Concours musical des 15 & 16 août 1908, à Belfort (2e partie) : La journée du 15 août
MAJ le 4 septembre 2023
Les 15 & 16 août 1908, Belfort organisa un grand Festival de musique avec en point d'orgue un Concours musical international, où participèrent des sociétés de musique venant de France, d’Alsace, de Lorraine et de Suisse.
Carte postale Souvenir du Concours (coll. JM)
Pour ce concours exceptionnel, 115 formations s’étaient inscrites réunissant près de 4500 musiciens !
Cette deuxième partie est consacrée à la 1ère journée du Concours qui se déroula le 15 août 1908, et aux autres animations l'accompagnant (hommage aux morts de 1870-1871, concerts, retraite aux flambeaux…).
Accueil des Société de musique
Tôt le matin de ce samedi, se déroula à la gare, la poursuite de la réception de sociétés par leurs commissaires respectifs. Beaucoup de trains étaient en retard suite à la foule qui avait prit d’assaut les wagons pour se rendre à Belfort.
La cour de la gare, baignée par un soleil éclatant, était noire de monde avec les belfortains et de nombreux militaires qui étaient venus accueillir les musiciens et les visiteurs en ce jour de fêtes musicales.
Carte postale L’accueil des Sociétés à la gare de Belfort (coll. JM)
Les présidents des sociétés de musique recevaient un bouquet par les commissaires en charge de chaque entité venant concourir.
Carte postale Le faubourg de France de Belfort (coll. JM)
Les musiques rejoignirent le lieu où elles devaient se rendre pour participer à leur première épreuve.
1ère épreuve, le Concours de lecture à vue
Dès 8h00 débuta officiellement le Festival de musique avec le Concours de lecture à vue. Cette figure était imposée par le jury qui choisissait le morceau à jouer. Une particularité de ce concours, il était exécuté à huis clos.
Carte postale L’Union de Schiltigheim (coll. privée)
Après avoir terminé l’exécution du morceau prévu, les sociétés de musique se répandaient dans les rues de la ville pour interpréter les plus belles partitions de leur répertoire, pour le plus grand bonheur du public
Dépôt de couronnes au cimetière des Mobiles
À l’occasion du Festival de musique, les deux sociétés de Chalon-sur-Saône, L’Harmonie et les Trompettes de chasse du Rallye, ainsi que la Chorale des Enfants d’Algérie avaient demandé à se rendre au Cimetière des Mobiles pour déposer des couronnes sur les tombes des soldats morts en 1870-1871 à Belfort, lors du conflit avec les prussiens.
Carte postale Souvenir du Concours de Musique (coll. JM)
À 10 heures, le cortège se forma devant l’hôtel de ville. Il fut conduit par l’adjoint au maire, Paul Giroud accompagné des conseillers municipaux, Paul Dié et Émile Py, de M. Bled-Boursey, le président des Anciens Mobiles de Saône-et-Loire, M. Jacquetin le conseiller municipal de Chalon-sur-Saône, M. E. Musard le président de l’Harmonie du Rallye-Chalon…
Suivaient les sociétés et une foule importante pour se rendre au lieu de mémoire du Siège de Belfort.
Carte postale L’entrée du cimetière des Mobiles à Belfort (coll. BF)
Devant le monument, l’Harmonie et les Trompettes de chasse du Rallye exécutèrent le morceau "L’Écho de France", écrit par M. E. Musard.
Après le dépôt de la couronne de perles, M. Jacquetin lut un discours, fort émouvant, en mémoire des mobiles tués pendant le Siège. M. Bled-Boursey fit lui aussi son discours. Le représentant du maire, Paul Giroud remercia les intervenants de leur démarche qui honore la Cité du Lion.
Il revint à l’Harmonie de Chalon d’exécuter La Marseillaise pour clôturer la cérémonie qui impressionna les nombreuses personnes présentes.
