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LE CARTOPHILION
12 novembre 2022

Ballon d'Alsace, le Monument des Démineurs

Cette année, on fête le 70e anniversaire de l'érection du Monument des Démineurs installé au Ballon d'Alsace sur le Territoire de Belfort, à la limite du département des Vosges. Il fut inauguré le 6 juillet 1952.

CPSM Ballon d'Alsace Panneau Monument

Carte postale Ballon d'Alsace Monument des Démineurs (coll. privée)

Il fut érigé à l'initiative de l’Amicale des Démineurs de France, en mémoire des volontaires démineurs Morts pour la France, suite à la Seconde Guerre Mondiale.

Initialement le projet fut mené en honneur des démineurs volontaires issus des départements du Doubs, du Haut-Rhin, de la Haute-Saône, du Territoire de Belfort et des Vosges, il devint national peu avant son érection.

Les opérations de déminage

Dès la Libération de la France en 1944, il y eut des initiatives privées pour déminer les secteurs abandonnés par les allemands pour récupérer, entre autres, les terres destinées à l'agriculture.

Un pays miné

Environ 5000 hectares du territoire national, un pour cent, furent pollués par plusieurs millions d'engins explosifs de diverses variétés. Les principales régions concernées furent le littoral de la Mer du Nord à la Méditerranée et, toute la région Est.

Il revint à des civils, cette délicate et hyper dangereuse opération de déminage car le génie était monopolisé à nettoyer les "routes" où progressaient les alliés en direction de l'Allemagne.

CPA Génie Sapeur 1945

Carte postale Un sapeur au déminage (coll; privée)

D'ailleurs, les autorités militaires se désengagèrent de cette activité dès janvier 1945, n'ayant pas les ressources nécessaires et les mêmes priorités.

La Trouée de Belfort

La situation liée à la stabilisation du front autour de Belfort provoqua la pose de milliers de mines bloquant routes, voies ferrées, champs, forêts… Une "bande de protection minée" fut constituée par l'armée allemande, partant de la frontière Suisse, elle décrivait un arc de cercle passant par Villars-les-Blamont, Blamont, Pont-de-Roide, Vermondans, Écot, Villars-sous-Écot, Colombier-Fontaine, Longevelle, Beutal, Bretigney, Onans, Marvelise, Secenans, Mignafans, Granges-le-Bourg, Moffans, Lyofans, Clairegoutte, Ronchamp, Champagney, Belfahy, Servance, en direction des Vosges par le Haut-du-Them,

Carte représentant la bande miné R

Carte montrant la "bande" de protection minée (réal. BF)

Une organisation prend jour

Dès septembre 1944, le GPRF (Gouvernement Provisoire de la République Française) autorisa les municipalités à recruter et à rémunérer des volontaires pour déminer leurs communes; au montant alloué de 150 francs par jour, s'ajoutait une prime de 5 à 42 francs, en fonction du type de mine déterrée. En cette période où les ressources financières étaient rares, ils furent nombreux à se proposer pour effectuer des opérations de déminage; mais pas toujours suffisamment formés à cette activité, les pertes furent tragiquement importantes.

Livre Déminage France apres 1945

Livre Le déminage de la France après 1945 (coll. privée)

Le gouvernement provisoire, alerté sur la situation, chargea les services du génie rural, attachés au ministère de l'Agriculture, et aux unités du génie de la France Libre, de former les volontaires. Ils furent mêmes aidés par des britanniques forts de leur expérience au désobusage et de leur capacité à développer du matériel de détection performant; leur centre de formation fut installé à Bayeux.

La Direction de déminage

Par ordonnance n°45-271 du 21 février 1945, fut créé la Direction de déminage rattachée au ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme. Raoul Dautry, le ministre, nomma le vésulien Raymond Aubrac, résistant et ingénieur des Ponts et Chaussées, à la tête de ce service.

