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LE CARTOPHILION
6 juin 2021

Statue Quand-Même d’Antonin Mercié, dimanche 31 août 1884, enfin l’inauguration (3e partie)

Après bien des difficultés, la statue Quand-Même fut installée le 24 août 1884 sur la place d'armes de Belfort, devant l'Hôtel de Ville.

Le Comité Thiers-Denfert et la municipalité avaient organisé les Fêtes de l'inauguration, les 30 et 31 août 1884, pour l'accueillir.

Statue Quand Même RM Déc 1969 p21 Affiche

Affiche annonçant l'inauguration (Revue municipale)

La troisième partie est consacrée à l'inauguration de la statue conçue par le sculpteur Antonin Mercié, précédé du défilé des Mobiles ayant défendu la Place forte lors du Siège de 1870-1871.

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder au Sommaire et aux parties précédentes de l'Article.

Les Fêtes de l'inauguration

Elles avaient débuté le samedi 30 août avec l'accueil à la gare des premières délégations des Mobiles invitées. De nombreux autres visiteurs étaient venus pour participer à ces Fêtes.

Ils avaient pu assister à une retraite aux flambeaux et découvrir les illuminations de la ville et de ses faubourgs, mais pas la statue qui resterait voilée jusqu'à son inauguration.

Dimanche 31 août 1884, le matin

Le grand jour est enfin arrivé en ce dimanche 31 août 1884 et dès 7 heures du matin, une salve de canons fut tirée au Château pour lancer cette grande journée.

Belfort CPA Château Lion Décoration autour

Carte postale Belfort Le Château et le Lion (coll. JM)

Les environs de la gare étaient très animés avec l'arrivée de nombreux autres mobiles venant participer à l'inauguration et de nombreux visiteurs tout autant attirés par l'évènement dédié à Adolphe Thiers et au colonel Denfert-Rochereau.

Comme la veille, de nombreux trains supplémentaires furent ajoutés sur la ligne venant de Mulhouse, à partir de Petit-Croix, première station en limite de la frontière.

CPA Petit Croix Gare BF

Carte postale Petit-Croix La gare (coll. BF)

Le presse nationale et régionale avait commandité ses repprésentants pour couvrir l'évenement, comme le Monde, le Matin, le Rappel de Voltaire, L'Illustration, le Lyon Républicain, le Progrès de Lyon, le Mémorial des Vosges, le Petit Comtois, le Quatorze Juillet de Montbéliard…

1884 09 01 SDtatue Quand Même Le Matin R

Extrait Journal Le Matin 1er septembre 1884 (doc. Gallica)

Au programme du matin, les animations furent consacrées à des exercices de démonstration.

À 9 heures, sur la place des Écoles, les sapeurs-pompiers proposèrent plusieurs exercices où ils devaient montrer leur force, leur rapidité d'intervention tout comme leur habilité à manœuvrer avec leurs équipements.

Belfort CPA Série bleue A 9230 Place Ecoles R

Carte postale Belfort Place des écoles (coll. JM)

À partir de 10 heures sur la place du théâtre, à nouveau des exercices mais par la Société de Gymnastique L’Alsacienne de Belfort. Là aussi, les gymnastes proposèrent des enchaînements, des figures et des mouvements d'ensemble.

Par ailleurs, plusieurs sapeurs-pompiers étaient aussi des gymnastes.

Un nombreux public était venu voir les différentes démonstrations qui furent chaleureusement applaudies.

Si le matin, le temps fut mi-figue mi-raisin, mais peu à peu le soleil va s'imposer pour donner plus de lumière à l'inauguration.

Dimanche 31 août 1884, l'après-midi

Quand vint midi, plus de 35000 visiteurs avaient envahi la nouvelle Cité du Lion pour honorer la mémoire des deux défenseurs. Cet engouement dépassa largement les attentes des organisateurs. Il était extrêmement difficile de se déplacer dans les faubourgs de Belfort, noirs de monde.

