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LE CARTOPHILION
26 mai 2021

La Statue Quand-Même à Belfort : Le Projet (1ère partie)

Si la statue Quand-Même trône sur la place d'Armes de Belfort depuis 1884, elle eut beaucoup de mal à y être dressée !

CPA Belfort Statue Quand Même BF R 1890-99 

Extrait carte postale Belfort La statue Quand-Même (coll. BF)

Dans cette première partie de l'article, nous allons découvrir le projet où l'œuvre d'Antonin Mercié fut d'une certaine sorte, l'otage d'antagonisme politique !

Son histoire débuta… à Montbéliard ou presque !

En mai 1878, la ville de Montbéliard sollicita par lettre, la ville de Belfort, à participer pécuniairement au projet d’ériger un monument sur la tombe du Colonel Aristide Denfert-Rochereau, sise au cimetière de la Cité des Princes.

CPA Montbéliard Souvenir

Carte postale Montbéliard (coll. privée)

Décédé le 11 mai 1878 à Versailles, il fut inhumé le 15 mai dans la tombe de son épouse, Pauline Surleau-Goguel, originaire d’une ancienne famille montbéliardaise, après des obsèques nationales à Paris.

La municipalité de Montbéliard rendit hommage dès 1879, au Colonel, avec l’inauguration de sa statue installée Place des Halles.

CPA Montbéliard Statue Denfert-Rochereau 2

Carte postale Montbéliard Statue Denfert-Rochereau (coll. privée)

L’œuvre fut réalisé par le sculpteur Just Becquet et fut coulée en bronze par la Maison Jules Graux et Cie, installée à Paris. Elle prit place sur le piédestal réalisé par les Frères Bloch, marbriers à Montbéliard.

Il eut donc sa statue à Montbéliard, mais sans la participation de Belfort !

Le projet belfortain

Cette lettre renforça la volonté affichée par la ville, bien avant le départ des prussiens le 2 août 1873, de rendre hommage aux défenseurs de Belfort que furent le Colonel mais aussi Adolphe Thiers.

CPA Belfort Siège Départ prussiens 2 août 1873

Carte postale Belfort Départ des prussiens (coll. JM)

NA : Ce départ put s’effectuer car le gouvernement français avait effectué le payement des 5 milliards de francs imposés par la Prusse lors du Traité de Francfort.

Naissance du futur Territoire de Belfort

Dès le 23 mai 1871, le conseil municipal sous la présidence du maire Edouard Mény, nommé par le décret impérial du 14 juin 1855, adressa une lettre à Adolphe Thiers.

Belfort Photo Maire Mény

Photo Edouard Mény (coll. JM)

Le conseil municipal remercia le Président du Conseil des ministres d’avoir obtenu de l'Allemagne, dès le Traité préliminaire de paix du 26 février 1871 signé à Versailles et confirmé lors du Traité de Francfort du 10 mai 1871, que le canton de Belfort et trois autres cantons Delle, Fontaine et Giromagny et la création du canton de Rougemont-le-Château, permettaient ainsi à 57 000 alsaciens de rester français !

304_001

Carte postale Adolphe Thiers (coll. privée)

NA : En fin de texte un lien permet d'accéder à l'article consacré à la naissance du Territoire de Belfort.

La volonté de la municipalité était de rendre hommage au Colonel Denfert, défenseur de la Place devant les armées prussiennes et Adolphe Thiers, défenseur du territoire devant les négociateurs allemands, lors du Traité de Versailles.

La médaille Thiers

Lors du conseil municipal du 9 juillet 1873, présidé par le nouveau maire Louis Parisot, il fut décidé de frapper des médailles pour récompenser les personnes ayant œuvré pendant cette guerre de 1870-1871.

La médaille représentait les armoiries de la ville sur l’avers et sur le revers la formule

"À Mr THIERS, BELFORT RESTE FRANÇAIS, 2 AOUT 1873".