Extrait FDC 2018 Raymond Aubrac

Extrait FDC Raymond Aubrac (coll. privée)

Cette organisation, profitant de la récupération de documents des états-majors allemands situant les zones minées, permit d'établir une stratégie plus efficace pour définir les moyens humains et matériels nécessaires pour éliminer les explosifs disséminés. Elle acquit du matériel auprès des britanniques et américains, avant que la fabrication française puisse en fournir.

FDC 1975 30e anniversaire Service déminage 1

Extrait FDC Un démineur (coll. privée)

Pour mener à bien ces opérations de déminage, furent engagés près de 3200 volontaires. Raymond Aubrac obtint la mise à disposition de 48 000 prisonniers allemands dont certains étaient aussi volontaires. Le Comité international de la Croix Rouge fut réticent à leur emploi au regard de la Convention de Genève. Mais comme l'Allemagne avait utilisé des mines hors des lieux fortifiés, il fut déclaré logique qu'elle devait compenser, pour contribuer au déminage.

En août 1945, fut ouverte une école à Septeuil, commune à l'ouest de Paris, pour former des instructeurs qui devaient enseigner à leur tour les Délégations régionales qui furent implantées à Houlgate, Lège, Neuf-Brisach, Palavas-les-Flots, Saint-Brieuc et Wimereux.

Carte de France Délégations régionales R

Carte d'implantation des délégations régionales (réal. BF & JM)

La région de l'Est fut sous la direction de René Brunotte, ingénieur général du Génie Rural, qui fut chargé du plan opérationnel.

Cette déclinaison pyramidale devait permettre de donner un savoir et des techniques aux volontaires et de réduire drastiquement les accidents; elle fut terminée en septembre 1946. Au début de l'année, pour accélérer la déclinaison et augmenter l'efficacité, Raymond Aubrac remplaça les six Délégations régionales par 25 Représentations départementales, pour que les décisions soient prises au plus proches du terrain, en impliquant les préfets et les municipalités.

À noter, à la fin de 1944, Beaucourt posséda une école pour former des militaires au déminage, créée par le Génie de la 1ère Armée; la formation ne dura que 6 jours. Elle fut donc éphémère.

Bilans des opérations de déminage

Le déminage de masse fut terminé beaucoup plutôt que prévu, car fin 1947 prit fin l'opération générale entreprise sous contrôle de la Direction de déminage, débutée en début d'année 1945

  - 475 000 hectares déminés
  - 13 000 000 mines détruites
  - 663 000 engins marins enlevés

Toutes les mines n'étaient pas éliminées, il en restait encore, disséminées mais qui demandaient des actions ponctuelles et non de masse.

CPM Vassy Déminage R

Carte postale Vassy, opération de déminage (coll. privée)

Nombre de mines éliminées dans les départements suivants

 - Territoire de Belfort : 19 150
 - Doubs : 64 400
 - Vosges : 120 000
 - Haut-Rhin : 415 000
 - Haute-Saône : 840 000

À celles-ci, il faut ajouter pour le Territoire de Belfort environ 30 000 bombes et 55 000 engins divers.

Mais l'opération de déminage provoqua 500 morts et des centaines de blessés dont 700 blessés graves; cet état ne concernant que les volontaires français. Du côté allemand, il y eut environ 2000 morts et 3000 blessés graves; quelques autres nationalités participèrent à cette opération, mais avec un nombre faible d'intervenants.

CPM Ballon d'Alsace Stand des démineurs R

Extrait carte postale Exposition d'engins explosifs (coll. privée)

Deux démineurs du Territoire de Belfort trouvèrent la mort et un fut gravement blessé.

Le Service de déminage avait pris comme devise "Réussir ou périr".

Au regard de la situation bien déminée, le Gouvernement transféra la Direction de déminage au ministère de l'Intérieur, le 1er octobre 1947, sous l'appellation Service national de la protection civile. Raymond Aubrac resta au ministère quelques mois comme Inspecteur général, puis fonda avec trois associés le BERIM (Bureau d'études et de recherches pour l'industrie moderne).