12h30, Rassemblement et formation du cortège

Le lieu de rendez-vous des participants au cortège était la place des Écoles. Ce rassemblement fut un grand moment de retrouvailles et d’émotions pour les hommes ayant participé à la défense de la ville, quatorze ans plutôt. Contents de se revoir mais aussi malheureux d'apprendre que d'autres étaient décédés !

place des écoles

Gravure de la place des écoles (Guide de Belfort, coll. BF)

Malgré ces grands moments de fraternité, les différents groupes devaient se former pour composer le cortège suivant le plan établit et piloté par Émile Triponé, l'ancien officier de l'artillerie mobile du Siège.

Les clairons mirent fin aux échanges, ordonnant aux Mobiles de rejoindre leurs rangs pour permettre le départ du défilé.

13h30, Départ du cortège

Le cortège formé devait rejoindre la place d'Armes suivant cet itinéraire : départ de la place des Écoles pour rejoindre la rue Thiers par le faubourg de Montbéliard, puis l'avenue de la Gare en direction du faubourg de France, le pont sur la Savoureuse, la route du Fourneau, la Porte Neuve, la rue des Armes et enfin la place d’Armes. Tout au long du parcours, le défilé fut chaleureusement applaudi, accompagné de vivats tels "Vive la France !", "Vive la République !"…

Trajet Inauguration Statue Quand Même 1884 Plan 1889

Parcours du cortège (réal. BF)

Le cortège constitué démarra à 13h30.

Pour ouvrir la route aux Défenseurs de Belfort, un détachement de 6 cavaliers, du 11e Hussard, suivi des tambours et clairons des sapeurs-pompiers de Belfort, devant les clairons des sociétés de gymnastique de Belfort et Montbéliard. Ensuite, venaient les musiques de la Lyre Belfortaine et du 42e Régiment d’infanterie jouant des pas redoublés toujours fort appréciés par le public.

Elles précédaient le drapeau de l'hôtel de ville pendant le Siège, porté par M. Huntz-Buchler, le doyen des médaillés du Siège; derrière la relique, des médaillés de la ville, MM. Ballet, Beck, Chauvet, Dépierre, Mathey, Montpellier, Odenthal, Perrin et Vidal. Suivaient des officiers encore en activité, Adolphe Dubois porte-drapeau du 96e RI, Christin, Lafosse et Riss.

Vint ensuite le drapeau de la société de gymnastique de Paris, L'Alsacienne, porté par son président, M. Fritsch escorté de gymnastes armés.

CPA Rennes Société Alsacienne de Paris

Carte postale L'Alsacienne de Paris (coll. privée)

Suivaient les drapeaux des sapeurs-pompiers de la ville et de la société local de gymnastique, L'Alsacienne.

    1er groupe

Après les drapeaux, les différents groupes en commençant par les Mobiles du Haut-Rhin, la plus forte délégation, avec environ 500 anciens défenseurs. Au début du groupe, deux immenses couronnes de fleurs, l'une avec des reines-marguerites violettes en honneur du colonel Denfert et la seconde avec des œillets blancs en mémoire de leurs anciens compagnons ayant donné leur vie pendant le Siège. Parmi des eux des anciens officiers, dont Eugène Bornèque, Belin, Koechlin…

Toujours dans ce groupe, une autre couronne de forme ovale, avec palmes de feuilles de lauriers, et rehaussée d'un nœud tricolore, où l'on pouvait lire l'inscription "A Thiers et Denfert, la 5e batterie de l'artillerie mobile du Haut-Rhin". La couronne fut offerte par les deux frères Triponé.

    2e groupe

Après les Mobiles du Haut-Rhin, vint la musique de Beaucourt qui jouait ses plus beaux morceaux. Elle ouvrait pour la bannière de la Ligue des Patriotes, derrière laquelle avait pris place, une de ses affiliées, la Société d'escrime belfortaine. Là aussi, deux immenses couronnes décorées avec des immortelles.   