Monnaie Thiers 2 août 1873 AversMonnaie Thiers 2 août 1873 Revers

Médaille Thiers (coll. JC)

Elle était en bronze, possédait un diamètre de 50,8 mm et une épaisseur de 4,8 mm, pour un poids de 60 grammes.

Il fut aussi décidé d’en frapper une spécialement en or, pour la remettre à Adolphe Thiers.

Le projet devient réalité

Si l’idée de rendre un hommage significatif aux deux défenseurs avait fait son chemin en termes de popularité… il fallut, tout de même, attendre le 12 février 1878 pour que le maire, Louis Parisot, propose au conseil municipal d’ériger un monument à la mémoire d’Adolphe Thiers, décédé le 3 septembre 1877, à Saint-Germain-en-Laye.

Image Epinal Funérailles Thiers 1877

Image d'Épinal Funérailles d'Adolphe Thiers à Paris (coll. privée)

La lettre de mai 1878 de la ville de Montbéliard vint donc comme un propulseur du projet. Le conseil municipal décida le 28 mai qu’il appartenait à Belfort d’élever ce monument sur l’une de ses places.

Le conseil municipal à l'initiative du Docteur Louis Fréry vota un crédit de 2000 francs pour lancer le projet, décida la mise en place d’une Commission municipale en charge du projet, dirigée par le Maire, et jugea nécessaire d’organiser le lancement d’une souscription nationale tout en sollicitant au préalable, l’autorisation ministérielle. 

Dr Fréry Buste Photo

Buste Docteur Charles Louis Fréry (photo JM)

Le principe "d’ériger sur une des places de la ville un monument destiné à perpétuer le souvenir de la conservation de Belfort à la France et à la mémoire des deux grands citoyens, Thiers et Denfert, auxquels elle est due" fut définitivement entériné le 7 juin 1878.

Belfort CPA Série bleue A 9285 Hôtel de ville R

Carte postale Belfort Hôtel de Ville (coll. JM)

Sur demande du Maire, le conseil municipal décida du transférer la subvention de 2000 francs votée le 7 juin 1879 au trésorier du "Comité Général", nom donnée à la commission.

Le 28 juillet 1879, le conseil municipal retint comme hypothèse la Place d’Armes comme lieu de l’installation du futur monument; mais la décision finale était reportée à une date ultérieure. 

Photo Place d'Armes BF 1870-71

Photo Place d’Armes en 1871 (coll. BF)

Le Comité Thiers-Denfert

Le Comité général qui prit l'appellation "Comité Thiers-Denfert", fut réellement formé le 10 décembre 1879, avec la nomination à la présidence de l'ancien préfet du Siège, Jules Grosjean; l'objectif étant d'accélérer la mise en œuvre du projet.  

Belfort Photo Préfet Grosjean

Photo Jules Grosjean (coll. JM)

Au 19 septembre 1880, la souscription avait recueilli le montant de 33637,20 francs.

Le conseil municipal décida le 17 novembre 1880, que le Comité du Lion devait verser le solde du compte déduit des frais d’érection du Lion, à la caisse du monument Thiers-Denfert.

Le Comité demanda à nouveau à la municipalité de se prononcer sur l’emplacement futur de la statue. Lors du conseil municipal du 13 octobre 1880, l’emplacement initial ne fut pas entériné car deux nouvelles hypothèses apparurent, avec une implantation sur la place du théâtre ou sur un rond-point à créer entre le pont Corbis et l’avancée de la Porte de France.

Appel d'offre au projet

Le Comité Général lança un appel d'offre au projet ouvert au plan national pour être en cohérence avec la souscription, elle-même nationale. La volonté était d'obtenir une palette variée de maquettes pour le monument, et surtout, proposée par des sculpteurs ayant une certaine notoriété.

La démarche fit qu'elle retint l’attention de plusieurs sculpteurs; leurs projets furent présentés au public, du 10 au 25 septembre 1880, au musée installé au 1er étage de l’Hôtel de Ville.