L’Amicale des Démineurs de France

La création de l’Amicale des Démineurs de France fut à l'initiative du Syndicat des Démineurs, Désobuseurs et Débombeurs de France, lors de leur 3e Congrès National, des 3 et 4 juillet 1947. Il s'était déroulé à Paris, à la Maison des Syndicats.

Carte Assemblée générale R

Carte Convocation à une Assemblée Générale (coll. privée)

Un délégué national fut nommé, avec sept délégués représentant les régions de Bretagne, Est, Ile de France, Méditerranée, Nord, Normandie et Océan.

Le délégué régional Est fut Roger Colson.

Dès 1947, l'idée fut émise de perpétuer la mémoire des victimes des opérations de déminage, en érigeant un Monument.

L'Amicale Nationale des Démineurs de France fut déclarée le 5 juillet 1948, à la préfecture de police à Paris.

1948 08 05 Création Amicale Nationale démineurs JO R

Parution au Journal officiel du 5 août (doc. Gallica, BNF)

Le Comité régional de l'Est

Le Comité Régional pour l'Est fut constitué le 21 novembre 1949, pour passer de l'idée au projet d'un tel monument pour les démineurs Morts pour la France dans les départements du Doubs, du Haut- Rhin, de la Haute Saône, des Vosges et du Territoire de Belfort.

Pour dynamiser le projet, un Comité d'honneur fut associé où on trouvait le ministre de la Reconstruction et de l’Urbanisme, Eugène Claudius-Petit, le ministre des Anciens Combattants et Victimes de Guerre, Louis Jacquinot, le sous-secrétaire d’État à l’Air, XXX, et pour les cinq départements, les préfets, les présidents des Conseils Généraux, les délégués départementaux du MRU (Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme), diverses personnalités…

La souscription au Monument des démineurs

Une souscription publique fut lancée dès fin 1949 par le Comité Régional pour l'érection d'un monument à la mémoire des volontaires démineurs Morts pour la France des départements du Doubs, du Haut-Rhin, de la Haute-Saône, du Territoire de Belfort et des Vosges.

Ils furent 116 volontaires démineurs "Morts pour la France" recensés et issus de ces cinq départements.

Mais les fonds recueillis n'étant pas à la hauteur du besoin, en juillet 1951, le Comité Régional dut effectuer une nouvelle relance, en ciblant d'autres donateurs, comme les communes, les départements…

1951 Fiche souscription Monument démineurs 2R

Photo Fiche informative de la souscription (doc. AD90)

Le Comité Régional s'appuyait sur un Comité d'honneur constitué avec des personnalités représentant chaque département. Pour le Territoire de Belfort,

  - Jean Gauthier, président du Conseil général et de la Chambre de commerce
  - Marcel Boulangé, sénateur
  - Hubert Metzger, maire de Belfort
  - Jean Ernest Boigeol, maire de Giromagny
  - André Maire, maire de Lepuix-Gy

Le 18 juin 1952, le Comité Régional prit l'appellation définitive "Comité Régional pour l’érection d’un Monument à la Mémoire des Volontaires Démineurs Morts pour la France". Car le 26 mai 1952, l'appellation précédente était complétée de "aux Marches de l’Est"; mais les difficultés rencontrées pour réunir des fonds avaient nécessité de faire appel aux autres départements, d'où la suppression de ces termes restrictifs.

Le ministre de la reconstruction, Eugène Claudius-Petit, avait poussé pour que le monument soit d'une portée nationale et non régionale.

Le Monument des démineurs

Pour le projet du monument, le Comité fit appel à l'architecte Émile Deschler DLPG (Diplômé Par Le Gouvernement) et au sculpteur Joseph Rivière, auteurs du Monument des fusillés des Combes à La Bresse (Vosges), en 1949.

CPA La Bresse Monuments des Fusillés des Combes R

Carte postale La Bresse Monument des Fusillés des Combes (coll. privée)

Ce Monument des Fusillés est constitué de 27 stèles en granit, positionnées en arc de cercle,  représentant les 27 maquisards exécutés le 27 septembre 1944, par les allemands. Il est situé au lieu-dit "Les Combes".