Carte postale Le Monument des Mobiles (coll. BF)
Initialement, la Chorale des Enfants d’Algérie devait participer à cette cérémonie mais, ayant terminé tard son concours, elle ne put se libérer. Elle effectua son pèlerinage le dimanche matin où étaient présents M. Perez le président de la société accompagné de personnalités belfortaines. Il déposa une couronne et lut son discours où la terre d’Algérie bien qu’éloignée, était bien présente en ce lieu. L’Harmonie de Mascara, qui s’était jointe à cette démarche, interpréta La Marseillaise.
2e épreuve, le Concours d’exécution
Au début de l’après-midi, à 14 heures, les sociétés furent soumises au Concours d’exécution. Pour cette épreuve, elles choisissaient le morceau qu’elles voulaient interpréter.
Le public pouvait venir les écouter, un droit d’entrée de 50 centimes était demandé par personne.
Carte postale Les trompettes de L’Alliance Cérès, Reims (coll. privée)
Accueil du représentant du gouvernement
À 15 heures, à la gare, le maire Charles Schneider et le préfet, Eugène Schmidt, accompagnés de conseillers municipaux accueillirent M. Michelot, l’inspecteur général des Beaux-arts, représentant Etienne Dujardin-Beaumetz, le sous-secrétaire d’Etat des Beaux-arts. Il se rendit à la préfecture, son lieu de résidence pendant son séjour à Belfort.
Carte postale La préfecture de Belfort (coll. JM)
À partir de 17 heures et jusqu’à 19 heures, les sociétés s'étaient réparties sur les différentes places de la ville, pour donner des concerts devant une foule dense, appréciant les programmes musicaux proposés.
Retraite militaire aux flambeaux
Dès 20h30, une grande retraite militaire aux flambeaux se déroula dans la ville, après celle de la veille; les édifices publics étaient restés illuminés. Sur le parcours, les festons de lampions installés projetaient leurs lumières vacillantes quant aux guirlandes formées de lanternes électriques multicolores, elles assuraient des feux d’artifice de lumières.
Carte postale Belfort Pont Carnot (coll. JM)
NA : On voit au fond les arcs de triomphe installés sur le pont Carnot.
La parade eut un grand succès et remplit de joie le public.
Concerts libres dans la ville
La place d’Armes, comme d’autres lieux, accueillit des concerts pour le grand plaisir du public qui avait envahi la place. Il est vrai qu’elle possédait une scène à orchestre, avec son kiosque.
Carte postale Le kiosque de la place d’Armes (coll. JM)
Le premier concert fut celui de la société alsacienne, La Vogesia de Strasbourg qui avait remporté le premier prix dans sa catégorie. Elle exécuta un programme s’appuyant sur ses meilleurs morceaux. Elle reçut de forts nombreux et chaleureux applaudissements pour sa prestation.
A la fin de son concert, Charles Schneider accompagné de ses adjoints félicita la formation et remis à son président M. Ritti, un bronze d’art offert par l'industiel Alfred Engel.
Ce concert et cette remise de prix fut suivi d’un autre concert par Les Trompettes de Vesoul qui remportèrent un beau succès.
Programme, dimanche 16 août
Le dimanche 16 août se déroula la dernière journée du Festival musical.
3ème épreuve, le Concours d’honneur
La journée commença à 8 heures par le Concours d’honneur qui se déroula dans les mêmes lieux que les concours précédents. Pour cette épreuve, le morceau était imposé par le jury.
Comme pour le Concours d’exécution, le public pouvait venir écouter les formations dans leur prestation; le même droit d’entrée de 50 centimes était demandé par personne.
Carte postale L’Etendard de Troyes (coll. privée)
Après avoir effectué leur prestation, les sociétés s’éparpillaient dans la ville pour improviser de nouveaux concerts, toujours autant appréciés par le public qui était très mélomane en ce festival.
Le défilé des sociétés
Quant à l’après-midi, l’ensemble des sociétés participa au défilé dans les rues de la Cité du Lion.
Carte postale Avant l’arrivée du défilé place Corbis (coll. JM)
NA : Au coin de la rue, la pendule affiche 13h40, la foule commence déjà à s’amasser sur le parcours…
Le défilé débuta à 15 heures suivant l’itinéraire suivant : Faubourg des Vosges, faubourg des Ancêtres, faubourg de France, avenue de la Gare, rue de la Banque, faubourg de Montbéliard, rue Denfert, avenue de l’Arsenal, quai Vauban, place d’Armes, Hôtel de ville, rue du Repos, et enfin place de la République où était prévu la dislocation.