Jeton Ligue des Patriotes 1882 Bronze

Jeton de la Ligue des Patriotes 1882 (coll. privée)

Avaient pris place dans ce groupe, les défenseurs belfortains et des anciens défenseurs de tout le territoire. Plusieurs couronnes étaient présentes dont celle offerte par la Ville de Belfort "À la mémoire de ses anciens défenseurs" portée via un brancard par MM Correy père, Moissonnier père, Felmann et Lecture. Une deuxième pour honorer Thiers et Denfert, elle portée par MM. Correy, Émile Jenne, Roy, Octave Marie et Huchet.

D'autres couronnes, avec celle offerte par la 1ère Compagnie des mobilisés, rappelaient les noms des camarades morts pour la patrie, celle offerte par les mobilisés du Haut-Rhin à la mémoire de leurs anciens camarades enterrés au Vallon, avec à leur tête leur ancien capitaine, Gustave Bornèque.

    3e groupe

En tête du 3e groupe, les musiques de Giromagny et de Montbéliard devançaient les délégations des Mobiles du Rhône dont ceux de Tarare, sous la conduite du commandant du Fort de Bellevue, la capitaine Édouard Thiers qui eut un comportement remarquable lors du Siège.

CPA Belfort Siège H Capitaine Thiers

Carte postale Edouard Thiers (coll. JM)

Il portait une couronne en feuilles de chêne parsemée de roses, à la mémoire de son supérieur.

Suivaient les différentes délégations des anciens Mobiles de Haute-Saône qui elles aussi, étaient venues avec de très belles couronnes.

    4e groupe

Le 4e groupe était emmené par les fanfares de Bavilliers et de Valdoie qui précédaient les délégations des anciens artilleurs Mobiles de la Haute-Garonne sous la conduite de leur ancien capitaine Blot et de leur ancien maréchal de Logis, Pons. Ce dernier avait créé une société amicale réunissant des anciens défenseurs permettant de conserver un lien entre eux; chaque année, un banquet les réunissaient en mémoire de leur participation au Siège de Belfort.

La Vôge n°39 2011 p46 Musique 1830 1914

Fanfare de Bavilliers (doc. La Vôge)

Eux aussi, avaient une belle couronne d'immortelles pour la mémoire de leurs camarades morts à Belfort. Mais aussi, deux médaillons sculptés et dorés à la mémoire de Thiers et de Denfert; au centre, les armes de la ville de Toulouse, surmontées du Lion de Belfort et les divers postes de combat occupés par les canonniers toulousains, le Château mais aussi le front du faubourg de France, les différents forts, Bellevue, les Barres, les Basses et Hautes Perches.

Le 4e groupe comprenait les délégations des anciens Mobiles de Saône-et-Loire et des Mobiles des Vosges.

S'était jointe à ce groupe, une forte délégation des alsaciens du faubourg des Vosges qui défilèrent avec une bannière et elle aussi, avait une couronne composée d'immortelles à la mémoire des deux illustres défenseurs.

Suivaient l'Union chorale belfortaine avec son président M. Vuidard et la Société des Sauveteurs du Haut-Rhin avec leur président M. Armbruster et leur vice-président, le commandant Beck.

En fin de cortège, un peloton de cavaliers du 11e Hussard fermait ce long serpent d'environ un demi-kilomètre, avec une tenue toute militaire.

CPA Hussard Illustration Toussaint XX

Carte postale Groupe de hussard, illustration Toussaint (coll. privée)

Tout le long du trajet, une foule immense avait envahi les trottoirs, tout comme les habitants des immeubles sur le parcours étaient sur leurs balcons ou penchés par leurs fenêtres, pour applaudir, lancer des vivats "Vive la France !", "Vive l'Alsace !", "Vive la République !"....

Quand le défilé déboucha sur la place d'Armes, il dut se frayer un passage tant l’espace était saturé par la présence du public, pour pouvoir accéder à la statue Quand-Même. En tête, le vieux drapeau en loque de l’Hôtel de Ville, porté par le doyen des médaillés du Siège M. Huntz-Buchler, ancien sous-officier de la Garde nationale.