Émile Deschler

Émile Deschler est né à Épinal (Vosges), le 25 avril 1910. Il fit l'École nationale supérieure des Beaux-arts de Paris, à partir de 1930, dans le département de Roger Expert. Il obtint son diplôme d'architecte en 1937, concrétisé par une Médaille d'or lors de l'Exposition Internationale de Paris.

Émile Deschler Expo Nancy Images Plus BF

Autoportraits Émile Deschler (coll. Image Plus)

Il fit de nombreux voyages en Afrique du Nord. Il possédait d'autres cordes à son arc, avec la peinture et le dessin, qui prirent une place plus importante, à la fin des années 1970.

Affiche Foire de Paris 1942 artnet

Affiche 1942 Foire de Paris (doc. artnet)

Il décéda en 1991.

Joseph Rivière

Joseph Rivière est né le 5 avril 1912 à Tours (Indre-et-Loire). Il entra à l’École municipale des Beaux-Arts de Bordeaux en 1930, où il suivit les cours de sculptures de Charles Louis Malric et de dessin de François-Maurice Roganeau. Il obtint de nombreux prix pour ses œuvres, sculptures, moulages plâtres, esquisses.... dont son admission en loge pour le Grand Prix de Rome en 1936, le prix Chevanard de l'École Nationale des Beaux-arts de Paris en 1937…

Joseph Rivière MFG Enchères Ra

Joseph Rivière (photo MFG Enchères)

S'il exposait à Paris, il était très fidèle à la ville de Bordeaux où était née sa passion. Il réalisa les Monuments aux Morts de Charmes et de Luxeuil.

Luxeuil Monument aux Morts 1939-1945 France Bleu R

Luxeuil Monument aux 1939-1945 (photo France Bleu)

NA : Un nouveau mémorial pour les trois guerres (1870-1871, 1914-1918 et 1939-1945) fut créé en 2019 dans cette dernière ville, avec le Monument de la Seconde Guerre Mondiale, placé en son centre.

Joseph Rivière enseigna à l'Académie Julian à Paris, en 1949. Il obtint le Grand Prix de la Biennale de Sculpture de Plein Air avec "Le Gisant", à Bruxelles en 1950.

Il décéda le 10 février 1961 à Paris.

Le choix du projet

Quatre projets furent proposés par l'architecte Émile Deschler.

1961 09 19 Monument démineurs Maquette Tribune Lausanne R

Un des projets non retenu (photo journal La Tribune de Lausanne)

Le Comité Régional retint le projet "L'Homme projeté" réalisé par le sculpteur Joseph Rivière. La maquette en plâtre fut exposée au Salon de la jeune sculpture de 1951, à Bordeaux.

1951 06 27 Maquette Monument Démineurs L'Echo_d'Alger 1

La maquette avec l'artiste (photo journal L'Echo d'Alger, doc. Gallica)

Le 27 février 1951, la Commission Centrale des Monuments Commémoratifs donna son agrément et le 5 mars 1951, le décret ministériel autorisant la construction du futur Monument à l'intersection des départements des Vosges et du Territoire de Belfort, fut prononcé.

La maquette est conservée au Musée des Beaux-Arts de Bordeaux, don de Madame Rivière-Papet en 1972, étant l'héritière du sculpteur. Ses dimensions étaient

   - Largeur = 1,800 m
   - Profondeur = 1,000 m
   - Hauteur = 4,400 m

NA : J'ai contacté le musée pour obtenir une photo de cette maquette sans résultat, du moins si je ne voulais pas payer 30 euros pour la prise de vue ! Service public ?

Le devis du Monument s'élevait à 5 millions de Francs. Au mois de juin 1952, la souscription n'avait recueilli que 2,8 millions de francs auprès des cinq départements d'origine du projet.

Belfort avait versé 100 000 francs et le département, 200 000 francs.

Mais la participation de nouveaux départements associés à ce projet devait, suivant la projection, permettre de sécuriser le budget nécessaire.