Plan de l’itinéraire (réalisation BF)
Au regard du nombre de musiciens, les sociétés furent réparties sur trois lieux : à l’extrémité du faubourg des Vosges pour celles devant partir en premier, sur la place du Marché et sur la place des Ecoles.
Le défilé s’ébranla à 15 heures. A sa tête, six gendarmes à cheval devançaient un groupe d’agents de police avec leur commissaire.
Carte postale Concordia de Riquewihr (coll. JM)
Les sociétés se succédaient dans un ordre parfait, pour constituer le cortège. A la tête de chacune d’entre elles, se trouvait leur bannière, une pancarte avec leur nom et leurs récompenses.
Le public, massé le long du trajet, fit une ovation à chaque société jouant un de ses morceaux. Les harmonies Alsaciennes et Lorraines étaient les plus acclamées, souvent avec des vivats liés au nom de leur ville…
Carte postale Le défilé place Corbis (coll. BF)
NA : Cet enthousiasme pour ces sociétés était lié à l’histoire; il ne faut pas oublier qu’en 1908, l’Alsace et une partie de la Lorraine étaient sous le joug de l’Allemagne depuis 1871. Cette situation n’étaient ni acceptée ni acceptable pour beaucoup de français.
Les acclamations ne leur étaient pas réservées, les autres sociétés étaient aussi acclamées, certaines plus que d’autres peut-être en fonction des morceaux joués, de leur prestance… ou de leur habillement, comme pour la Chorale des Enfants d’Algérie vêtue d’un burnous blanc !
Des fleurs, des rubans étaient jetées à leur passage.
Carte postale Toujours, le défilé place Corbis (coll. JM)
Arrivé place d’Armes, le cortège passa devant l’hôtel de ville où s’étaient rassemblés autour de M. Michelot l’inspecteur des Beaux-arts, le député-maire Charles Schneider, le sénateur Philippe Berger, le préfet Eugène Schmidt, plusieurs membres de la municipalité, des membres du Comité d’organisation et du Jury.
Carte postale Le défilé dans le faubourg de France (coll. BF)
Après la remise de la médaille, les différentes sociétés finissaient le parcours du cortège et entamaient la dislocation.
Remise des médailles commémoratives
A l’occasion de l’évènement, des médailles commémoratives furent créées et remises lors du défilé, au passage des sociétés devant l’Hôtel de ville.
La médaille (avers et revers) commémorative (coll. privée)
Ce fut le secrétaire général du Comité d’organisation des fêtes, Léon Deubel qui eut l’honneur de remettre une médaille à chaque président des formations; son porte-drapeau saluait les autorités pendant ce geste cérémonial.
Par contre, les décorations furent remises dans la salle d’honneur de l’hôtel de ville.
Carte postale La salle d’honneur de l’hôtel de ville (coll. BF)
A l’extérieur, la foule était massée pour voir ses attributions et féliciter les musiciens, une nouvelle fois.
Départ du ballon Le Petit Journal
A 16 heures, sur la place du Marché couvert, rue Fréry, eut lieu l’ascension libre du ballon du Petit Journal. A son bord M. Leprince, son constructeur et M. Barbe, inspecteur, il s’éleva peu à peu et porté par un vent d’Est assez fort, il se dirigea en direction d’Héricourt.
Carte postale Le ballon du Petit Journal (coll. JM)
Le banquet
A 20 heures, un banquet était offert aux membres du Jury et aux membres du Comité d’organisation. Il se déroula à l’hôtel du Tonneau d’Or sous la présidence de M. Michelot, l’inspecteur général des Beaux-arts.
Carte de visite du Tonneau d’or (coll. BF)
A sa table, il y avait, entre autre, le maire Charles Schneider et ses adjoints Houbre et Giroud, Eugène Schmidt le Préfet, Philippe Berger le sénateur du Haut-Rhin, Ernest Boigeol le Président de la Chambre de Commerce, Laurent Thiéry le conseiller général, M. Dupont le président du syndicat des commerçants….