14h00, début de l'inauguration

Sur la place d'Armes avait pris place la musique du 35e Régiment d'infanterie qui joua de nombreux morceaux en attendant l'arrivée du cortège.

CPA Belfort 35e RI BF

Carte postale Musique 35e Régiment d’infanterie (coll. BF)

Des tribunes étaient installées sur la place d'Armes noire de monde, pour accueillir les corps constitués civils et militaires ainsi que les invités.

Dans la tribune officielle, on pouvait voir le Commandant Fayet représentant le Président de la République, le général Wolff représentant lui le ministre de la Guerre, l'administrateur du territoire Fernand Duflos, le député et président de la Ligue des Patriotes Anatole de la Forge, le maire Louis Parisot, le président du Comité du monument Jules Grosjean, les sénateurs François Vieillard-Migeon (Belfort) et Jean Noblot (Haute-Saône), et beaucoup d’autres personnalités civiles et militaires… dont l’ancien maire du Siège, Edouard Mény.

1884 Photo Statue Quand Même Tribunes

Photo de l’inauguration sur la Place d’Armes (coll. BF)

Un rappel au clairon rappela à chacun de prendre place suivant les instructions données. Les drapeaux se positionnèrent devant la statue avec toujours en bonne place, le vieux drapeau en loque de l’Hôtel de Ville.

Les officiels ayant pris place eux aussi, la Marseillaise fut entonnée par les musiques réunies du 35e, du 42e et de la Lyre Belfortaine sous la baguette de M. Bouzerand, chef de musique du 42e.

1884 09 04 Belfort Inauguration Statue Quand-Même Le Monde Illustré

Dessin de M. de Haenen sur l’inauguration (Le Monde Illustré, coll. privée)

Une nouvelle fois, une salve de canons fut tirée du Château pour saluer le dévoilement de la statue sous les hourras du public qui pour la plupart découvrait l’œuvre d’Antonin Mercié.

À cet instant, l’émotion parcourut la foule à la vue de la sculpture et pendant de longues minutes, le public applaudit, lança vivats et bravos à la cantonade.

Photo Carte Belfort Statue Quand Même XX

Photo carte Belfort Statue Quand-Même (coll. privée)

Antonin Mercié a voulu, par son groupe, montrer que même la mort n’arrête par la lutte, d’autres prennent la relève. Quand-Même !

Le rédacteur en chef du quotidien de la capitale, "Paris", Charles Laurent, de son vrai nom, Charles-Michel-Clément Quillevéré, en fit cette description :

"Une robuste Alsacienne, la coiffure au vent, retient d'un geste superbe un soldat qui tombe mort. Ses doigts crispés dans l'uniforme en lambeaux accrochent ce corps qui s'abandonne et tentent de le remettre debout.
De la main gauche, elle brandit le fusil qui échappait au pauvre mourant. Son simple et doux visage de paysanne est transfiguré par l'émotion patriotique; le furieux mouvement qui anime tout son corps imprime à son costume des plis et des frottements de jupe qui ressemblent à des claquements de drapeau dans le vent…

CPA Belfort Statue Quand Même XX Extrait

Extrait carte postale Belfort Statue Quand-Même (coll. privée)

L'homme est frappé, sa force l'abandonne, ses armes lui échappent; il s'est bien battu, mais c'est fini… Il marchait sans souliers et vivait presque sans pain. Sa capote bleue était devenue grise de poussière et de boue; son pantalon rouge usé par le bivouac et par la marche, portait mainte blessure et le couvrait à peine; mais n'importe ! Le pauvre piou-piou… "

En voyant le monument, certains regrettaient que les deux hommes illustres honorés soient réduits à la présence de leur profil sur un bas-relief !

Discours de Jules Grosjean (extrait)

Il revint à Jules Grosjean, l'ancien préfet du Haut-Rhin qui partagea avec la population de Belfort, le Siège de 1870-1871, et président du Comité Thiers-Denfert, l’honneur d’effectuer le premier discours.

