1989, Naissance des Eurockéennes

MAJ le 30 juin 2023

En 1989, naissait un festival de musique dans le Territoire de Belfort qui ne portait pas encore le nom Eurockéennes mais l’appellation, Le Ballon Territoire de Musique !

Cette 30^e édition démontre que ceux qui ont œuvré à cette création et assuré son développement au fil des années, sont récompensés par l’ancrage du festival terrifortain, comme rendez-vous incontournable chaque année, au début de l’été.

Affiche Eurockéennes 2018

Un peu d’histoire…

Il fut créé en 1989 à l’initiative du Conseil Général du Territoire de Belfort dont le but était de promouvoir le département.

Son président, Christian Proust eut l’idée fin 1987 de lancer un festival de musique à l’image du Leysin Rock Festival né en 1987 à Leysin dans le canton de Vaud, en Suisse.

Affiche de la 1^ère édition du Leysin Rock Festival

Début 1988, le Conseil général choisit comme présidente du projet, Marlies von Pistor qui a une bonne connaissance du milieu économique par son métier de Syndic, avec pour mission principalement, d’établir la faisabilité du projet, de constituer l’équipe du festival et de maîtriser le budget prévisionnel de 7 MF (un peu plus d’un million d’euros).

 

Marlies von Pistor et Christian Proust (photos Territoire Magazine)

Pour construire son dossier, elle réalisa un benchmarking au Printemps de Bourges en avril, afin d'en tirer un maximum d’enseignements. Le dossier fut ficelé en octobre et obtint même le soutien du Conseil d’Europe au titre d’une programmation d’artistes européens venant d’Allemagne, de Grande-Bretagne, de Belgique, d’Italie, de Suède…

Carte postale éditée pour l’édition 1988 où l’on peut voir,
Boy George, Serge Gainsbourg, Julien Clerc,
XXX, Elli Medeiros, XXX
XXX, Charles Aznavour, XXX, Frank Zappa…

Merci si vous pouvez compléter les noms.

À l’origine, les organisateurs avaient choisi d’implanter le festival au lieu-dit La Bérézina, sur le plateau du Ballon d’Alsace, par similitude avec la situation de Leysin situé à 1253 mètres d'altitude !

Carte postale Le Ballon d’Alsace (coll. privée)

Le festival fut baptisé "Le Ballon Territoire de Musique".

Cette  appellation formée de "Ballon", le lieu prévu où devait se dérouler le festival et de "Territoire de Musique", du nom de l’association en charge du festival.

*Territoire de Musique : L’association à but non lucratif fut créée en mars 1988 pour prendre en charge l’organisation des fêtes du Bicentenaire. Le Conseil général confia l’organisation du festival à cette nouvelle entité au vue du profil similaire en termes d’organisation à mettre en place pour le bon déroulement d’une telle manifestation. Sa première présidente fut Marlies von Pistor (22 août 1988).

Le lieu choisit bat de l’aile…

Quand le lieu choisi, le Ballon d’Alsace, pour réceptionner le festival, fut connu en 1988, il rencontra une opposition venue des écologistes. Les membres de l’ABPN (Association Belfortaine de la Protection de la Nature) vont combattre le projet avec une véhémence argumentée sur le non sens, pour eux, de ce concept car le lieu est soumis à de fortes variations météorologiques, peut être recouvert d’un épais brouillard même en été, son éloignement des services de santé, la volumétrie nécessaire pour assurer le stationnement… et l’incompatibilité du grand tétras nichant dans une tourbière assez proche et des décibels émis lors des concerts !

Carte postale Le grand tétras (coll. privée)

Les écologistes ne pouvaient pas accepter que ce cocon naturel ne soit pas préservé d’une agression de ce type !

L’argumentation fut entendue et acceptée par le président du Conseil général. Elle fit s’envoler le projet, du Ballon, pour atterrir en un lieu proche du pied du Ballon, sur la presqu’île du Malsaucy située entre les communes de Sermamagny et Bas-Evette.

Carte postale Le Malsaucy (coll. BF)

NA : Un lien à la fin du texte permet d’accéder à l’article consacré à ce lieu.

Le choix de ce nouveau lieu répondait imparfaitement à la satisfaction des écologistes; toutefois, étant associés au projet, ils décidèrent d’attendre d’avoir un retour d’expérience pour réajuster leur position. Ils auraient préféré que le Ballon atterrisse sur le terrain d’aviation de Chaux…

Carte postale Aérodrome de Chaux (coll. BF)

Mais l’armistice fut de courte durée car les écologistes découvrirent en mai 1989, qu’un chemin allait devenir une route bitumée pour permettre le transport du matériel et dont sa largeur devait autoriser le croisement de deux véhicules de secours…

La route de l’enfer n'est-elle pas pavée de bonnes intentions…

1989,  Le Ballon Territoire de Musique

Ce projet de festival pensé en 1987 prit jour pour se dérouler les 23, 24 et 25 juin 1989, en offrant un patchwork de 40 concerts dont 39 se déroulèrent le samedi et le dimanche; un seul concert fut programmé le vendredi, le concert d’ouverture de ce nouveau festival de musique de l’été…

Affiche du festival de 1989

Donc comme précisé précédemment, le festival prévu à l’origine au Ballon d’Alsace fut déplacé sur la presqu’île du Malsaucy, entre l'étang du même nom et l'étang de la Véronne.