Belfort CPA Série bleue A 9926 Hôtel de ville Salle du musée R

Carte postale Hôtel de Ville Salle du musée (coll. JM)

Projet d’Eugène Guillaume

Une des premières maquettes présente fut celle d’Eugène Guillaume, le directeur de l’École des Beaux-arts de Paris et prix de Rome 1845.

Bio Eugène Guillaume

Il proposait, en fait, le même sujet dans deux déclinaisons légèrement différentes. Sa statue était formée d’une colonne avec à son pied, d’une part une femme représentant "La Libération" et d’autre part un soldat (un gaulois) représentant "La Défense". Chaque personnage portait chacun un bouclier représentant réciproquement Thiers et Denfert. La différence entre les deux maquettes était la position du couple, soit debout soit assis, aux pieds de la colonne.

Projet belfortain

Pour ce concours, un trio belfortain composé des sculpteurs Nicolas Loviton et Edouard Meigret, et de l'architecte Alexandre Pélisson proposa une maquette de belle tenue et élancée (environ 11 mètres).

La partie haute réalisée par Nicolas Loviton représentait une guerrière portant fièrement le drapeau français et un glaive cassé, entourée des deux défenseurs Thiers et Denfert-Rochereau devant une tour rappelant celle de la Miotte. 

Statue Quand Même Maquette Pélisson Meigret

La maquette du trio belfortain (photo RM n°16)

La partie basse est l’œuvre conjointe de l’architecte Alexandre Pélisson et du sculpteur Edouard Meigret. Elle constituait le piédestal flanqué des armoiries de Belfort au centre entourées de deux cartouches portant la réponse pleine de fermeté du Colonel Denfert au Général Von Treskow suite à sa demande de reddition et la pas moins éloquente réponse d'Adolphe Thiers au grand chancelier allemand Otto Bismarck lors des discussions préliminaires du Traité de Versailles.

Texte Denfert (à droite) : "La retraite de l'armée prussienne est le seul moyen de concilier l'honneur et l'humanité."

Texte Thiers (à gauche): "Non, jamais je ne céderai à la fois Belfort et Metz. Vous ruinez la France, dans ses finances, la ruinez dans ses frontières !"

Projet d’Auguste Bartholdi

La maquette du sculpteur d’Auguste Bartholdi est conforme à la créativité de l’artiste, grandiose.

Statue Quand Même RM Déc 1969 p15 Maquette Bartholdi

La maquette Bartholdi (photo RM n°16)

Réalisée en plâtre sur un socle en bois, elle était constituée d’une large demi-lune accessible par trois marches entourées de ses colonnades avec 3 statues sur piédestal. Les deux défenseurs sont assis aux extrémités. Adolphe Thiers, à gauche, a le bras levé, défendant la Place de Belfort de l’annexion tandis que, le Colonel Denfert-Rochereau, à droite, consulte une carte pour définir les axes de renforcement des fortifications établies face aux Prussiens.

Monument Mercié Brochure Arts dans la rue p21 Thiers    Monument Mercié Brochure Arts dans la rue p21 Denfert

Statues de Thiers et Denfert (Figurines du Musée de Colmar)

Au centre, un groupe central connu sous le nom de ‘’In clade decus’’ (L’orgueil dans la défaite ou Malgré la défaite, l’honneur est sauf); formant une allégorie représentant la France soutenant la Ville de Belfort. Sur le devant et au centre, une petite fontaine qui verse son eau au travers de la gueule d'un lion.

NA : Le groupe central sera utilisé pour le Monument des 3 Sièges. Un lien en fin du texte permet d'accéder à cet article.

Les dimensions de la maquette sont de 178 centimètres de longueur, 101 centimètres de largeur et 72 centimètres de hauteur. Au dos de balustrade supérieur est listé la liste des régiments ayant participé au Siège de Belfort.

Maquette Bartholdi Hommage à Thiers & Denfert

La maquette Bartholdi ( Coll. Musée de Belfort)

NA : La maquette est conservée au musée du Château de Belfort, elle a perdu Thiers et la tête de la France. Sur cette photo, Denfert n’est pas à sa place. Depuis, il a rejoint son piédestal…

Lors de l’exposition, la maquette de Bartholdi eut, sans contestation, les faveurs du public.