Belfort Photo Préfet Grosjean

Jules Grosjean, le président du Comité (photo JM)

Après avoir remercié les autorités présentes, il rendit hommage au président Thiers et au Colonel Denfert-Rochereau et commenta la statue créée par le sculpteur Antonin Mercié. Il fut pris par l’émotion, des larmes apparurent sur ses joues, et sa voix perdit de l’assurance en revenant sur les 110 jours du Siège dont 80 jours de bombardements où tant de vies se sont éteintes. Il remercia les soldats et mobiles présents d’être venus, il y a quinze ans, de Haute-Garonne, du Rhône, de Saône-et-Loire, de la Haute-Saône et des Vosges.

CPM Adolphe Thiers

Extrait carte postale Adolphe Thiers (coll. privée)

Au nom du Comité Thiers-Denfert qui arrivait au terme de son existence, il remercia les souscripteurs, les artistes qui avaient enfantées l'œuvre, le conseil municipal, le Président de la République et le ministre de la guerre qui s'étaient faits représentés, l'Armée et la Ligue des Patriotes.

Il continua son discours "Messieurs, L'hommage que nous rendons aujourd'hui à la mémoire du président Thiers et à celle du colonel Denfert n'acquitte pas la dette de reconnaissance que nous avons contractée envers ces deux grands citoyens… C'est grâce à eux qu'on a conservé la nationalité française."

Il poursuivit "Messieurs, Le bronze que vous avez sous les yeux est l'œuvre d'un grand artiste, Antonin Mercié. Convaincu qu'il était artistiquement impossible de réunir dans un même grand groupe deux hommes si dissemblables, il a cherché le lien qui les unit…"

CPA Belfort Statue Quand Même BF 1910-18a

Extrait carte postale Belfort Statue Quand-Même (coll. BF)

"En glorifiant de la façon la plus haute les deux mémoires qu'il avait à rappeler, Mercié a du même coup coulé en bronze deux souvenirs… celui de l'Alsace, la grande sacrifiée de 1871, et celui des hommes qui ont payé de leur sang, à Belfort, leur dévouement à la Patrie."

Il rendit hommage aux hommes qui avaient défilé eux qui étaient venus du Rhône, de la Haute-Garonne, de Saône-et-Loire, de la Haute-Saône et des Vosges ''Ils ont tous prit part à la défense de Belfort en 1870, ils avaient vingt temps, pleins d'ardeur, d'enthousiasme, de généreuse insouciance. Vous avez été de vaillants soldats !"

La parole sincère et émue impressionna l'auditoire et quand il s'adressa à ses compatriotes d'Alsace, l'émotion lui brisa la voix et les larmes coulèrent de ses yeux !

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder au discours complet de Jules Grosjean.

Discours de Louis Parisot (extrait)

Ensuite, le maire Louis Parisot prit la parole et rendit lui aussi hommage aux deux défenseurs, au sculpteur et au Comité.

Photo Louis Parisot

Louis Parisot, le maire de Belfort (photo, coll. privée)

Il fit l'éloge de Thiers en retraçant la partie de sa vie qui a trait au conflit et à ses suites… "Il accepta, par patriotisme, la mission d'aller dans les principales capitales d'Europe pour demander leur appui ou tout au moins leur médiation; il revint en France découragé par l'absence d'aide concrète ! Il fut nommé par l'Assemblée Nationale pour négocier le traité avec la Prusse. Face à un adversaire inexorable posant ces conditions comme un ultimatum, avec 5 milliards d'indemnité et la cession de trois départements, il ne put sauver Metz mais il arracha aux serres de l'aigle de Prusse, ce petit lambeau de l'Alsace… Belfort fut sauvé."

Louis Parisot rappela que ce succès était conditionné au payement de la rançon et là encore Thiers sut réorganiser les finances du pays pour que le 2 août 1873 fut le terme de l'occupation des derniers départements, "Il mérita le titre de Libérateur du Territoire, qui lui fut décerné par la France entière. Pour nous tous, il nous a sauvé de l'annexion. Gloire à lui !"