Trois scènes en plein air furent installées pour accueillir les concerts, nommées La Savoureuse et Le Malsaucy où furent donnés les concerts à forte audience, et L’Espace Evette pour les révélations rock et groupes locaux. Une quatrième scène, celle-ci sous chapiteau, Le Salbert était plus destinée aux chansons.

Plan d’implantation des scènes (réal. BF sur plan IGN)

À l’entrée du festival était installée une scène off.

Programmation

Pour une première, son affiche proposait Catherine Lara en concert d’ouverture, Nina Hagen, Ange, Noir Désir, Charlélie Couture, Jacques Higelin, Maurane, Les Garçons Bouchers… et Elvis Costello comme tête d’affiche pour la clôture du festival.

La programmation (Territoire Magazine)

La programmation de ces 3 jours offrit 40 concerts répartis sur 4 scènes.

Vendredi 23 juin, concert d’ouverture

Le vendredi soir dont l’entrée était gratuite, fut une "Nuit magique" car Catherine Lara n’était pas la seule au violon… l’Orchestre symphonique Paris Rive Droite l’accompagnait avec pas moins de 60 musiciens sur la scène de La Savoureuse !

Affiche annonçant le concert d’ouverture avec Catherine Lara

Entre 5000 à 8000 personnes (suivant les sources, certaines un peu "marseillaises") étaient venues participer au concert d’ouverture.

Si la chanteuse dut œuvrer avec une extinction de sa voix, elle sut enchanter le public avec ses envolées de violon.

Catherine Lara, la reine de la soirée (extrait photo vidéo INA)

La nuit fût aussi de convenance car le ciel au-dessus de la "Rockeuse de diamants", était en symbiose avec de nombreuses étoiles scintillantes !

Vinyle EP Catherine Lara La rockeuse de diamants (coll. privée)

Il était dit que la nuit serait étincelante car le Conseil général avait prévu un feu d’artifices pour clôturer cette première soirée, sous le regard émerveillé de la lune.

Les invités du jour repartirent avec les yeux pleins d’étoiles musicales...

Samedi 24 juin, le rock dans tous ses états...

Après la belle entrée en matière du concert du vendredi, le samedi, le festival entrait dans sa phase multi-scènes. Il débuta à 12 heures par le premier concert à l’Espace Evette, avec du rock nerveux joué par le groupe bisontin Untel Untel qui sera suivi du groupe E127 dans le même style musical…

Groupe bisontin Untel Untel

Poursuivons le déroulement du programme avec quelques autres concerts…

À 13 heures, au Chapiteau du Salbert, plutôt réservé à la chanson, le programme débuta avec le chanteur bisontin Pascal Mathieu.

Pascal Mathieu, le bisontin sous le chapiteau (photo Le Pays)

Une heure plus tard, Nina Hagen s’installa sur la scène Le Malsaucy pour un set cyclonique; la chanteuse allemande ne laissa pas entrevoir au public la possibilité d’effectuer une petite sieste…

Nina Hagen, il est vrai qu’on n’est pas loin de l’Alsace !

Le premier à prendre possession de la scène off, installée à l’entrée du festival, fut le groupe belfortain Sombre Septembre.

Le quatuor de Sombre Septembre (photo Last. FM)

À titre d’avertissement aux festivaliers, le chanteur du groupe, Erick Walter leur dédicaça "Le nez rouge" synonyme de coup de soleil ou d’excès d’alcool ?

Le premier EP de Sombre Septembre (coll. privée)

Les concerts se déroulèrent l’après-midi suivant le programme établi pour atteindre la soirée où devaient se produire les têtes d’affiche.

Mais dans le programme, d’autres francs-comtois étaient présents au Malsaucy, dont le groupe jurassien Les Infidèles pour un set sur la scène Espace Evette avec leur "Héroïne"...

Les Infidèles venus de Lons-le-Saunier (photo Le Pays)

Parmi les têtes d’affiche, la Belgique était représentée par Maurane, (décédée tout récemment, le 7 mai 2018), qui ouvrit la scène La Savoureuse à 20 heures, offrant un concert post Starmania, où textes et musiques swinguaient avec délicatesse pour faire "Danser" les festivaliers.

Carte postale Maurane (coll. privée)

Toujours sur la même scène, la nuit pas encore "Tombé du ciel", vint le concert "Champagne" avec Jacques Higelin. Un petit regret, l’éloignement entre les festivaliers et le chanteur ne permit pas d’avoir l’osmose tant attendue…

Jacques Higelin sur la scène de La Savoureuse (photo Le Pays)

La nuit était tombée depuis longtemps quand, la journée du samedi basculait au dimanche quand les Ange entrèrent sur la scène Le Malsaucy… pourtant personne ne rêvait ! Les frères Décamps and Co, en groupe local, loin de toute "Caricature" offrirent un concert "Tout feu, tout flamme"… pendant deux plombes. Ont-ils réveillé "Émile Jacotey" ?