Projet d’Antonin Mercié

Le sculpteur Antonin Mercié, prix de Rome 1868, lui aussi avait proposé deux projets mettant à l’honneur les deux défenseurs.

Bio Antonin Mercié

Le premier projet montrait le Colonel Denfert-Rochereau l’épée à la main défendant des prussiens, une Alsacienne menacée tenant dans une main un drapeau et dans l’autre un pistolet, tandis qu’Adolphe Thiers, bras levés exprimait sa fougue oratoire. Pour ce dernier, le sculpteur voulant symboliser le négociateur intraitable et pugnace lors du traité de Francfort.

Le second projet était beaucoup moins guerrier, avec une simple colonne portant les médaillons de Thiers et du colonel.

La presse ne fut pas tendre sur le projet principal présenté, considérant la représentation des deux défenseurs, choquante par les attitudes attribuées par le sculpteur... Denfert chargeant les prussiens et Thiers gesticulant !

Belle découverte le 3 février 2015

Lors d’une visite au Musée du Château, j’ai été amené à échanger avec l’assistant au conservateur, sur le peu de documents disponibles sur la statue Quand-Même, par Belfort. Lui montrant les photos des deux maquettes contenues dans la revue municipale de décembre 1969, il me signala qu’il y avait dans les archives du Musée une maquette représentant une colonne avec devant 2 sujets ‘’avachis’’… non identifiée à ce jour. A la description, j’ai supposé que cette maquette fut l’une de celles réalisées par Eugène Guillaume, le directeur de l’École des Beaux-arts de Paris.

Fascicule Belfort Musées

Fascicule Belfort Musées 2020

J'espérais avoir accès à cette maquette pour confirmer ou infirmer mon hypothèse… malgré plusieurs relances, je n'ai jamais pu voir cette maquette ou avoir une photo ! Existe-t-elle encore ou a-t-elle subit une action de "nettoyage" du fond du patrimoine belfortain ? J'en ai bien peur !

Sélection du projet

Dès début octobre 1880, le Comité Thiers-Denfert se réunit pour décider quel projet serait retenu. Le choix devait être acté pour le 10 octobre, mais la décision se fit attendre et fut reportée. Telle la citation d’André Gide ‘’Choisir c’est renoncer’’, c’est ce que fit tout de même le Comité en sélectionnant les projets d’Antonin Mercié, le 24 octobre.

Les deux versions du projet d’Eugène Guillaume furent considérées comme trop classiques voir impersonnelles par leur représentation.

Le projet belfortain bien qu’intéressant, il était de bonne facture, ne fut pas retenu par le Comité car les auteurs n’avaient pas la notoriété attendue. Le Comité jugeant que les dons attendus par la souscription nationale ne seraient pas au rendez-vous avec un projet issu d’un sculpteur local, non reconnu au niveau artistique (national). 

La maquette d’Auguste Bartholdi était monumentale et majestueuse comme souvent, force étant sa créativité, mais par la même sollicitant des budgets très onéreux. De plus l’artiste étant toujours en procès avec la ville et le Comité du Lion, il aurait été difficile de choisir son projet… ce que le Comité du monument Thiers-Denfert ne s’y hasarda point de faire !

CPA Belfort Auguste Bartholdi

Extrait carte postale Auguste Bartholdi (coll. JM)

Le Comité avait certainement plus choisi le sculpteur que l’un de ses projets. Antonin Mercié, titulaire de nombreux titres, avait la réputation attendue pour que le projet puisse recueillir les fonds attendus par la souscription nationale. Par contre, les membres du Comité lui demandèrent de proposer un projet fusionnant les deux concepts.