Le maire poursuivit ses hommages avec ceux adressés au colonel Denfert-Rochereau, rappelant "qu'il n'avait eu que trois mois pour préparer la défense de la ville que le gouvernement impérial, dans son imprévoyance, avait complétement négligée et pour laquelle rien n'avait préparé pour soutenir un siège en cas de revers."

CPA Colonel Denfert Rochereau XX

Carte postale Colonel Denfert-Rochereau (coll. privée)

En quelques semaines, il avait renforcé les forts des Perches, et le fort de Bellevue, ouvrage à son initiative, avait empêché les prussiens dans leur projet d'une prise de la Place par surprise. Les dispositions prises conjuguées avec la vaillance des troupes démontrèrent une sérieuse résistance aux tentatives prussiennes qui croyait faire tomber Belfort en huit jours.

Le général Treskow qui crut après six semaines de tranchées ouvertes, enlever d'assaut les fortifications, connu l'échec. "Le colonel Denfert n'ouvrit les portes de la ville que sur l'ordre du gouvernement. Depuis vingt jours que l'armistice était signé, le canon de Belfort grondait toujours. Il sortit avec drapeaux, armes et bagages hors de la présence de l'armée prussienne."

Belfort CPA Siège Série n°2 Gal Von Treskow

Carte postale Général von Treskow (coll. JM)

Louis Parisot présentant la statue dit "Nous avons voulu qu'un monument en consacrât le souvenir pour les générations futures. Merci donc au grand artiste à qui nous le devons. Monsieur Mercié, en voyant le chef d'œuvre sorti de son ciseau érigé sur une place qui fut labourée par les projectiles ennemis, ne devait pas désirer pour lui un plus bel emplacement.

Ne semble-t-il pas dire : je suis ici Quand-Même !"

Il remercia le Comité et son président qui avait accompli la mission que la ville leur avait confiée. Revint sur la symbolique de la statue puis termina son discours par un "Vive la France !"

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder au discours complet de Louis Parisot.

Discours d'Anatole de la Forge (extrait)

Le député de la Seine et président de la Ligue des Patriotes, Anatole de la Forge, rendit hommage à Belfort illustré par l'héroïsme de sa défense.  

Anatole_de_La_Forge Wikipédia

Anatole de la Forge, député (photo Wikipédia)

"Sur ce territoire, conservé à la France par votre courage, l'héroïsme de nos soldats et à l'habilité patriotique Thiers, la touchante cérémonie qui nous rassemble à une signification précise. Nous sommes venus rendre un pieux hommage aux morts illustres et aux morts obscurs que nous pleurons.

Gloire à ces Français de la tombe, et honneur à vous habitants de Belfort, qui, en partageant leurs dangers, avez, comme eux, bien mérité de la patrie."

Discours de Joseph Fabre

Le dernier discours fut celui de Joseph Fabre, député de l’Aveyron, qui fit un parallèle entre les défenseurs de Belfort et Jeanne d'Arc, le plus bel exemple de patriotisme.

Joseph Fabre Site Sénat

Joseph Fabre, député (photo Site du Sénat)

Tous les discours furent chaleureusement applaudis et souvent ponctués des "Vive la France ! Vive la République".

Poésie "Quand-Même"

Après les discours vint un moment de poésie en l'honneur de la statue érigée sur la place d'Armes.

Initialement, l'acteur Mounet-Sully (Jean-Sully Mounet) de la Comédie Française devait lire sa poésie "Quand-Même", écrite avec son frère, mais il avait dû rester sur Paris et ce fut Paul Leser, le rédacteur en chef du journal "L'Alsacien-Lorrain", qui eut l’honneur de le suppléer.

De ton socle, là-haut, Lion, tu nous regardes.
Ces étendards semés sur le roc que tu gardes,
Et cette foule immense éparse sous les cieux,
Ces chants et ces discours troublent ton âme altière,
Sentinelle veillant auprès de la frontière
Pour nos foyers et nos dieux.