Le groupe Ange (photo Le Pays)

Le dernier concert du samedi, se déroula tard dans la nuit, à 1h30 du matin, sous le Chapiteau Salbert. Il fut donné au groupe angevin Emma Zita de clôturer la journée après le passage d’Elmer Foot Beat. Avec eux, James Brown était un peu au Malsaucy, avec leur soul-music au top, tout en rythme, à "200 à l’heure".

La chanteuse Claudie du groupe Emma Zita

NA : James Brown, en personne, est venu aux Eurockéennes en 1992.

Dimanche 25 juin, le rock toujours présent

Dès midi sonnant, deux scènes donnèrent le la pour la troisième et dernière journée du festival de musique prévue au programme.

À la scène de L’Espace Evette, le groupe belfortain Les Z’Amants prit possession des lieux, pour délivrer un rock assez percutant où le funk était de mise enveloppant des chansons dont les paroles d’origine sont parfois détournées, en y versant leur sauce épicée… telles "Les Ejaculations d’Antoine" ! Mais certaines sont intouchables, comme "Les copains d’abord" du sétois Georges…

Les Z’Amants (photo Le Pays)

Au Chapiteau Salbert, le poète rockeur dolois Michel Buzon offrit au public un concert rock teinté progressif, basé sur ces 3 albums dont le dernier tout chaud, "Les réfugiés du dedans".

Michel Buzon (couverture du livre Séduction poussière)

Côté de la scène Le Malsaucy, on découvrit les bordelais de Noir Désir dont le titre "Aux sombres héros de l'amer" va devenir le titre phare du groupe.

Pochette 45 tours Aux sombres héros de l'amerde Noir Désir (coll. privée)

Puis vinrent, les italiens de Litfiba qui après "Istanbul, Amsterdam"… venaient proposer leur rock à la sauce new wave, voir folk au Malsaucy.

La pochette du vinyle Desaparecido de Litfiba (coll. privée)

Les deux orchestres se réunirent pour un bœuf sur un morceau des Stooges, avant de slamer sur les festivaliers.

Toujours sur la même scène, en début de soirée, Les Garçons Bouchers, les truculents troublions ont déversé leur rock alternatif à base de ska, rap et funk pour le plus grand plaisir des festivaliers venus découvrir "Les fortes têtes" tout en dégustant "La bière" acquise précédemment quand d’autres, les "Carnivores" mangeaient leur sandwich…

Les Garçons Bouchers avec leur leader François Hadji-Lazaro
(coll. privée)

À 21 heures, la scène de La Savoureuse s’ouvrit sur le concert du nancéien Charlélie Couture pour un rock déclenchant une "Violente passion" de ses fans et pas seulement de "Rachel".

Charlélie Couture au piano (extrait photo vidéo INA)

Pour clôturer la soirée et le festival, les organisateurs avait fait une très bonne pioche en faisant appel à l’anglais Elvis Costello, pour son seul concert en France et seul, avec sa guitare acoustique.

Couverture de Territoire Magazine, le mensuel du Conseil général

Le prolifique song-writer et tout autant hétéroclite en style de music, ne laissa aucun rockeur indifférent lors de son concert.

Elvis Costello (photo Le Pays)

Pour terminer son concert, il n’invita pas les grillons du Malsaucy mais les Scarabées de Liverpool pour la dernière chanson du festival, "My brave face" !

D’autres ballons… en altitude

Le festival Le Ballon Territoire de musiques avait invité… d’autres ballons !

Du 22 au 25 juin eut lieu au Château de Villersexel, la Trans World Ballon Cup, dont une épreuve de la compétition fut décentralisée le samedi, pour un passage au-dessus du Malsaucy en soirée.

Carte postale Villersexel Le Ballon Sport 2000, pilote Jean Becker
(coll. privée)

Cette opération put se réaliser grâce au concours du Club Aérostatique de Franche-Comté, participant à la compétition.

Épilogue

Ce premier festival dans l’écrin naturel du Malsaucy, pour un ballon d’essai fut une belle réussite, même si l’affluence (25000 festivaliers annoncés) fut un peu moins forte qu’espérée ! Mais dès le samedi, il fut décidé de reconduire le festival pour l’année suivante.

Le petit festival né en 1989, Ballon Territoire de Musiques, est devenu très rapidement un des festivals incontournables de l’été.

Pour couvrir le festival, FR3 Bourgogne-Franche-Comté avait envoyé une équipe technique au Malsaucy. Une partie du concert de Catherine Lara fut diffusé le lendemain.

NA : Pour ceux qui voudraient visualiser un petit résumé (30 minute) du festival, un lien en fin de l’article permet d’accéder à la vidéo de l’INA.

JM

Liens pour accéder aux articles cités

Articles sur le Malsaucy : Cliquer ici

Vidéo de l’INA sur le festival : Cliquer ici

Références livres : Journal Le Pays et Le magazine Territoire Magazine (collection Archives Municipales de Belfort),  

Références Web : Wikipédia, YouTube, INA, Divers sites Web.

Infos pratiques  

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