La construction de la Salle des Fêtes de Belfort : Lot 7 (2e partie) Les décors de scène

Après les gros œuvres (maçonnerie, toiture et zinguerie), puis les finitions intérieures (menuiserie, plâtrerie, peinture, éclairage et chauffage), à ce stade, il restait à réaliser, entre-autre, les équipements de la scène de la nouvelle Salle des Fêtes de Belfort.

Parmi ceux-ci comprenaient les décors de scène intégrés dans le Lot 7.

Extrait document (Traité de scénographie, doc. JC)

Je lève le rideau sur cette neuvième partie de l'article qui est donc consacrée aux différents décors (châssis, rideaux…) permettant de fournir aux acteurs ou autres, un environnement en adéquation avec l'objet de leurs prestations.

NA : En fin de texte, un lien permet d'accéder au Sommaire des articles sur la Salle de Fêtes, dont ceux consacrés aux Lots 1 à 7 (1^ère partie).

Le devis des décors

Comme écrit dans l'article sur la machinerie, ce Lot 7 ne fut point l'objet d'un devis mais d'une estimation par l'architecte municipal Charles Emond. Il avait prévu une enveloppe de 15000,00 francs pour couvrir les dépenses d'acquisition de la machinerie et des décors de la scène, et de l'ameublement de la grande salle, sur un budget total à 245000 francs.

Ce Lot 7 est donc éclaté en 3 parties et traitées séparément

  - 1^ère partie : La machinerie
  - 2^e partie : Les décors
  - 3^e partie : L'ameublement

NA : Chaque partie du Lot 7 font l'objet d'un article spécifique.

Attribution du Lot 7 (2^e partie) : les décors de scène

Comme pour les lots précédents, le Lot 7 fit partie de la démarche d'adjudication choisie et effectuée par la municipalité par voie d'affichage et de presse, mi-août 1911, pour l'ensemble des lots prévus pour la construction du futur bâtiment.

A la date d'ouverture prévue du 5 septembre, plusieurs lots furent sans offre ou avec des offres supérieures aux devis donc non acceptables au regard des règles applicables dans ce type de processus.

Extrait affiche annonçant l'adjudication du mardi 5 septembre 1911
(doc. AMB)

Face à cette situation, la municipalité décida de traiter de gré à gré avec les entreprises.

Pour cette partie du Lot 7, à défaut d'offre, elle chargea l'architecte municipal de contacter des entreprises spécialisées en décors de théâtre pour obtenir des devis permettant de choisir celle qui sera chargée de fournir et d'installer l'équipement.

Lors de son estimation, l'architecte municipal, Charles Emond, avait prévu une enveloppe pour les décors de 3400 francs. Mais avant de prospecter, il demanda confirmation au maire sur l'équipement à acheter.

En novembre 1912, l'architecte reçu un courrier de l'un des deux associés de la Société A. Tirlet & Numa, spécialisée dans la décoration théâtrale, installée à Paris; ils s'étaient rencontrés précédemment par l'entremise de Marcel Danjean. Il se proposait pour réaliser les décors de la scène de la future Salle des Fêtes.

Extrait courrier de l'entreprise A. Tirlet & Numa (doc. AMB)

Il lui rappelait que sa société avait des références à Belfort, ayant réalisé les décors des scènes du Café Danjean, du Kursaal et de la Grande Taverne. Il précisait aussi qu'il travaillait avec la Société Léon Duvergée sur des projets communs, comme pour le théâtre de Fontainebleau.

Le mois suivant, il reçut un courrier de l'entreprise A. Hackspill, implantée elle aussi à Paris, qui proposa ses services pour l'exécution des décors.

Extrait courrier de l'entreprise A. Hackspill (doc. AMB)

Au regard du choix de l'entreprise Duvergée pour la livraison de la machinerie, la municipalité préféra contracter avec l'entreprise A. Tirlet & Numa pour la fourniture des décors; les deux sociétés travaillant ensemble sur de mêmes projets, elle jugea cette décision comme une garantie, complétant les retours d'expériences positifs de leurs interventions à Belfort.

Comme pour la machinerie, la municipalité évolua sur le niveau de l'équipement à acquérir, qui passa de 3 décors simples à un kit complet de 6 ensembles permettant aussi d'accueillir les spectacles des tournées parisiennes.

Dès avril 1913, l'architecte municipal établit un rapport pour la municipalité avec les deux versions, en mettant en avant l'évolution souhaitée; le nouveau devis s'élevait à 7521,20 francs.

Extrait rapport de l'architecte (doc. AMB)

Lors du conseil municipal du 22 juin 1913, l'adjoint du maire, Xavier Houbre, informa les conseillers de l'état d'avancement dressé par la Commission des travaux et des finances sur la construction de la Salle des Fêtes.

Concernant les décors, la commission préconisait que le nombre de décors soit porté à six pour "permettre les représentations de pièces bien différentes sur la scène de la Salle des Fêtes".

Extrait de la délibération (doc. AMB)

Au regard des éléments fournis, le conseil municipal ratifia la proposition et valida le budget supplémentaire nécessaire (4121,20 francs).

Une nouvelle fois, le préfet demanda des éclaircissements concernant le budget supplémentaire voté par rapport au devis initial avant de valider. Pour y répondre, la mairie dut soumettre un engagement de dépenses, en reprenant le devis de l'entreprise A. Tirlet & Numa; il fut validé par la préfecture le 29 novembre 1913.