Tout début juillet, une photographie du Monument fut exposée en vitrine d'un grand magasin du faubourg de France, à Belfort; certainement Bumsel.

La forme du monument

Le monument érigé au Ballon d'Alsace en 1952, possède à sa base un socle de la forme d'un triangle avec une mine du type AC, posée dessus. Cette configuration reprenant le design de l'insigne des démineurs volontaires.

Insigne Démineurs volontaires BF

Insigne des démineurs volontaires (coll. privée)

Sur ce socle, derrière la mine, trois flèches en béton de forme pyramidale de 10,50 mètres de haut, positionnées en triangle, se projettent vers le ciel, en s'écartant légèrement. Elles symbolisent l'allumeur type S MI Z35 déclenchant l'explosion d'une mine.

CPM Maquette Moniument démineurs R

Carte postale Maquette du Monument (coll. privée)

Un homme en aluminium à l'horizontal, comme projeté par l'explosion d'une mine, est fixé à la hauteur du premier tiers, sur les deux flèches externes.

CPSM Ballon d'Alsace Le démineur

Carte postale Ballon d'Alsace Le démineur projeté (coll. privée)

Sa particularité, il est nu comme pour démontrer son impuissance face à la soudaineté du souffle violent. 

L'implantation du Monument des démineurs

Le lieu choisi pour ériger le Monument, fut donc au Ballon d'Alsace, sur un terrain à cheval sur les communes de Saint-Maurice-sur-Moselle (Vosges) et Lepuix (Territoire de Belfort).

Le lieu proposé serait une idée de Gaston Sévrin*, chef démineur, suite à un échange avec son ami Gilbert Grandjean. Le président du Comité régional, Roger Colson, fut enthousiasmé par le lieu, lors d'une visite.

*Gaston Sévrin : Son nom est souvent orthographié "Séverin" ave un deuxième "e", par erreur.

CPM Ballon d'Alsace Multivues

Carte postale Ballon d'Alsace Multivues sans le Monument (coll. privée)

L'installation du Monument en son emplacement, fut effectuée par l'entreprise de travaux publics Curien du Thillot (Vosges).

1952 07 05 Monument démineurs La République 1r

Installation du Monument au Ballon d'Alsace
(photo La République, coll. AD90)

Il commémore le sacrifice de 214 démineurs des départements de l'Aube, Bas-Rhin, Côte d'Or, Haute-Marne, Haute-Saône, Haut-Rhin, Marne, Meurthe-et-Moselle, Moselle, Meuse, Territoire de Belfort et Vosges, qui avaient participé à la souscription.

CPSM Ballon d'Alsace Monument démineurs

Carte postale Ballon d'Alsace Le Monument des démineurs (coll. privée)

En 2007, le SMIBA (Syndicat Mixte Intercommunal du Ballon d’Alsace) créé en 1971, a acheté le terrain à un particulier.

1952, Inauguration du Monument des démineurs

Le 6 juillet 1952 se déroula l'inauguration du Monument des Démineurs au Ballon d'Alsace, sous la présidence du ministre de la Reconstruction et de l'Urbanisme, Eugène Claudius-Petit.

De nombreux cars avaient emmené le public pour participer à cette inauguration dont 35 veuves et orphelins de démineurs.

1952 06 Carton invitation

Carton d'invitation adressé au maire de Belfort (doc. AMB)

Arrivé avec une heure de retard sur le programme, il fut accueilli par le préfet de Belfort, Georges Dupoizat de Villemont qui présenta les préfets (ou représentants) des autres départements.

Il passa en revue un détachement du 61e régiment d’artillerie anti-aérienne accompagné de la musique du 1er Régiment du génie de Strasbourg, présent pour lui rendre les honneurs.

Le préfet poursuivit la présentation des personnalités présentes dont les maires de Belfort Hubert Metzger, de Lepuix André Maire et de Saint-Maurice Jacques Georges, ainsi que des premiers magistrats d'autres communes, les présidents des départements et les familles des démineurs Morts pour la France.