Carte postale du Tonneau d’or à Belfort (coll. JM)
Parmi les autres convives, venus de l’extérieur, on notait la présence de M. Blémant le chef de musique de l’école d’artillerie de Vincennes, M. Lacoste le chef de musique de l’école d’artillerie de Besançon, le président des anciens mobiles de Saône-et-Loire, M. Jacquetin conseiller municipal de Chalon-sur-Saône…
Carte postale La salle à manger du Tonneau d’or (coll. JM)
Les musiques belfortaines étaient très bien représentées par les présidents ou directeurs des sociétés, Jules Cabrol de la Lyre Belfortaine, Camille Thiault de la Philarmonique, A. Didisheim de la Lorraine, D. Didisheim de la Fanfare des Trompes de Chasse, Van Campo de l’Harmonie des Usines, Gotherot de La Concordia, Moraweck du Rallye-Belfort…
A d’autres tables, les directeurs et ou présidents des sociétés venues participer au Concours musical…
Pour l’occasion, le chef Garteiser de l’hôtel avait concocté un excellent repas dont en voici le contenu :
Carte du menu reconstituée (réalisation BF)
Lors du banquet, la Chorale des Enfants d’Algérie se produisit à plusieurs reprises et les chanteurs furent chaudement félicités par les convives.
Bien entendu, il y eut les discours du sénateur Philippe Berger et du maire Charles Schneider.
M. Michelot, l’inspecteur général des Beaux-arts remercia et félicita les organisateurs du Concours Musical où il avait pu voir la joie et le bonheur de la population française partagés avec les musiciens et visiteurs. Il donna lecture des distinctions honorifiques attribuées.
Carte postale Souvenir du Concours de Musique (coll. JM)
Le secrétaire général du Comité d’organisation des fêtes, Léon Deubel fut chaudement félicité à plusieurs reprises par les personnalités pour le travail accompli et le résultat obtenu.
Plusieurs toasts furent portés tout au long de la soirée.
A la nuit tombée, l’embrasement du Lion fut au programme.
Le concours des arcs de triomphe
Une commission nommée fut en charge de décerner des prix aux commerçants étant à l’initiative des arcs de triomphe.
La somme de 95 francs fut attribuée pour les arcs de triomphe de la rue de la Banque, du faubourg de France et du faubourg des Ancêtres.
Carte postale L’arc de triomphe faubourg de France (coll. JM)
L’arc de triomphe de la rue de l’Abattoir, certainement plus modeste, obtint la somme de 15 francs.
NA : Ami lecteur du blog, au cas où, je recherche une photo de cet arc de triomphe rue de l’Abattoir.
Les arcs de triomphe du pont Carnot furent réalisés par la ville.
Le jeu des 12 inconnues…
Les visuels de cet article font une grande place à la série de 12 cartes postales éditées à l’occasion de ce Concours musical. Si sur ces cartes, le nom de l’éditeur n’est pas présent et dans le libellé du texte porté n’apparaît pas de numérotation, une numérotation est pourtant bien présente sur les cartes !
Elles sont numérotées manuellement de 1 à 12, mais avec la représentation est inversée.
Exemple avec la carte ci-dessous,
Un zoom permet de voir en bas à droite de la carte, à gauche de l’enfant avec le béret, le chiffre 3 inscrit à la main.
Je vous laisse le soin découvrir les autres numéros sur les 11 autres cartes de la série…
NA : Je suis à votre disposition pour toute aide au cas où !
Fin de la deuxième partie, la suite via le Sommaire, lien ci-dessous.
Épilogue
Après la réception des dernières Sociétés de musique, le Concours se déroula conformément au programme, sous deux formes, lecture à vue et d'exécution.
Un hommage fut rendu aux morts de 1870-1871 au Cimetière des Mobiles.
La musique, l'invitée du jour ne fut pas que réservée pour le seul Concours; il y eu de nombreux concerts improvisés sur les différentes places de la ville.
JM
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Références Web : Divers sites.
Références livres : Journaux La Frontière et L’Alsace (collection Archives municipales de Belfort).
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