Extrait du document validé par la préfecture (doc. AMB)

Donc une validation qui fut actée après que l'entreprise ait engagé la fabrication des décors. Je suppose qu'elle avait acceptée de réaliser des décors prévus au devis, sans avoir la commande officielle de la ville.

Description des décors

La scène de la Salle des Fêtes fut équipée avec

   - Le rideau d'avant-scène, avec un lambrequin, deux manteaux et une draperie

     Cet ensemble s'articule ainsi

       - le lambrequin : rideau à demeure en partie supérieure derrière le cadre de scène; il peut être décoré du blason de la ville ou autre
       - le rideau de scène : on l'ouvre pour voir la scène
       - le manteau : rideau type frise permettant de gérer la hauteur visible de la scène
       - les draperies : rideaux latéraux permettant de gérer la largeur visible de la scène

Position du rideau du manteau d'Arlequin (Dico du théâtre, doc. JC)

   - Un décor "parc" avec un rideau de fond, une frise 1^er plan, une frise 2e plan, un châssis Jardin 1^er plan, un châssis Jardin 2^e plan, un châssis Cour 1^er plan, et un châssis Cour 2^e plan
   - Un décor "place publique" avec un rideau de fond, deux frises, deux châssis 1^er plan, deux châssis 2^e plan, un châssis milieu, et un châssis et un mur grille

Exemple de décors d'une présentation jouée au théâtre municipal

(coll. JM)

   - Un décor "palais" avec un rideau de fond, une frise 1^er plan, une frise 2e plan, deux châssis 1^er plan et deux châssis 2^e plan
   - Un décor "salon riche" avec une ferme du Salon, un oblique Cour, un oblique Jardin, une applique fenêtre, deux découvertes et un plafond plat
   - Un salon "rustique" avec une ferme type Rustique (le plafond précédent servant aux deux décors).

Exemple de décors d'une présentation jouée au théâtre municipal
(coll. JM)

NA : Les deux cartes photos concernant une vente de charité en 1912 font l'objet d'articles; un lien permet d'accéder à ceux-ci.

Pour mémoire, la machinerie permettait de manœuvrer cinq équipes* donc cinq éléments de décors (hors châssis posés sur le plancher).

*Équipes : L'ensemble des éléments mécaniques (cordages, mère de famille, moufles, contrepoids et porteuse ou perche) nécessaires pour manœuvrer un élément de décor, un rideau, une rampe d'éclairage…

Fig. 5 : Exemple de rideau manœuvré avec contrepoids

Déroulement des travaux du Lot 7, les décors

L'installation d'une partie des décors, du moins ceux étant constamment présents, le rideau de l'avant-scène et le manteau d'Arlequin, était dépendant du montage de la machinerie.

Dès début septembre, la réalisation des décors fut engagée par l'entreprise et terminée à mi-novembre. Au 1^er décembre 1913, les décors étaient rendus disponibles à Belfort, ne restait plus que la pose à effectuer pour ceux décrits ci-dessus et valider la conformité des autres.

Extrait de l'état des lieux (doc. AMB)

Le marché de gré à gré fut passé à l'entreprise A. Tirlet & Numa, que le 5 décembre 1913, donc postérieurement à la livraison des décors.

Extrait du procès-verbal d'adjudication du Lot 7 (doc. AMB) 

Il fut validé le 10 décembre par la préfecture.

Les travaux furent terminés courant décembre; le rideau d'avant-scène fut transformé, donnant plus d'amplitude à la draperie et par l'ajout de dentelles. Apparemment, sa couleur était vieille or.

Carte postale humoristique (coll. privée)

La réception provisoire fut prononcée le 23 décembre 1913, en même temps que celle de la machinerie. Logique, car ce fut l'entreprise Léon Duvergée qui fit l'installation.

Extrait du procès-verbal Réception provisoire (doc. AMB)

Bilan financier du Lot 7

Le montant des travaux effectués par l'entreprise A. Tirlet & Numa fut conforme au montant du devis réactualisé à 7521,20 francs lors du vote, du 22 juin 1913, par le conseil municipal.

Le procès-verbal de réception définitive fut établi seulement le 20 janvier 1915.

Extrait du procès-verbal Réception définitive des travaux (doc. AMB)

La municipalité avait demandé des décors supplémentaires à l'entreprise afin que la Tournée parisienne Barret puisse effectuer des présentations à la Salle des Fêtes; elle ne voulait plus intervenir au théâtre, est-ce la raison de cette validation très tardive ?

Fin de la 9^e partie, la suite à découvrir via le Sommaire (lien ci-dessous).

Épilogue

Les travaux du Lot 7 concernant la fourniture des décors et la l'installation d'une partie (fixe) furent réalisés pour l'inauguration de la Salle des Fêtes, le 4 janvier 1914, par la Société parisienne A. Tirlet & Numa.

Cette partie est dépendante en tant qu'exploitation de la machinerie.

JM

Liens pour accéder aux articles cités

Sommaire des articles sur la Salle des Fêtes : Cliquer ici

Cartes photos Vente de charité en 1912, 1ère carte : Cliquer ici

Références : Dossier Salle des Fêtes (Archives municipales de Belfort, AMB), Livres Dictionnaire raisonné et illustré du théâtre à l'italienne et Traité de scénographie (collection Jacques Courtot, JC)

Infos pratiques  

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