Le ministre gagna ensuite la tribune officielle où l'attendait le général Noguès représentant le général Henri Zeller, commandant de la 6e Région militaire ainsi que les représentants officiels belfortains, les députés Raymond Schmittlein et Henry Dorey, le sénateur de Belfort Marcel Boulangé, le président du Conseil général Jean Gauthier et autres personnalités… D'autres communes étaient bien représentées, Colmar, Mulhouse…

1952 07 08 Monument démineurs L'Alsace 2c1R2a

Le ministre échange avec Mgr Hincky de Colmar et M. Morel, l'ancien délégué départemental du MRU (photo journal L'Alsace, doc. AD90)

La cérémonie commença par l'allocution du président du Comité Roger Colson qui remercia tous ceux qui avaient participé à l'érection du Monument dont le ministre,  les membres du Comité d'honneur, les délégués départementaux du MRU (Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme), les conseils généraux qui ont abondé significativement à la souscription, les membres du Comité…

Après la sonnerie "Aux morts", le ministre se rendit vers le Monument des Démineurs accompagné de deux jeunes orphelines et des maires des deux communes à qui était confiée l'œuvre d'art, suivi du préfet Georges Dupoizat de Villemont.

1952 07 08 Monument démineurs L'Alsace 2c1Ra

Le ministre se rendant au monument
(photo journal L'Alsace, doc. AD90)

Il dévoila le Monument des démineurs.

1952 07 08 Monument démineurs L'Alsace 2a1R

Le dévoilage du monument (photo journal L'Alsace, doc. AD90)

Discours du ministre

Il débuta son discours par ces paroles "Ce Monument est celui de la reconnaissance des vivants à ceux qui ont tout donné pour que la sécurité revienne au pays, en même temps que la paix."

Poursuivit par un rappel de la situation à laquelle la France fut confrontée "L'importance de ce sacrifice se traduit en chiffre d'une implacable rigueur. Treize millions de mines ont été retirées et désamorcées par le service de déminage du MRU. Elles étaient disséminées sur 400 000 hectares de terre dont 200 000 de terrain cultivé. Viennent s'y ajouter les 600 000 mines disposées le long des côtes françaises."

1952 07 08 Monument démineurs L'Alsace 1Ra

Discours du ministre (photo journal L'Alsace, doc. AD90)

Continua sur l'implication des démineurs "Pendant trois ans, 3 000 démineurs ont encadré les prisonniers de guerre allemands dont le nombre de 10 000 d'abord, fut par la suite porté à 40 000. Fin 1947, le déminage était achevé dans ses grandes lignes. Restait, pour les démineurs, la tâche de rendre inoffensifs les projectiles d'artillerie ou d'aviation que l'on retrouvait partout. Il y en a eu 18 millions au total, 36 millions de fois, ainsi, une vie humaine a été mise en jeu pour mener cette action à bien. 500 démineurs français ont trouvé la mort. 823 autres furent blessés, et parmi eux un nombre considérable sont restés mutilés."

Souligna "La plupart de ces victimes ont été volontaires et beaucoup d'entre eux sont morts avant même d'avoir perçu le premier franc de leur salaire. 1780 ressortissants allemands ont trouvé la mort sur les champs de mines de France, ils se sont associés dans cette tâche montrant que si la guerre divise les hommes, les mêmes hommes peuvent s'unir pour une tâche féconde de vie."

Photo L'homme projeté Joseph Rivière

Conclut par "O vous, qui cultivez paisiblement vos champs, vous qui parcourez les forêts, qui jouez sur nos plages, souvenez-vous de ceux qui ont tout risqué pour vous permettre de vivre et pour faire que sur le champ de mort chante la vie ! Aux frontières d'une Europe qui doit se forger avec audace et beaucoup de volonté, ce Monument doit être un symbole pour tous les vivants…"

Bénédiction du Monument

Il revint au Révèrend Père rédemptoriste Gevin de Nancy de procéder à la bénédiction du Monument; puis il demanda à l'assistance de reprendre à haute voix, avec lui le Pater Noster. Il fut suivi des prières protestantes du pasteur Baumgartner de Remiremont. 