Mais ne sois pas jaloux de cette autre statue
Symbole des douleurs de la France abattue
Qui rappelle à nos fils l'effort désespéré.
Tourne ton œil hautain vers ce vivant emblème.
Cette femme, entends-tu, jette ce cri : Quand-Même !
Quand tu rugis ; Je maintiendrai !

Cette poésie clamée par Paul Leser avec un grande énergie remua profondément le public qui, à chaque strophe, reçue de frénétiques applaudissements. À la fin de sa prestation talentueuse, il fut chaudement acclamé sous les vivats.

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder à la totalité de la poésie qui est aussi attribuée à Amélie Ernst !

Pour terminer la première partie de la cérémonie se déroulant sur la place d'Armes, deux hymnes furent proposés à l'assistance.

Le premier hymne intitulé "Lion de Belfort", paroles de Dauthenay et musique d’Alexandre Vallée, fut interprété par la chorale de L'Union Belfortaine accompagnée par les 130 musiciens des 35e et 42e Régiments d'infanterie, sous la conduite de Auguste Duffner qui avait assuré l'arrangement pour cette occasion. En voici les premiers vers…

République, sous ton égide
Célébrons ce beau souvenir !
Et qu'il soit une éphéméride
Pour la France de l'avenir !

Le second hymne intitulé "Hymne à Denfert",  musique de M. Krantz, fut dirigé par M. Hausser chef de musique du 35e RI, avec l’appui du chœur de l’Union Belfortaine.

Ces deux hymnes parfaitement interprétés reçurent un torrent d'applaudissement par le public, fort conquis.

Mais les cérémonies n’étaient pas totalement finies car, le cortège accompagné des autorités civiles et militaires, des invités, prit la direction du cimetière des Mobiles pour honorer les militaires morts lors du conflit.

Deux souvenirs

Après les discours, six jeunes filles vêtues en blanc avec ceinture et cocarde tricolore, accompagnées de gymnastes de L'Alsacienne, ont distribué aux anciens défenseurs et aux invités, de la part de Ligue des Patriotes, une médaille commémorative et une lithographie représentant la statue Quand-Même.

Sur l'avers de la médaille était la statue Quand-Même et l'envers, la formule "Qui vive ? – France Souviens toi".

NA : Je suis intéressé à voir ces deux souvenirs !

Après la distribution de ces souvenirs qui firent énormément plaisirs aux receveurs, les délégations se reformèrent pour un nouveau défilé en direction du cimetière des Mobiles.

Épilogue

Après bien des difficultés, la statue était Quand-Même inaugurée le 31 août 1884. Si l'attente fut longue, elle fut récompensée par une très belle Fête d'inauguration avec la présence de très nombreux Mobiles qui furent les Défenseurs de Belfort en 1870-1871.

Antonin Mercié pour la conception de sa statue, érigée en hommage à Adolphe Thiers et au colonel Denfert-Rochereau, avait préféré symboliser l'Alsace défendue par un Moblot, lui-même blessé, à une double statue.

Pour la suite de cet article, un lien ci-dessous permet d'accéder au Sommaire ou à la partie suivante de l'article.

Liens pour accéder aux articles cités

Statue Quand-même Le sommaire : Cliquer ici

Inauguration, les discours (doc AMB) : Cliquer ici

Statue Quand-même Au Monument des Mobiles  (4e partie) : A venir

JM

Références : Revues Municipales de Belfort, Revue Horizon Chambre de commerce, Compte-rendu des délibérations des conseils municipaux et le dossier Statue Quand-Même (Archives municipales Belfort, AMB), Les journaux La Frontière, Le Libéral de l'Est et Le Journal de Belfort (coll. Archives Départementales du 90), Livre Art dans la ville art de vivre, Wikipédia,

Infos pratiques 

Vous pouvez laisser des commentaires sur cette présentation via le lien "Commentaires" en fin de l'article après la liste des tags.

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