosset né le 3 octobre 1989 à Buenos Aires, Argentine, mort le 20 novembre 1944 à Champagney Haute-Saône.
Prend le commandement de la 1ère DFL en 1943, participe aux campagnes de Libye, de Tunisie et d’Italie. Nommé Général de Division en septembre 1944, il trouve la mort à Champagney le 20 novembre 1944 lors d’un accident en jeep. Un monument en son honneur fut construit proche du lieu de l’accident.
Photo du monument du Général Brosset
(12) Général Guillaume : Augustin Guillaume, né le 30 juillet 1895 à Guillestre (Hautes-Alpes), mort le 9 mars 1983 à Guillestre.
Général de Division en 1944, commande la 3ième DIA. Attaché militaire à Moscou en 1946, puis Général de Corps d’Armée prend le commandement des Forces Française en Allemagne en 1948. Général d’Armée en 1951, il est nommé Résidant Général au Maroc qu’il quitte en 1954. Maire de Guillestre de 1959 à 1971.
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