Pour finaliser la cérémonie, un grand mutilé de Saint-Dié, M. Ferry reçut des mains du ministre, un fanion destiné à l'Amicale nationale des anciens démineurs. Ceux présents s'avancèrent au pied du Monument avec leur nouvel emblème en l'inclinant.

1952 07 08 Monument démineurs La République 1aR

Présentation du fanion de l'Amicale nationale des anciens démineurs
(photo journal La République, coll. AD)

Après une minute de silence, l'inspecteur général du Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme déposa une palme en bronze.

1952 07 07 Monument démineurs La République 1cR

Une photo des personnalités devant le monument des démineurs
(photo journal La République, coll. AD)

La foule des anonymes défila lentement devant le Monument des Démineurs.

Le banquet

Après la cérémonie, un banquet officiel de 300 couverts fut organisé à Lepuix-Gy, à la Colonie de vacances des P.T.T. située au hameau de Malvaux, où furent invités le ministre, les personnalités officielles, les membres des Comités d'honneur et Régional, les familles de démineurs morts, des démineurs et anciens démineurs.

CPSM Malvaux Colonie PTT

Carte postale Lepuix-Gy Colonie des P.T.T. (coll. privée)

Le repas et le service fut assurés par. M. Setzer de Colmar avec ses équipes. Il revint au chef de centre des télécommunications de Belfort, M. Burckardt d'effectuer l'accueil; il représentait M. Bonhomme, le directeur des P.T.T. empêché.

La suite de la visite du ministre

Le ministre de la Reconstruction et de l'Urbanisme se rendit ensuite à Belfort, à l'Hôtel de ville, pour prendre connaissance de plans et de maquettes représentant de nouveaux immeubles construits ou en projet.

CPSM Belfort Hôtel de Ville

Carte postale Belfort Hôtel de Ville (coll. JM)

Il poursuivit sa journée en allant à Delle pour inaugurer le nouveau Château d'eau.

Plaques commémoratives au monument

Dans les années 1970, à minima, une plaque fut posée au pied (texte non trouvé), en 1975, pour le 30e anniversaire de la création du Service de déminage ?

CPM Ballon d'Alsace Monument démineurs 30e anni Service déminage

Carte postale Monument des démineurs avec timbre édité en 1975 et cachet du 30e anniversaire de la création du Service de déminage
(coll. privée)

CPM Ballon d'Alsace Monument démineurs 30e anni Service déminage R

Extrait de la carte postale : Plaque au pied du monument

Elle fut remplacée par une autre fixée en (date ?), aux dimensions plus importantes, sur les deux flèches extérieures, positionnée en dessous du démineur. Elle portait l'inscription suivante

"À LA MÉMOIRE
DES DÉMINEURS
MORTS
POUR LA FRANCE
"

Une troisième vint la remplacer en (date ?), de taille plus réduite, pour être fixée sur la flèche centrale, avec le même texte.

Photo Ballon d'Alsace Monument démineurs Grande plaque R  Photo Ballon d'Alsace Monument démineurs Petite plaque

Extraits carte postale visualisant les 2 plaques (coll. privée)

Stèle des démineurs

Il existe aussi une stèle des démineurs installée sur le site de La Défense à Paris, placée devant la tour Séquoia, après avoir été sur le site de Nanterre, dès 1989.

Elle fut à l'origine érigée en 1960, sur le site de Passy dans la cour du ministre de la Reconstruction, pour commémorer les agents du ministère morts pour la France et les démineurs volontaires civils tombés lors des opérations de déminage.

Au nombre de 523, composés de 484 démineurs, 6 agents techniques, 11 chauffeurs et 22 gardes en charge des prisonniers de guerre utilisés.

Cette stèle des démineurs de 2 mètres de haut, en granit de Bretagne, pesant environ 3 tonnes, fut dessinée par l'architecte Raymond Lopez, membre du cabinet du ministère.