Comme à l’accoutumé, la presse suivant son audience politique va soit décrier le projet retenu par le Comité, soit l’encenser…

Projet final

Antonin Mercié fier d’avoir remporté le challenge réalisa une nouvelle mouture qu’il présenta dans le cadre du Salon de Paris en 1882.

Les remarques, même acides, ont-elles guidé le sculpteur vers une conception plus moderne ? Son nouveau projet reçut les éloges unanimes. 

CPA Belfort Maquette Statue Quand Même BF 1910-16

Carte postale La maquette de la statue (coll. JM)

En voici, le compte-rendu effectué par Henry Jouin (critique d’art) et rapporté dans son livre "La sculpture de 1881, 1882, 1883 À l’Exposition Nationale de 1883", édité en 1884.

Livre La sculpture aux Salons 1881 1882 1883 p01

De ce groupe nommé "Quand-Même", il en effectua cette description :

"Un soldat est frappé sous les murs de Belfort; il tombe, mais une alsacienne a saisi son arme et le retient par un pli de sa tunique; la défense de la patrie, la lutte pour la France se poursuivra quand même. Ce groupe est fait pour exalter le patriotisme. À ce titre, nous approuvons l’idée, le choix des personnages et l’entrain que l’artiste a su mettre dans la pose, le geste, l’expression de l’Alsace et de son défenseur. Quand-Même est un pendant au Gloria victis*."

*Gloria Victis (Gloire aux vaincus) : Cette allégorie d’Antonin Mercié fut créée (en plâtre) en 1872 du temps qu’il était à la Villa Médicis. Elle rend hommage aux soldats victimes de la guerre franco-prussienne.

Elle obtint une médaille d’honneur au Salon de Paris de 1874, avec un vif succès et fut acquise par la ville de Paris. Fondue par Thiébaut et Fils, elle existe en plusieurs exemplaires de belles dimensions (2,20 mètres de haut) à Paris au musée du Petit Palais, à Bordeaux place Jean Moulin, à Niort place de Strasbourg… à Copenhague.

CPA Bordeaux Statue Gloria Victis  CPA Chalons sur Marne Statue Gloria Victis

Cartes postales Statue Gloria Victis
à Bordeaux et Châlons-sur-Marne (coll. privée)

Un autre fondeur français, Ferdinand Barbedienne, a réalisée de nombreuses copies dans des tailles différentes. L’une d’elles est au National Gallery of Art à Washington.

Le choix du nom "Quand-Même" pour cette statue fait référence à la devise de la Ligue des Patriotes, fondée le 8 mai 1882, "Car, malgré tout, il faut quand même résister".

Nouvelle municipalité = début des querelles

Entre temps, le 11 janvier 1881, un nouveau conseil municipal fut nommé avec le remplacement du maire Louis Parisot, le porteur du projet. Le nouveau 1er magistrat de la ville, Jean-Nicolas Simon, fut nommé par décret du Président de la République, le 11 février.

Livre Maires Belfort Jean-Nicolas Simon

Jean-Nicolas Simon (photo Livre Les Maires de Belfort)

Une commission municipale fut nommée le 1er juillet 1882 en charge du dossier de la statue, composée des conseillers Paul Lalloz, Émile Schmidt, Michel Thiault, Camille Joachim, Abel Beloux et Jean Lauxerois.

Ce changement de municipalité va être le début d'une querelle entre cette nouvelle commission et le Comité Thiers-Denfert, prenant en quelque sorte en otage la future statue !

L’état participa à la souscription par un don de 5000 francs que le conseil municipal décida le 1er juillet 1882 de verser sur ses comptes et non sur celui du monument ! Cette procédure contraria le ministre des Beaux-arts qui fit retirer l'allocation…

Le 17 novembre 1882, le conseil municipal vota même, la destitution de l'ancien maire, Louis Parisot, de la présidence du Comité du Lion avec la volonté de récupérer le reliquat de la souscription déposé chez le banquier Hass !