Stèle des démineurs

Stèle des démineurs (photo Rapport Françoise Sapin)

Elle fut inaugurée le 10 novembre 1960, par le ministre de la Reconstruction, Pierre Sudreau.

Il existe un Livre d'Or pour les démineurs morts pour la France; un emplacement est prévu dans la stèle pour l'insérer.

Stand des Démineurs

Gaston Sévrin, l'ancien chef démineur, créa un musée des démineurs en 1962, pas très loin du Monument; en présentant quelques centaines d'engins explosifs de toutes catégories (mines, obus, bombes…).

CPM Ballon d'Alsace Stand des démineurs

Carte postale Ballon d'Alsace Exposition d'engins explosifs (coll. privée)

À noter que sur cette carte postale, on voit au centre et en bas du cliché, une photo ! La photo de Gaston Sévrin ou plutôt d'un proche démineur décédé ?

CPM Ballon d'Alsace Stand des démineurs R2

Extrait de la carte postale : La photo de Gaston Sévrin ?

On n'arrive pas à reconnaître la médaille située en haut à gauche du cadre !

Ce musée était situé en face du Monument à droite du Bar-Restaurant... des démineurs, de l'autre côté de la route.

CPM Ballon d'Alsace Bar démineurs G Sevrin BF R

Carte postale Ballon d'Alsace Bar-Restaurant des démineurs (coll. BF)

À droite, sur la carte postale, on aperçoit des engins explosifs de belle taille devant le musée.

Gaston Sévrin fit fabriquer un cachet rond humide pour effectuer la publicité du "Stand des démineurs de France", via les cartes postales vendues au public.

CPM Balonn d'Alsace Cachet Stand démineurs R

Extrait de la carte postale : Le cachet de Gaston Sévrin

Un second cachet, là imprimé directement sur les cartes postales du musée, vint remplacer le premier.

CPM Ballon d'Alsace Bar démineurs G Sevrin BF R Cachet

Extrait de la carte postale : Le cachet imprimé de Gaston Sévrin

À son décès en 1988, son épouse Jeanne poursuivit la démarche de mémoire, en tenant le musée et une boutique de souvenirs.

CPM Ballon d'Alsace Expositions explosifs

Carte postale Ballon d'Alsace Exposition d'engins explosifs (coll. privée)

Le bâtiment fut racheté par le Syndicat Mixte Intercommunal du Ballon d’Alsace (SMIBA) (date recherchée).

Le musée fut transféré dans une salle aménagée de la Maison du Tourisme du Ballon d'Alsace, situé un peu contrebas, à gauche quand on descend sur Saint-Maurice.

Ballon d'Alsace Maison du Tourisme Salle du musée démineurs

Le musée dans la Maison du Tourisme (photo privée)

La salle fut fermée à la fin de la saison 2020.

Épilogue

Le Monument des démineurs érigé au Ballon d'Alsace depuis 1952, rappelle que des centaines d'hommes volontaires (ou forcés) sont Morts pour la France.

Ils sont aussi des Libérateurs pour avoir rendu la terre française libre permettant de parcourir à nouveau, sans danger, routes, terrains, forêts… après des années d'occupations allemandes ayant laissé des tonnes de mines disséminées, tout comme des tonnes d'obus et de bombes balancés mais non explosés !

Timbre France 1975 Service déminage a

 Timbre Monument des démineurs édité en 1975 pour le 30e anniversaire de la création du Service de déminage (coll. privée)

Chaque année, un hommage est donné à ces démineurs en ce lieu.

JM

Références presse : Journal L'Alsace (coll. Archives Départementales du 90, AD90), Rapport Les démineurs de France (1944-1947),

Références presse : Journaux L'Alsace et La République (coll. Archives départementales du 90, AD90), Documents (Archives municipales de Belfort, AMB)

Références Internet : Wikipédia, Gallica, Site Deminex, Site Forest, Divers autres sites

Infos pratiques  

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