Pour contrarier ces plans, l'ancien maire demanda au banquier Hass le versement de ce reliquat, environ 14 000 francs, dans la caisse du Comité Thiers-Denfert en charge de la statue…

Photo Louis Parisot

Louis Parisot (photo Livre Les Maires de Belfort)

La nouvelle municipalité attaqua cette démarche en justice. Le tribunal va lui donner raison, le 13 mars 1883. Mais Louis Parisot fit appel, bloquant de fait la démarche.

Parallèlement, la Commission municipale "Simon" réclama au Comité Thiers-Denfert la situation et l’état des comptes sur le projet de la statue. Son président Jules Grosjean nommé par Louis Parisot, mais non reconnu par l'autre bord, répondit au maire le 22 janvier 1883 que la statue était livrée !

La statue avait été réceptionnée quelques jours, auparavant, en gare.

Belfort CPA Av Gare n°4X Gare Cour LL 105

Carte postale Belfort La Gare (coll. JM)

La nouvelle commission apprit, ainsi, que la statue livrée était conservée à Danjoutin dans les locaux de M. Kessler. Cette réponse déclencha une vive réaction de la municipalité qui cria au scandale par voix de presse le 2 février. Le conseil municipal donna pouvoir au maire d’intenter toute action à l’encontre du précédent Comité qui détenait la statue appartenant à la ville.

La Cour d'appel de Besançon, donna tort à la municipalité le 10 décembre 1883, ordonna le transfert des fonds du Comité du Lion au Comité Thiers-Denfert et de fournir le compte de gestion au plaignant. Jules Grosjean avait appuyé la démarche.

La municipalité se porta en cassation après accord de la préfecture, mais le temps joua contre elle ! Car lors des élections du 11 mai 1884, elle dut laisser la mairie... à ses adversaires avec le retour de Louis Parisot comme maire qui fut élu* le 18 mai.

*Élu : Suite à la nouvelle loi municipale du 5 avril 1884, les maires n'étaient plus nommés par le Président de la République mais étaient élus par les conseillers municipaux.

Le 17 juin 1884, la nouvelle municipalité accepta le monument et décida finalement de l'installer sur la place d'Armes devant l'Hôtel de Ville, restait à lui mettre un piédestal à la hauteur de sa prestance.

Belfort Carte Place d'Armes sans monument BF

Carte postale Belfort Place d'Armes nue (coll. BF)

Comme quoi une affaire n'est jamais simple, la municipalité vota, le 9 juillet 1884, le retrait du pourvoi en cassation engagé par la municipalité "Jean-Nicolas Simon" mais l'administrateur du territoire cassa la délibération pour cause de nullité, Louis Parisot ayant participé au vote, était "juge et partie" ! Il fallut attendre le 19 décembre, son annulation par le Conseil d'État après plusieurs allers-retours entre les juridictions.

Épilogue

Le projet initié dès 1873 fut acté le 12 février 1878 par le conseil municipal.

Dès le choix du sculpteur, des polémiques vont naître, elles furent vite éteintes par la qualité de l'œuvre d'Antonin Mercié.

Mais des relations conflictuelles entre les deux bords politiques opposés et alternativement aux manettes de la municipalité, firent que la statue fut prise en otage, en quelque sorte, car livrée en janvier 1883, plus d'un an après, elle n'était toujours pas installée…

Pour la suite de cet article, un lien ci-dessous permet d'accéder au Sommaire ou à la partie suivante de l'article.

JM

Liens pour accéder aux articles cités

Sommaire de la statue Quand-même : Cliquer ici

L'inauguration de la statue Quand-même : A venir

La naissance du Territoire de Belfort : Cliquer ici

Le Monument des 3 Sièges : Cliquer ici

Références : Revues Municipales n°15 et 16 (1969) et sans n° (déc. 1980), Revue Horizon n°117 (1981), Compte-rendu des délibérations des conseils municipaux (Archives municipales Belfort), Wikipédia, Les journaux La Frontière et Le Libéral de l'Est (coll. Archives Départementales du 90), Livre Les Maires de Belfort, Livre Art dans la ville art de vivre,

Infos pratiques  

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